LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Vous n’empêcherez pas les oiseaux de malheur de survoler votre têtе, mаis vοus рοuvеz lеs еmрêсhеz dе niсhеr dаns vοs сhеvеux.” Proverbe chinois

Valses dans l’armée : Le Groupe du 14 février circonspect

Publié le lundi 22 janvier 2007 à 08h11min

PARTAGER :                          

S’appuyant sur les incidents survenus en décembre entre militants et policiers, le Groupe du 14 février fait une analyse de la situation politique nationale et se dit convaincu que "le régime de Blaise Compaoré est au bout du rouleau". Il estime par ailleurs que les sanctions contre les officiers ne résoudra pas les problèmes au sein de l’armée.

"Les 20 et 21 décembre 2006, la population de Ouagadougou a assisté, surprise et angoissée, aux détonations nourries d’armes de guerre sorties de part et d’autre, à la suite d’un affrontement opposant des militaires et des policiers. Peu après, elle apprenait que le différend avait débuté par une altercation entre policiers et soldats le 16 décembre au stade municipal de Ouagadougou, et s’était prolongé par un affrontement dans la nuit du 19 entre une patrouille de CRS et un groupe de militaires, se soldant par la mort d’un soldat. Les camarades de ce dernier auraient attaqué des installations policières les 20 et 21 décembre, saccageant et brûlant des locaux et du matériel de la police et des CRS.

Les 30 et 31 décembre, solidaires de leurs camarades de Ouagadougou, les militaires des garnisons de Kaya et de Bobo Dioulasso auraient aussi envahi les rues de leurs villes et tiré en l’air. Ces manifestations de militaires ont été accompagnées de revendications portant sur leurs conditions de vie et de travail ainsi que sur l’organisation de l’armée. Les 4 et 5 janvier 2007, c’était au tour des gardes de sécurité pénitentiaires de Ouagadougou, de Koudougou et de Dédougou de manifester leur mécontentement quant à leurs conditions de vie et de travail.

Ces événements ont fait, officiellement, 6 morts à Ouagadougou (3 militaires et 3 policiers) et de nombreux blessés, dont certains dans un état grave. A ce jour, le nombre de blessés, militaires, policiers ou civils, et leur identité restent inconnus du public. Les dégâts matériels sont énormes : la quasi¬-totalité des commissariats de la capitale, la direction générale de la Police les moyens de transport des CRS et de la police, ont été endommagés à des degrés divers. En outre, plus de six cents prisonniers, évadés dans la nuit du 20 décembre de la Maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou (MACO), sont dans la nature, rendant encore plus préoccupante la sécurité des citoyens.

Le Groupe du 14 février (G 14) présente ses sincères condoléances aux familles des victimes. Il déplore ces événements qui ont occasionné des morts et des blessés, des dégâts matériels et des destructions de biens publics et privés. Au-delà des faits, il convient de se demander comment on en est arrivé là. Il faut en rechercher les causes réelles pour éviter que l’arbre cache la forêt.

Ces graves incidents, impliquant les forces de sécurité du pays en plusieurs

points du territoire, ne sont, en fait, que révélateurs de la dégradation de la situation qui prévaut malheureusement, tant au plan national qu’au sein de nos casernes, et qui est ressentie de plus en plus comme inacceptable par ceux qui la subissent.

En fait, cette situation est elle-même le résultat de la crise structurelle nationale jamais résolue, qui perdure depuis de longues années au Burkina Faso, dans l’indifférence ou l’inconscience des dirigeants. La mal gouvernance du régime de Blaise Compaoré et l’impunité, qu’il a systématiquement favorisée depuis le 15 octobre 1987, sont à l’origine de cette crise, qu’elles alimentent régulièrement.

"Une valse des chefs de corps"

Au lieu d’accepter clairement ses responsabilités dans les événements de la fin de 2006 et de prendre les mesures pour répondre aux questions soulevées par les soldats en colère, Blaise Compaoré veut en faire porter la responsabilité aux chefs militaires. Il procède depuis a une valse des chefs de corps des différentes garnisons, mais laisse à ses ministres le soin de faire des promesses sur les mesures concrètes réclamées par les soldats !

