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Electrification rurale : Espoirs brisés au Koulpélogo

Publié le mardi 17 avril 2007 à 08h01min

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Dans la lettre ouverte ci-dessous au ministre chargé de l’Energie, Abdoul Rasmané Tougouri, président de l’AVODEKO (l’Association des volontaires pour le développement socioéconomique du Koulpélogo), se désespère de la non-électrification des villes de la province.

Monsieur le Ministre,

La province du Koupélogo, qui n’est plus à présenter à vos yeux, est l’une des dernières provinces de notre pays à ne pas briller dans le "ciel étoilé" du gouvernement Ernest Paramanga Yonli Pour cause, elle est dépourvue de ce qu’on peut appeler le nécessaire et l’indispensable : l’électricité.

Monsieur le Ministre,

La promesse de doter la ville de Ouargaye, chef-lieu de la province du Koulpélogo, d’électricité ne date pas d’aujourd’hui. Cependant, elle tarde à venir et les actions de "saupoudrage" qui sont menées déconcertent les filles et fils de la localité.

Tenez ! dans le cadre de l’électrification rurale, des plaques solaires ont été installées à un certain moment mais elles n’ont pas tenu, si elles n’ont pas tout simplement été arrachées les nuits par des bandes superbement organisées en direction des pays voisins. Investissement à perte.

Autour de 2002, l’idée d’électrification à partir des groupes électrogènes a germé et a mobilisé la population à des souscriptions des filles et fils de la province dont le montant s’élève à des dizaines de millions de F CFA, avec la création d’une coopérative d’électricité mais depuis lors, rien de visible. Et le feuilleton de ce fameux projet n’est pas prêt à se refermer de sitôt.

L’espoir qui est né au sein de la population en voyant l’implantation des premiers poteaux (en bois) en juillet 2006, s’est vite estompé deux (02) à trois (03) mois après. L’entreprise adjudicataire peine à mener les travaux. Le peu de travail effectué manque de technicité : poteaux (en bois) de dimension et hauteur inégales sur les mêmes lignes, implantation des poteaux au milieu des parcelles d’habitation, manque de repères exacts, ... Et pourtant les 13% qui correspondent au prix des travaux exécutés ont semble-t-il englouti déjà dix- sept millions (17.000.000) de nos francs. Un contentieux en cours de traitement judiciaire.

Monsieur le Ministre,

Par la présente, nous voudrions vous rappeler l’espoir brisé, les rêves estompés et la patience trop longtemps supportée qui frise la passivité des filles et fils du Koupélogo. Longtemps grugé, on a fait croire à nos populations quand elles exigeaient l’option pour la SONABEL que "la culotte d’aujourd’hui valait mieux que le pantalon de demain". Et depuis plusieurs années, cette "fameuse culotte" n’arrive point à couvrir nos parties honteuses !

Pour l’heure, il faut se le dire, nous ne voulons pas de ce mode d’électrification par les groupes. La même expérience menée à Mogtédo, à Bani, à Piéla et dans bien d’autres localités a connu des résultats très décevants pour les bénéficiaires : coût du Kwh insupportable, fourniture en électricité dérisoire dans la journée (moins de 6h de temps), dégâts techniques nombreux, dysfonctionnement de la Coopel, etc. ayant entraîné la suspension et la fermeture de ce type d’électrification. De grâce, épargnez-nous des pertes de temps et des éternels recommencements.

Quand on pense que les pylônes de la Kompienga traversent de long en large les villes et les rivages du Koulpélogo (à peine à 1km de la ville de Ouargaye) et qu’on entend parler de ces pylônes que lorsqu’ils s’abattent sur les habitants après le passage des terribles vents de saison !

On ne comprend pas !

Quand on pense que Cinkansé (localité de la province) est située à peine à 32 km de Ouargaye, et bénéficie de l’interconnexion avec le Togo, on se pose la question : et Yargatenga ? Et Sangha ? Et Ouargaye ? Et Dourtenga ? Et Lalgaye ? Ces localités qui sont situées sur le même axe ne peuvent-elles pas bénéficier d’une planification émanant de Cinkansé ?

Ou pourquoi pas en provenance de Tenkodogo, à peine située à 56 km de Ourgaye ? Et dans le temps voir le cas de Yondé, Comin-yanga et Soudigui.

