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Législatives 2007 : Quels députés pour la future législature ?

Publié le mercredi 21 mars 2007 à 08h22min

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Une vue de l’A.N

L’année 2007 sera marquée sur le plan politique au Burkina par le renouvellement du parlement. Le pouvoir conféré par le peuple aux députés est arrivé à terme et la démocratie exige que ceux qui le veulent sollicitent son suffrage. Ce doit être chose faite le 6 mai prochain par les 4e consultations pour les législatives sous la IVe République.

Les résultats sont grandement attendus d’autant que d’eux résultera la recomposition du Parlement et subséquemment de la direction politique du pays.

« La démocratie est belle » clame-t-on partout et ce n’est pas ceux qui l’ont perdue qui vous diront le contraire quand l’adage vous dit qu’on ne connaît l’utilité des fesses que quand vient le moment de s’asseoir. Oui, cette forme de gouvernance des hommes est jusque-là la meilleure de toutes celles qui ont été éprouvées mais elle reste une quête permanente, sinon un idéal à atteindre car son achèvement, n’est certainement pas de ce monde au vu de ses exigences souvent contradictoires du fait que les intérêts humains individuellement pris puis collectivement ne sont pas toujours en harmonie s’ils ne sont pas en antagonisme. N’est-ce pas d’ailleurs pour cela que la démocratie est belle car elle est fondée sur un modus vivendi qui permet l’expression de chacune des composantes de la société ?

En tout cas en théorie, en la matière, les choses sont reluisantes mais la réalité ambiante n’est pas toujours pour rassurer car même les nations qui se vantent d’être les chantres de la démocratie ne sont pas à l’abri de certains soubresauts. Pour un pays, comme le Burkina dont le processus n’a que seize ans d’existence après de longues années de régimes d’exception, arriver à respecter les échéances inscrites dans la constitution s’apparente à un acte de bravoure.

Dans quelques semaines, les électeurs seront appelés aux urnes pour renouveler le Parlement. Les députés sont des acteurs incontournables de la vie démocratique auxquels la constitution assigne les missions de voter les lois et de contrôler l’action du gouvernement. De la majorité parlementaire dépend la configuration de l’exécutif et par ricochet l’orientation politique du pays le temps que cette majorité gardera son statut.

Le microcosme politique national est fort de plus de cent partis. Cette pléthore laisse perplexe sur la vitalité et même la viabilité de tous ces partis au vu de l’animation de la scène politique. En témoignent certains congrès ou autres retrouvailles partisanes où les participants n’excèdent souvent pas le nombre des membres du bureau national tel que consigné dans les documents publiés. C’est dire qu’on a un foisonnement de partis politiques qui ne permet pas toujours une lisibilité des tendances et autres idéologies politiques.

Chose qui déroute immanquablement l’observateur et cultive des sentiments chez la population qui sont aux antipodes de ceux recherchés par la démocratie. Il n’est pas rare de voir des partis qui ne se positionnent que dans une seule région si ce n’est une seule province ou même une seule ville. Les responsables de nombre de partis en font leur chose personnelle et naviguent au gré de leurs intérêts égoïstes.

Exit la morale politique ; ils passent de l’opposition à la mouvance présidentielle sans aucune cohérence dans la démarche. Cette attitude de franc-tireur a engendré ce qu’on a appelé le nomadisme politique, cette pirouette qui permet de passer d’un parti à un autre sans avoir de comptes à rendre à qui que ce soit. Ce qui a suscité d’ailleurs un débat sur la perte du mandat pour un député qui a choisi de quitter son parti en pleine législature, débat qui n’a jamais été tranché.

Ce flou semble arranger tout le monde et la disposition législative qui veut que l’élu le soit au nom de la nation ne sera pas modifiée de sitôt. Il se dégage néanmoins quelques places fortes qui autorisent une lecture du paysage politique même si celle-ci peut être circonstancielle d’autant que les « clivages » ne sont pas étanches et que les humeurs ou ambitions du chef de parti décident en dernier ressort.

Le Congrès pour la Démocratie et le Progrès (CDP)

Le parti majoritaire sortant est sans doute le plus grand regroupement de la politique burkinabè. Cette formation à laquelle appartient le Président du Faso possède tous les atouts pour conserver son rang de premier ; elle est bien structurée et dispose d’hommes de carrure qui ont marqué la vie politique du pays depuis les années de braises de la Révolution d’Août et elle a su se rallier nombre d’intellectuels et de leaders d’opinion. D’ailleurs être candidat du CDP paraît plus difficile que se faire élire député.