Les puissantes manifestations populaires qui ont suivi l’odieux assassinat, le 13 décembre 1998, de Norbert Zongo, journaliste d’investigation, directeur fondateur du journal "L’Indépendant", et de ses trois compagnons, ont souligné la profondeur de la crise et de la défiance du peuple à l’égard du régime de Blaise Compaoré. Le Collège de sages, mis en place à cette occasion pour diagnostiquer le mal et proposer des solutions, notait très justement dans son rapport terminal :

"La crise actuelle que notre pays traverse depuis quelques mois est réelle et profonde. Elle n’est pas conjoncturelle, elle est structurelle. Elle s’étend à tous les secteurs de la vie nationale et touche toutes les couches de la population. Elle se manifeste dans les domaines social et culturel, politique et administratif, économique et, enfin, au niveau éthique. Les tragiques événement récents, notamment le drame intervenu le 13 décembre 1998 à Sapouy, n’en ont été que le détonateur."

Plus précisément, le rapport soumis a la fin de sa mission d’investigation et de réflexion par le Collège de sages demandait notamment de :

* réduire les inégalités sociales pour plus de justice sociale par une répartition plus équitable des ressources nationales et des revenus ;

* accorder une attention particulière aux problèmes d’éducation, de santé, de formation et d’emploi chez les jeunes. Le système éducatif lui-même devrait être repensé, en adéquation avec une réelle politique de l’emploi ;

* procéder à une relecture concertée et responsable des textes non consensuels avec toutes les parties concernées et portant sur les libertés de réunions, de manifestations sur la voie publique, sur les franchises scolaires et universitaires et sur le droit de grève ;

* réactiver les dossiers en souffrance tant au niveau de l’Inspection générale d’Etat, de l’Inspection générale du ministère de l’Economie et des Finances qu’au niveau de la Justice ;

* mettre en oeuvre la neutralité politique de l’Administration, de l’armée et de la Justice ;

* organiser la protection républicaine du chef de l’Etat par la Gendarmerie et la Police.

Malheureusement pour notre pays et son peuple, Blaise Compaoré et son régime ont refusé de considérer avec l’attention nécessaire les recommandations et les solutions préconisées par le Collège de sages, relatives aux principales causes de cette crise. Leurs préoccupations n’étaient pas de trouver des solutions correctes et durables aux problèmes majeurs du pays, mais seulement de gagner du temps et de sauver le régime fortement discrédité par l’assassinat de Norbert Zongo.

Blaise Compaoré et son régime peuvent-ils dire au peuple les suites données aux recommandations et aux solutions préconisées par le Collège de sages pour sortir de la crise ? Pire, ils sont revenus en force sur les quelques réformes politiques démocratiques qu’ils avaient concédées : il en est ainsi du code électoral de 2001 et de l’amendement constitutionnel limitant à deux le nombre de mandats présidentiels. Ils ont révisé le code électoral, afin de réduire le nombre de partis pouvant être représentés à l’Assemblée nationale, et Blaise Compaoré entame un troisième mandat depuis novembre 2005, malgré la limitation constitutionnelle.

"Le mercenaires de la plume"

Une fois le calme revenu, les dignitaires du régime de la IVe république qui rasaient les murs, muets, angoissés et prêts à passer les frontières à la moindre alerte, ont retrouvé leurs démons habituels. Ils ont relevé la tête et le ton, déclarant avec morgue que "la crise est derrière nous". Une fois réinstallés grâce à des élections gagnées par les fraudes habituelles, ils se sont répandus à nouveau en fanfaronnades, déclarant à tous vents et sans vergogne que "le Burkina avance" malgré la misère ambiante, que "le Burkina brille" alors que la pauvreté gagne du terrain, que "le Burkina a un taux de croissance soutenu" malgré la pauvreté, qu’"en 2015 le Burkina sera un pays émergent" alors que nous sommes classés parmi les derniers pays, ou que "le Burkina bénéficie de la paix et de la stabilité que tous les pays africains lui envient" tandis que les injustices et l’arbitraire continuent d’être les caractéristiques de la situation, etc.

Aidés en cela par les mercenaires de la plume et de l’image, burkinabè mais surtout étrangers, payés à prix d’or, ils cherchent à convaincre les Burkinabè et le monde entier que Blaise Compaoré est un "grand président incontournable", "une chance pour le Burkina au milieu d’une Afrique et d’une sous région déchirées par des guerres civiles". Lors les réunions internationales, ils cherchent systématiquement à attirer vers le Burkina les conférences, les colloques, les ateliers et autres rencontres internationales, qui sont autant d’occasions de magouilles et de perdiems illicites pour leurs organisateurs.