Pourquoi ne devrait-on pas, au Burkina Faso, prendre l’exemple de notre admirable voisin le Ghana qui a drainé l’électricité jusque dans les petits villages et les hameaux de culture ?

On se pose véritablement la question ! Eux au moins ont compris que le vrai et réel chemin du développement passe par l’électrification des zones tant urbaines que rurales, fortes ou faibles, choyées ou oubliées, classées ou étiquetées, ...

Et pourtant ne l’oublions pas, cette province peut tout apporter au reste du pays, toutes choses que le manque d’électricité contribue à handicaper.

Monsieur le Ministre,

Figurez vous :

• La construction des infrastructures à Ouargaye par les particuliers a freiné (moins de 30 constructions/an), parce que ne souhaitant pas continuer à investir dans "l’obscurité". Bien que l’extension récente de la ville par les autorités communales ait suscité un réel engouement.

• Le Centre médical avec antenne chirurgicale, peine très sérieusement à être efficace par manque de source pérenne d’énergie. Comment "opérer" régulièrement les patients souffrants de hernie étranglée qui fait ravage dans la zone avec des petits groupes électrogènes, qui normalement, devraient servir de groupes relais.

• De nombreux projets et ONG ont tout simplement refusé de s’y implanter pour manque d’électricité. L’ex- PADL/K s’est longtemps basé à Tenkodogo alors que son champ d’intervention concernait uniquement le Koulpélogo.

• Le Koulpélogo qui demeure la première province productrice du coton dans les Régions de l’Est et du Centre Est, devrait abriter une usine d’égrenage du coton mais le handicap d’énergie prolonge dans le temps, la réalisation de cet important projet combien vital pour le pays et ses braves paysans.

• Regorgeant d’importantes ressources animales avec la possibilité de transformation locale de ses produits dérivés, les mini laiteries inaugurées il y a à peine deux (02) ans ont jeté les clés sous les paillassons et les nombreuses femmes se voient impuissamment dépourvues des activités rémunératrices de revenus.

• La nouvelle Radio FM qui vient d’ouvrir ses portes est contrainte d’émettre au maximum 3 heures sur les 24 heures de la journée avec les prémices d’une fermeture en perspective même si Naaba Tanga de Ouargaye, à travers le petit écran de la TNB, se dit prêt à mobiliser avec ses pairs, les fonds nécessaires pour alimenter en carburant. Le rêve à peine né demeure chimérique. Quand on sait que ce médium de proximité est un puissant outil de développement et un magnifique vecteur de changement de mentalités et de comportement à travers l’information, la formation, la sensibilisation et la conscientisation des masses on est tenu de dire "mille fois" hélas de voir sous peu ce joyau devenir le nid des salamandres et autres lézards, ... par manque de source pérenne.

Monsieur le Ministre,

Nous ne finirons pas d’égrener ce chapelet de dommages verticaux, latéraux et collatéraux du manque d’énergie dans notre contrée, surtout en son chef-lieu. En tant qu’association de développement, nous voudrions juste vous présenter ces quelques facettes et vous interpeller en tant que "serviteur de l’Etat" (ministre) dans un gouvernement qui va au charbon et doté d’une grande vision prospective qui fera du Burkina Faso un pays émergent en Afrique de l’Ouest, à l’horizon 2015, de cligner l’œil et le bon à notre endroit.

Ainsi les filles et les fils du Koulpélogo vous seront très reconnaissants. Pour accompagner vos efforts, ils se tiennent prêts à consentir des sacrifices comme ils l’ont démontré à plusieurs occasions, l’essentiel étant l’option pour la Nationale d’Electricité. Le Directeur général de la SONABEL étant un homme d’action plein de vitalité, confiez-lui, Monsieur le Ministre, dans les plus brefs délais le dossier pour étude de faisabilité et vous serez émerveillé par les résultats.

En tout état de cause, nous sommes confortés par ces propos du Premier ministre dans son discours de politique générale : "Pour les besoins d’accroissement de l’accès des populations des zones rurales à l’électricité, des ressources financières de l’ordre de dix milliards de F CFA par an seront mobilisées. Mises à la disposition du Fonds de développement d’Electricité, ces ressources permettront d’électrifier 15 à 20 localités chaque année".

Nous voudrions faire partie de ces localités prioritaires.

Dans l’espoir d’une bienveillante attention sur ce dossier, recevez Monsieur le Ministre, l’expression de nos dignes sentiments.

Fait à Koupèla le 10 avril 07

LE Pays

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