L’établissement des listes électorales a toujours fait des gorges chaudes dans les rangs du méga parti. D’où d’ailleurs l’instauration de préliminaires au sein du parti afin de permettre à la base de faire la décantation et faciliter l’établissement de ces listes.
Le CDP est un mastodonte et il faut un tremblement de terre pour le bouger de son piédestal. Il est parti pour rester majoritaire dans le futur Parlement.

La Mouvance présidentielle

Ce regroupement de partis soutient l’action du Président du Faso tout en gardant son autonomie vis-à-vis du CDP. Cette position stratégique pourrait lui permettre d’engranger des voix. Elle est généralement la destination des soi-disant déçus du CDP. On l’aura remarqué, avec les municipales dernières, ce regroupement par certaines de ses composantes a fait bonne figure. Il a engrangé nombre de places de conseillers et certaines communes sont même tombées dans son escarcelle d’autant que dirigées par des maires de son obédience.

Cependant, pour le scrutin du 6 mai, à défaut de rester unis comme il a été le cas à l’élection présidentielle sous la bannière de l’Alliance de la mouvance présidentielle (AMP), les partis de ce pool selon des affinités ont opté de procéder à quelques regroupements d’où sont issues de listes communes pour aller à la conquête des sièges de députés. Le challenge est grand pour les partis de cette mouvance car s’ils sortent les mains vides des prochaines consultations, bon nombre d’entre eux risquent de disparaître parce que l’opinion publique se manifeste clairement contre cet émiettement, même si en politique, il est souvent plus rentable d’être la tête d’un rat que la queue d’un éléphant.

L’ADF-RDA

L’action de cette formation politique est un cas d’école. Le parti de l’éléphant alors chef de file de l’opposition a choisi de soutenir le Président Blaise COMPAORE lors de l’élection présidentielle de novembre 2005. Il est entré au gouvernement après la victoire du candidat du CDP. Naturellement, beaucoup pensaient que maître Gilbert OUEDRAOGO et ses hommes devenaient membres de la mouvance présidentielle. Que nenni ! L’ADF-RDA revendiquera urbi et orbi son statut de parti d’opposition tout en participant au gouvernement. L’explication est que le parti soutient uniquement le programme du Président du Faso mais ne s’aligne pas derrière son parti.

Le défi qui se présente à lui pour ces élections législatives est de prouver que son choix de ne pas présenter un candidat aux présidentielles de 2005 n’a pas provoqué une fracture profonde au sein de son électorat. Un bon score est impératif pour garder le statut de premier parti de « l’opposition » parce qu’il n’est pas sûr que le CDP accepte encore de partager son pouvoir s’il a suffisamment de force pour gouverner. L’heure de vérité a sonné pour le plus vieux parti du pays.

L’opposition dite radicale

Appelons ainsi ceux qui vont sabler le champagne si Blaise COMPAORE devait manquer demain de majorité pour gouverner.
Sa grande faiblesse est sa division. Le dénominateur commun reste le combat contre le président du Faso, mais les moyens pour parvenir ne font pas toujours l’unanimité.
Le plus grand bloc de cette famille est sans doute les formations d’obédience sankariste. C’est aussi en son sein que l’on constate le plus de déchirements.

Il est inutile de citer les noms des tentatives de regroupement de ces partis. Se sentant plus sankaristes les uns que les autres, les « héritiers » de Thomas SANKARA ne sont jamais arrivés à se mettre d’accord de façon durable sur une plate-forme politique. Il n’est pas étonnant que leur représentation au Parlement se limite à quelques députés. Si les choses ne changent pas, la mouvance sankariste n’aura que ses yeux pour pleurer au soir du scrutin législatif.

Le PDP/PS du professeur Ali LANKOANDE qui va devoir vivre désormais sans son géniteur, le professeur KI-ZERBO, décédé en décembre 2006, le PAREN dont le mentor Laurent BADO a quitté sa présidence, le MPS/PS de Emile PARE, le GDP de Issa TIENDREBEOGO, etc. ont leur avenir en pointillé.

L’Union Nationale pour la Démocratie et le Développement (UNDD) se présente comme un singleton de la démocratie burkinabè. Les incohérences de son chef Me Hermann YAMEOGO ont provoqué des dégâts au sein du parti. Le départ de son frère cadet Salvador YAMEOGO et du député Fidèle HIEN en sont illustratifs.

Ils ne sont pas nombreux ceux qui veulent coller leur image à celle du fils aîné du président Maurice YAMEOGO. Il doit prouver impérativement qu’il est une force politique qui compte s’il ne veut pas sombrer définitivement dans les bas-fonds de la vie publique nationale.

Par Ahmed NAZE

L’Opinion

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