Après vingt ans de pouvoir, dont quatre ans de régime d’exception sous le "Front populaire" (1987-91), puis sous la IVe république, un septennat de "Large rassemblement" (1991-1998), un deuxième septennat de "Développement solidaire" (1998-2005) et, depuis 2005, un quinquennat de "Progrès continu pour une société d’espérance), la réalité du Burkina est aux antipodes des déclarations obstinément optimistes des dignitaires du régime, et encore plus des proclamations des campagnes présidentielles. La réalité du Burkina sous le règne de Blaise Compaoré, c’est plutôt :

- un pays toujours classé parmi les trois lanternes rouges, selon les critères du développement humain durable du PNUD ;

- une misère qui menace constamment la majorité de la population ;

- une pauvreté qui frappe de plus en plus de travailleurs qui arrivent difficilement à joindre les deux bouts ;

- une école à la dérive, sans orientation garantissant un avenir à la nouvelle génération, des étudiants, futurs cadres de la nation, sous-formés et clochardisés par la quasi-suppression des bourses d’études.

"Quitter le pouvoir par la petite porte"

A côté de cette misère, une infime partie de la population, riche et de plus en plus riche, roule dans des voitures du futur, vit dans des palais du futur à Ouaga 2000, gaspille des millions aux origines douteuses dans des lieux de luxure ou les cache dans des banques étrangères ou des paradis fiscaux. Les frasques de leur progéniture défraient régulièrement la chronique. Ces riches parvenus ont la conscience obscurcie par le vertige du gain facile. Ils ne sont plus capables de cerner la réalité du Burkina. Pour eux, seuls les "aigris" et des "politiciens en perte de popularité" ne voient pas le Burkina briller grâce aux talents surnaturels de Blaise Compaoré ! Devenus aveugles, ils ne voient pas que dans le Burkina d’aujourd’hui "eux seuls mangent et les autres regardent" !

Aujourd’hui plus qu’hier, le G 14 est convaincu que le régime de Blaise Compaoré est au bout du rouleau et ne peut plus résoudre aucun problème sérieux des Burkinabè. Il a atteint son degré d’incompétence : chaque jour avec Blaise comme président est un jour de recul pour le peuple burkinabè ! Ce n’est pas en sanctionnant les officiers qu’il résoudra les problèmes structurels de l’armée et, d’une manière générale, des forces de défense et de sécurité. Celles-ci souffrent des mêmes maux que la population dans sa globalité, car elles en sont issues, en sont le reflet et pâtissent des mêmes fautes de gouvernance.

C’est pourquoi le G14, qui exige que de justes solutions soient apportées aux problèmes majeurs du pays et du peuple, demande à Blaise Compaoré de tirer avec toute la lucidité nécessaire les conséquences de la crise globale persistante. Malheureusement, en Afrique, les exemples sont trop nombreux, de chefs d’Etats aveugles, accrochés à leur pouvoir et indifférents aux besoins et aux demandes du peuple, qui finissent immanquablement par quitter le pouvoir par la petite porte et pour la poubelle de l’histoire, causant par leur aveuglement et leur obstination des gâchis énormes pour leurs peuples.

Aux côtés du peuple burkinabè, le Groupe du 14 février luttera toujours pour que ces malheurs ne soient pas ceux du Burkina Faso."

Ouagadougou, le 18 janvier 2007

Ont signé :
- UNIR/MS :Me Bénéwendé SANKARA
- FFS : BN BASSIERE
- GDP : Issa TIENDREBEOGO
- PDS : Sambo Youssouf BA
- PFID : Kader NACRO
- LCB : Souleymane YAMYAOSO
- PAI : Philippe OUEDRAOGO
- PDP/PS : OF OUEDRAOGO

PARTAGER :                              

Vos commentaires

  • Le 22 janvier 2007 à 21:30 En réponse à : > Valses dans l’armée : Le Groupe du 14 février circonspect

    Voici encore une bande d’incapables des citoyens se réclamant de l’opposition qui osent venir soutenir que chaque jour passé avec le Président COMPAORE est un gâchis alors qu’ils en appelle au même Président pour sa lucidité...
    Vous ignorez tout de la gestion du pouvoir d’Etat. Vos critiques acerbes prouvent que vous serez incapables de faire mieux que le Président actuel. Ange TAMPSOBA, France.

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique