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Côte d’Ivoire : Les incertitudes de la paix

Publié le mardi 17 avril 2007 à 08h20min

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Ses deux morceaux recollés, la Côte d’Ivoire redevient enfin une seule et unique entité. Le président ivoirien Laurent Gbagbo qui, on le sait, n’avait jamais cessé d’en faire une fixation, peut maintenant jubiler. C’est certainement en homme comblé qu’il a assisté, en compagnie du Premier ministre ivoirien, à la cérémonie consacrant officiellement la suppression de la Zone de confiance (ZDC).

Après avoir servi de territoire tampon entre le nord et le sud de la Côte d’Ivoire, la ZDC est donc appelée à disparaître progressivement depuis le 16 avril à midi. De sorte que Casques bleus onusiens et soldats français soient progressivement remplacés par des unités mixtes loyalistes-rebelles. Un acte de haute portée symbolique, s’il en est, qui marque, de fait, le retour de la cohésion nationale.

Cette réunification de même que l’unité annoncée de tous les soldats ivoiriens marquent sans doute une nouvelle ère pour la Côte d’Ivoire. Pour autant, sera-ce la fin effective de la crise, le retour définitif de la paix et les retrouvailles entre anciens frères ennemis ivoiriens ? On l’espère. Toujours est-il que ce sera déjà tant mieux si la fin de la partition marque, de façon nette, la libre circulation des Ivoiriens ainsi que de leurs biens, et l’accélération du redéploiement de l’Administration dans le Nord.

En attendant la tenue des élections. Plaise donc au ciel que soit définitivement révolue l’époque où, d’un camp comme de l’autre, l’on se regardait en chiens de faïence. Vivement que tous les Ivoiriens tournent, pour de bon, la page des années sombres et se pardonnent franchement, comme les y invitent d’ailleurs Laurent Gbagbo et Guillaume Soro.

Paris semble voir du même œil le démantèlement de la ZDC, considérant cela comme un événement "extrêmement important et positif". C’est tant mieux.

Seulement, comme on le fait observer ici et là, et à juste titre, le processus de démantèlement de la zone de confiance dépendra "de la capacité des Ivoiriens" à prendre le relais des forces internationales sur le terrain. Quoi que l’acte soit à saluer, la prudence doit donc être de mise. D’autant qu’il a donné l’impression d’une précipitation à aller à la paix, ce qui pourrait, par conséquent, avoir fait passer au second plan la nécessité d’une parfaite imprégnation des réalités du terrain par les nouvelles forces.

De fait, si l`accord de Ouagadougou préconise la suppression de la ZDC et le remplacement des éléments des forces étrangères par des militaires issus des troupes gouvernementales et des Forces nouvelles, toutes les conditions ont-elles été réunies pour garantir la réussite de la mission de ces militaires ivoiriens ?

L’état des lieux a-t-il été, au préalable, suffisamment fait ? Il n’est un secret pour personne que le chef de l’Etat entendait au plus vite se débarrasser des forces étrangères et surtout françaises. La fin de la partition, si elle semble avoir donné lieu à une course contre la montre, ne se révélera-t-elle pas, à terme, une ouverture sur l’inconnue ?

Mais, enfin, faisons confiance au vent de la concorde nationale qui souffle en ce moment sur le pays, soulignée par la loi d’amnistie qui vient d’absoudre tous les délits et autres atteintes à la sûreté de l’Etat entre le 19 septembre 2002 et le 12 avril 2007. Même si, là aussi, les choses semblent avoir été quelque peu précipitées. Que pensent les parents des victimes de cette loi d’amnistie ? Quelle véritable paix sans catharsis préalable ? Devait-on absoudre tous ces crimes sans justice et vérité d’abord ?

Certes, cette loi d’amnistie a l’avantage d’encourager tous les Ivoiriens en exil à rentrer au bercail pour participer aux efforts de paix et de reconstruction nationale. Reste que, même là, certains officiers ivoiriens forcés au départ y ont déjà émis des réserves.

Si c’est un appel au retour, sera-t-il entendu par le général de division Doué Mathias ou encore le colonel Yao Yao Jules, pour ne pas les citer ?

Quoi qu’on dise, par cette loi d’amnistie, les deux têtes de l’exécutif ivoirien semblent plutôt avoir été guidées par le souci de travailler en toute sérénité, et, à terme, de se mettre à l’abri de poursuites judiciaires.

Il faut tout de même espérer que la nouvelle page qui s’ouvre, en Côte d’Ivoire, consacre la fin des entorses aux lois de la République et de l’impunité. Et que le pays de Félix Houphouët Boigny prenne un nouveau départ. Et le bon, cette fois-ci.

Le Pays

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