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Conférence de Paris sur le Bassin du Niger : Pour la survie du fleuve Niger

Publié le jeudi 29 avril 2004 à 07h15min

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Le Centre international des conférences de Kléber à Paris, a abrité les 26 et 27 avril derniers, un sommet des chefs d’Etat et de gouvernement ayant le fleuve Niger en partage. Sous l’égide du président français, Jacques Chirac et en présence des partenaires au développement du continent africain, neuf pays (Burkina Faso, Bénin, Cameroun, Côte d’Ivoire, Guinée, Mali, Nigeria, Tchad et Niger) ont planché sur les voies et moyens de viabiliser et rentabiliser ce fleuve, vital pour leurs économies.

C’est le président français Jacques Chirac, maître de céans qui a pris la parole en premier, lors de ce "brainstorming" de haut niveau. Après avoir rappelé que l’idée de faire recouvrer au fleuve Niger toute sa plénitude, ainsi que la nécessité de s’accorder sur une "vision partagée" sur l’utilisation des ressources en eau de la vaste zone qu’irrigue ce grand fleuve et ses nombreux affluents, était née en septembre 2003, il s’est dit solidaire de cette démarche. L’eau, a-t-il affirmé "est la première nécessité", qui plus est "dans une région aux confins du désert".

Puis, rappelant cette phrase d’Antoine de Saint-Exupéry qui disait que "l’eau est la plus grande richesse qui soit au monde et aussi la plus délicate", il a souligné que "pourtant l’accès à l’eau reste encore pour de nombreuses populations de l’Afrique subsaharienne, un défi journalier". D’où l’importance de cette conférence qui s’inscrit en droite ligne de la mobilisation qui a déjà commencé pour la préservation des ressources hydriques du continent. Qui plus est en ayant pour autre objectif de définir des politiques intégrées de gestion de l’eau, ce sommet est opportun, si tant est que "l’eau inégalement répartie et toujours convoitée, génère des conflits et des antagonismes". Puis, il a insisté sur "le potentiel considérable" qu’offre le Bassin du Niger pour le développement d’activités agricoles et pastorales dont il est déjà le principal support. Un potentiel sous-exploité, car les aménagements actuels portent sur 300 000 hectares, alors que "les superficies utiles pourraient être doublées avec de nouvelles infrastructures hydrauliques, voire portées à deux millions et demi d’hectares en utilisant les plaines inondables, en reboisant les berges et en pratiquant des cultures en terrasses le long du fleuve et de ses affluents. Il y a donc urgence à réhabiliter le fleuve Niger qui se meurt doucement, agressé dans son intimité par l’ensablement et victime des vicissitudes du temps et de la prédation des hommes".

Enjeux et objectifs de la conférence

Une conviction partagée par les autres intervenants à la cérémonie d’ouverture. Du président nigérien Mamadou Tandja au représentant des bailleurs de fonds, Amadou Ould Abdallah en passant par Romano Prodi, président de la Commission de l’Union européenne et Klans Topfer, directeur exécutif des Nations unies pour l’environnement, tous ont insisté sur la nécessité d’avoir une politique "claire, cohérente, responsable et concertée" des ressources en eau du continent, particulièrement du Bassin du fleuve Niger. Ce d’autant que "la baisse de la pluviométrie, les sécheresses répétées, la pression démographique et les techniques de production inadaptées ont engendré un déséquilibre écologique profond avec l’aggravation de certains phénomènes : ensablement du lit, colonisation par des végétaux flottants, destruction des habitats aquatiques, érosions éoliennes et hydriques, rejets de déchets et diverses pollutions...".

Quoi de plus normal devant ce tableau peu réjouissant, que la "vision partagée pour un développement durable du bassin du fleuve Niger", ait été l’un des principaux enjeux de ce sommet. Engagement politique fort, il fallait œuvrer à le traduire "en moyens d’action afin d’en faire ’l’instrument d’une gestion optimale des ressources du bassin versant du fleuve Niger et la mise en place de mécanismes, de concertation et la préparation d’un Plan d’action pour le développement durable du bassin". D’où l’objectif premier pour chacun des pays concernés de "prendre en considération les implications de l’adoption du principe, de la vision partagée et les évolutions qui en résultent dans les modalités de coopération : extension des études d’impact, procédures de consultation, partage des risques et des bénéfices liés à l’exploitation de la ressource en eau".

Second objectif, "poursuivre la dynamique du processus de vision partagée et établir un cadre commun de travail nécessaire à l’action des différents acteurs".

Troisième objectif enfin "confirmer et renforcer le partenariat entre les donateurs, les partenaires techniques, le secrétariat exécutif de l’Autorité du Bassin du fleuve Niger (ABN) et les neuf pays du bassin. Résultats attendus, la signature par les chefs d’Etat de la "Déclaration de Paris relative aux principes de gouvernance pour un développement durable du bassin du Niger". Aussi, "l’élaboration d’un cadre commun d’intervention, notamment la préparation du Guide du processus de Vision partagée. Enfin, la signature du cadre de coopération des partenaires de l’ABN" devait couronner tout ce beau travail.

