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Charte africaine de la démocratie : Encore une coquille vide ?

Publié le jeudi 1er février 2007 à 08h04min

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Décidément, les chefs d’Etat africains ont des idées et non des moindres. Ils ont adopté, à l’occasion du récent sommet de l’Union africaine, une charte de la démocratie en Afrique. L’idée est bonne et devrait, si elle est bien conduite, délivrer le continent des démons de la division et de la malgouvernance.

En tout cas, le berceau de l’humanité a besoin d’un viatique qui permette de le propulser sur les chemins du développement durable. Mais cet espoir s’effrite lorsqu’on jette un coup d’œil dans le rétroviseur de l’histoire. En effet, ce n’est pas la première fois qu’un projet aussi noble est adopté par les chefs d’Etat. Tout laisse croire que l’Afrique peut trouver les moyens de son décollage politique, économique et social.

Mais la volonté politique fait véritablement défaut. Le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD), l’une des grandes ambitions continentales, fortement applaudi à son adoption, est aujourd’hui en berne. Pourtant, s’il y avait de la volonté politique pour sa mise en œuvre, l’Afrique aurait fait un pas de géant vers son devenir. Une perspective qui aurait, de plus en plus, balisé les chemins du bien-être pour les habitants de ce continent.

La charte africaine de la démocratie semble avoir déjà été happée par le spectre des projets sans suite. D’ailleurs, cette charte, bien qu’ayant été adoptée par l’Union africaine, ne fait pas l’unanimité. Certains pays tels que l’Egypte ont préféré prendre leurs distances. Il ne faut pas se faire d’illusion. Si les chefs d’Etat n’arrivent pas, à l’intérieur de leur propre pays, à fédérer de façon adéquate, les énergies, comment peuvent-ils le faire à l’échelle continentale ? Tout cela ressemble à un jeu de dupes. Car ceux qui édictent les lois qui doivent régir la marche du continent sont généralement ceux qui sont aptes à les violer.

Les chefs d’Etat ont déjà fait des promesses courageuses, allant même jusqu’à vouloir exclure de l’Union africaine ceux d’entre eux qui mèneraient des actes préjudiciables au développement du continent. Cela avait été applaudi mais ce n’était que de la poudre aux yeux. Si l’Union africaine respectait ses propres engagements, de nombreux dirigeants seraient exclus de cette institution. En effet, si certains d’entre eux ne sont pas arrivés au pouvoir par coup d’Etat, ils ont tripatouillé la Constitution pour se maintenir au pouvoir.

Par ailleurs, l’Union africaine risque de vivoter encore pendant longtemps. De nombreux pays ne paient pas leurs cotisations, la mettant ainsi assez souvent dans un état d’impuissance. Autant dire que la charte africaine de la démocratie, actuellement en gestation, risque de mourir de sa belle mort. Le président de la commission, Alpha Oumar Konaré, pourtant panafricaniste bon teint, a décidé de ne plus être candidat à ce poste. Il a été certainement victime du poids trop encombrant des chefs d’Etat et de gouvernement et de leurs inconséquences. On se souvient encore du clash qui l’a opposé à Olusegun Obasandjo suite au coup d’Etat constitutionnel perpétré par Faure Yassingbé après la mort de son père.

L’Union a-t-elle vraiment les moyens de pression nécessaires pour contraindre les chefs d’Etat à respecter ce que eux-mêmes ont écrit noir sur blanc ? Si la Cour africaine des droits de l’homme fonctionnait véritablement, accepteraient-ils de se soumettre aux exigences de cette institution ? Ce n’est pas évident. En Guinée Conakry par exemple, Lansana Conté, avant d’être contraint par la rue à se discipliner quelque peu, avait déclaré que "la justice, c’est moi".

Si sur ce point, Conté est différent des autres par ses méthodes abruptes, il rejoint certains de ses pairs sur au moins un point : ils sont incapables de s’imaginer hors du pouvoir. Et, avec tout ça, ils ont osé signer la charte africaine de la démocratie ! On peut affirmer, sans risque de se tromper, qu’il s’agit encore d’un projet pompeux. D’autant que la plupart des dirigeants africains semblent ne pas avoir conscience que le destin de leur Etat est lié à celui des autres.

L’Afrique est émiettée en... 53 afriques, alors que seuls les grands ensembles ont autorité sur le plan international. Dire que notre continent regorge d’énormes richesses et d’énormes intelligences ! Assurément, l’Afrique a raté une chance historique en "tuant" les grands ensembles tels que l’AOF et l’AEF. Certains des premiers leaders africains avaient vu juste. Mais ils étaient en avance sur leur temps.

Le Pays"

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