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Mauritanie : Après le coup d’Etat, le coup démocratique

Publié le vendredi 23 mars 2007 à 07h30min

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Ely ould Mohamed Vall

Sauf tsunami au cours de ces dernières 48 heures, les Mauritaniens connaîtront leur nouveau président. Le second tour de l’élection présidentielle est prévu pour le dimanche 25 mars. Le premier tour, qui a eu lieu le 11 mars dernier, avait vu s’aligner 19 candidats pour la conquête du fauteuil présidentiel.

Le dépouillement des bulletins laisse en lice les deux candidats les mieux placés : Sidi Ould Cheik Abdallahi, 69 ans, et Ahmed Ould Daddah, 63 ans. Sidi Ould Cheik Abdallahi et Ahmed Ould Daddah se sont affrontés au cours d’un débat radio télévisé le 22 mars.

Ce débat entre deux prétendants à la magistrature suprême est une première en Afrique subsaharienne. D’ordinaire, les électeurs ne sont pas sollicités pour un second tour. La corruption, les intimidations, les fraudes, le bourrage d’urnes, etc., quand ce ne sont pas simplement des hold up électoraux en forme, ont vite pris le pas sur l’expression démocratique des citoyens.

De l’avis de l’ensemble des observateurs, le scrutin mauritanien s’est déroulé dans la transparence et l’équité. Le débat entre les deux candidats est la preuve que la Mauritanie est en passe de devenir un exemple dont doivent s’inspirer de nombreux pays de notre continent, où l’on rêve encore de présidence à vie.

L’élection présidentielle qui va connaître son épilogue le 25 mars, marque le couronnement de plusieurs scrutins organisés en 2006 et 2007. Ces consultations électorales sont destinées, à terme, à remettre le pouvoir aux civils, comme s’y était engagée la junte militaire au lendemain de son coup d’Etat réussi contre Maaouya Ould Taya, le 3 août 2005. Jusque-là, elle a fait un parcours sans faute. Sur le plan économique, la junte a remis en cause des contrats léonins signés par l’ancien régime avec des sociétés étrangères, notamment occidentales.

Fait important, et il faut le souligner, le coup d’Etat s’est fait sans qu’aucune seule goutte de sang ait été versée.

La junte retournera dans ses casernes après une transition de 19 mois, quand le président élu prêtera serment. Ce qui fait la particularité de la présidentielle mauritanienne, c’est qu’elle a lieu sans la participation d’un président sortant, comme il est de coutume ailleurs en Afrique. Et comme on le dit couramment, en Afrique on n’organise pas des élections pour les perdre.

En tout cas, les Mauritaniens viennent de faire sauter le verrou de l’antidémocratisme sous la conduite d’une junte militaire éclairée. Le colonel Ely Ould Mouhamed Vall vient de démentir une triste renommée qui collait à la peau des militaires africains : le parjure. Beaucoup de militaires ont fait leur coup d’Etat et promis de rendre le pouvoir après avoir mis de l’ordre.

Quand ils ont balayé la maison, ils s’y sont tout simplement couchés. Il convient de souligner également que lors de sa prise de pouvoir, la junte avait fait interdiction à ses membres et aux membres du gouvernement de transition qu’elle avait mis en place de se présenter à un mandat électif. Et elle a tenu parole. En effet, le jeu démocratique aurait été faussé si ceux venus pour mettre de l’ordre sous les tentes mauritaniennes se déclaraient candidats.

C’est pourquoi il est permis de dire qu’il y a des coups d’Etat libérateurs, n’en déplaise au syndicat des chefs d’Etat africains, qui a décicé ne plus admettre en son sein tout président qui ne tiendrait pas son pouvoir des urnes.

Les Mauritaniens de l’extérieur, dont des centaines de milliers furent contraints à l’exil par les successives dictatures militiaires, notamment celle de Ould Taya, n’ont pas pu voter. Mais ce fait n’enlève rien au mérite des Mauritaniens. Si en Mauritanie l’on peut expliquer l’absence du vote des Mauritaniens de l’extérieur par des insuffisances purement techniques, il n’en est pas de même dans d’autres pays africains.

La non-maîtrise, le contrôle quasi impossible, au plan politique surtout, des citoyens vivant à l’étranger expliquent leur non-participation aux scrutins organisés dans leur pays d’origine. Les partis politiques au pouvoir auraient peur des votes d’un électorat qu’il ne maîtrisent pas totalement.

Dans quelques jours donc, les Mauritaniens seront gouvernés par des hommes politiques qu’ils auront eux-mêmes élus. Une tradition démocratique s’installe donc en Mauritanie. Les bénéficiaires du coup d’Etat du 3 août 2005 sauront-ils se montrer à la hauteur ? Ne vont-ils pas se livrer à un jeu de pilitique politicienne et ignorer les aspirations de leurs concitoyens ?

Au nombre des dossiers urgents que le nouveau président trouvera sur sa table, il y a la question des Mauritaniens chassés de leur pays en 1989 sous le régime de Maaouya Ould Taya. La question des relations diplomatiques entre la Mauritanie et l’Etat hébreu soulève des passions chez les islamistes, de plus en plus nombreux. Des questions qui commadent que le futur président mauritanien soit un homme ouvert au dialogue, un homme qui prône la réconciliation nationale.

La réconciliation, c’est ce dont les Mauritaniens ont le plus besoin. Il faut éviter de créer le désordre par des décisions impopulaires qui inciteraient Ould Mohamed Vall à revenir sur la scène politique, comme l’avait fait un certain capitaine ghanéen dans les années 80.

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