La portée hautement significative de la "Déclaration de Paris" (lire synthèse par ailleurs), la concordance de vues entre les experts des différents Etats, entre les chefs d’Etat ensuite, ainsi que le cri du cœur du président nigérien Mamadou Tandja qui a martelé que "l’Afrique doit compter d’abord sur elle-même", laissent augurer de lendemains meilleurs pour le fleuve Niger.

Boubakar SY
envoyé spécial à Paris


Les grands engagements de la "Déclaration de Paris"

Les neuf chefs d’Etat et de gouvernement de l’Autorité du Bassin du Niger, réunis à Paris les 26 et 27 avril derniers, ont adopté de grands principes pour une gestion mieux maîtrisée et concertée des ressources hydriques du Bassin du Niger. Pour se faire, ils se sont engagés à "mettre en œuvre" la vision partagée pour le développement du bassin du Niger. Les Etats coopéreront sur une base de "solidarité et de réciprocité" en prenant en compte les accords antérieurs et aux moyens d’accords nouveaux en vue d’élaborer et de réaliser des politiques des programmes et des projets initiés à tout ou partie du bassin. Le partage des ressources en eau entre ses divers usagers, leur gestion et leur mise en valeur doivent s’effectuer en tenant compte des objectifs de développement durable. Les Etats membres ont reconnu que "chacun d’entre eux doit jouir d’une part raisonnable et équitable des ressources en eau, afin de contribuer à la réduction de la pauvreté, à la sécurité alimentaire et à la protection de l’environnement. D’autre part, les projets ou programmes qui affectent de manière significative le régime des eaux du bassin doivent être soumis à une consultation préalable des Etats et ils s’informeront mutuellement sans délai de "toute situation susceptible d’avoir un impact sur les pays riverains". La conciliation et la médiation sont "les voies privilégiées de règlement de tout différend qui pourrait surgir entre les Etats-membres".

Le développement du Bassin du Niger, fondé sur les principes énoncés ci-dessus, constitue "une base solide pour l’intégration régionale".

L’Autorité du Bassin du Niger doit donc "rechercher les synergies avec les organisations sous-régionales et régionales pour s’assurer de la cohérence d’ensemble des stratégies d’intégration économique".

B.SY.


Présentation physique et chiffrée du Bassin du fleuve Niger

Prenant sa source dans les montagnes du Fouta Djallon en Guinée à une altitude de 800 m, le fleuve Niger, long de 4 200 km, est le 3e plus grand fleuve d’Afrique, après le Nil et le Congo. Son bassin d’environ 2 000 000 km2 compte 1 500 000 km2 de bassin versant actif, et est réparti entre les pays suivants : Bénin (2,5%), Burkina (3,9%), Cameroun (4,4%), Côte d’Ivoire (1,2%), Guinée (4,6%), Mali (30,3%), Niger (23,8%), Nigeria (28,3%) et le Tchad (1%). Le Bassin du Niger est soumis à l’influence de climats variables du Nord au Sud.

Le passage de la saison des pluies à la saison sèche est régi par la circulation de 2 masses d’air : l’air continental tropical qui provient du Sahara, air sec de direction générale Nord-Est et appelé harmattan ; l’air équatorial maritime, humide et instable de température relativement fraîche, provenant de l’anticyclone de Sainte Hélène de direction Sud-Ouest appelé mousson.

Le Bassin s’étale sur trois zones climatiques du Sud au Nord : la zone guinéenne ou la pluviométrie annuelle est de 1200 à 3 000 mm. La zone soudanienne avec 500 à 1200 mm d’eau par an et la zone sahélienne où la pluviométrie va de 100 à 500 mm.

Réseau hydrographique et hydrologique du Bassin du Niger

Le cours du fleuve peut-être divisé en quatre sections aux caractéristiques physico-géographiques homogènes. Il y a "le haut-Niger" (de la source jusqu’à Ségou au Mali) et le Bani (jusqu’à Douna au Mali). Le Niger y reçoit ses principaux affluents que sont le Tinkisso, le Niandan, le Milo et le Sankarani.

On a ensuite "le Delta intérieur" caractérisé par sa faible pente, la largeur de son lit et l’absence d’affluents à compter de la confluence du Bani avec le Niger à Mopti (Mali). Il a une étendue d’environ 80 000 km2. Puis, on a "le Niger moyen" où la pluviométrie croit de 200 mm à 900 mm/an. Enfin, "le Niger inférieur et le delta maritime" qui va de l’aval de Malanville jusqu’au terme du fleuve. Ici, le Niger entre en zones soudanienne et guinéenne et reçoit ses affluents les plus importants( (le Sokoto, le Kaduna et la Benoué). Les débits moyens annuels sont de 1 454 m3/s à Jebba, 5 800 m3/s à Lokoja et 5 929 m3/s à Ouitsha. Dans cette zone, la pluviométrie va de 900 mm à plus de 4 000 mm sur le Golfe de Guinée.

B.SY
Sources : documents de la conférence
Sidwaya

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