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Ministère de la Défense : L’arme n’est pas un outil de dialogue...mais elle donne des résultats

Publié le jeudi 18 janvier 2007 à 08h21min

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Yéro Boly ’micro) et le Gal Ali Traoré

Le personnel militaire et civil du ministère de la Défense a présenté, hier mercredi 17 janvier 2007, ses vœux de nouvel an à son premier responsable. C’était au cours d’une cérémonie très sobre et "wassa wassa" pour emprunter un jargon du milieu, tenue au mess des officiers.

Comme il fallait s’y attendre, les affrontements meurtriers entre soldats et policiers de décembre dernier, suivis des frondes dans les casernes de Ouagadougou, Kaya et Bobo- Dioulasso ont constitué l’essentiel des deux discours prononcés par le ministre et son secrétaire général.

Yéro Boly, qui a condamné l’usage des armes fait par de jeunes soldats pour réclamer de meilleures conditions de vie, a annoncé officiellement les mesures urgentes déjà prises pour satisfaire leurs doléances.

Sur la voie qui mène au lieu de la cérémonie, des gendarmes en poste, armés de pistolets. De l’intérieur du mess des officiers, retentit de la fanfare militaire. Derrière les tables des officiels, le ministre Yéro Boly et son secrétaire général, Mamadou Barry, tous debout à côté des différents chefs d’état-major de l’armée.

De part et d’autre, quelques membres du personnel civil, noyés dans les rangs que semblent former d’autres officiers. La vue est splendide, l’ambiance fort martiale et la ponctualité, de rigueur. C’est la saison des présentations de vœux et le ministère de la Défense tient à sacrifier à la tradition, elle qui a déjà reporté une première fois sa cérémonie, naguère prévue le vendredi 5 janvier dernier, c’est-à-dire le même jour que celle du département en charge de la sécurité. Relation de cause à effet ? Les avis restent partagés.

Frustration générale au sein de la troupe

A 17h, comme prévu, le maître de cérémonie, le lieutenant-colonel Moussa Cissé, annonce de façon laconique, tradition militaire oblige, le début de la séance . Premier à prendre la parole au nom de l’ensemble du personnel, le secrétaire général du ministère rappelle au début de son allocution les circonstances particulières dans lesquelles se déroule la présente cérémonie.

« Au-delà des symboles qui la sous-tendent, notamment la fraternité d’armes, l’amitié, la solidarité et la communion d’esprit, la présente occasion solennelle d’échanges de vœux revêt à mes yeux une signification toute particulière. En effet, elle permet, dans un contexte où les FAN[ Forces armées nationales] viennent d’être durement éprouvées, de jeter un regard rétrospectif sur nos actions menées...et de présenter nos préoccupations ».

Dans son adresse au ministre, il a présenté le bilan des missions accomplies au cours de l’année écoulée, dont l’essentiel se rapporte aux missions traditionnelles des forces armées : le renforcement des capacités opérationnelles des troupes, la participation à la lutte contre l’insécurité, la contribution au développement socio-économique national et le concours au maintien de la paix dans le monde.

Résultat d’ensemble jugé satisfaisant, mais « teinté de beaucoup d’amertume » du fait de la série d’incidents survenue en fin décembre 2006 dont « le diagnostic aura permis de déceler un sentiment de frustration générale au sein de la troupe et l’expression d’un relâchement à différents niveaux de la chaîne de commandement, le tout caractérisé par une perte progressive des valeurs cardinales d’ordre et de discipline qui sont le socle de toute armée », a indiqué le S.G.

Des conditions de vie des soldats, source des grognes successives intervenues à Ouagadougou, Bobo-Dioulasso et Kaya, il en fera une description en trois points : l’insuffisance de l’offre de santé au profit des militaires, des insuffisances au niveau des infrastructures dont le logement et les casernes et, enfin, la dotation parcimonieuse en matériel d’habillement, avant de noter : « De façon générale, les conditions de vie de la troupe appellent une amélioration ».

Dans sa réponse aux vœux et à la reconnaissance exprimée par le personnel pour les mesures déjà prises pour la résolution des difficultés sus-citées, le ministre Yéro Boly reviendra très longuement sur ce qu’il a appelé « incidents malheureux du mois de décembre 2006 », pour en tirer les conséquences et faire part de sa vision d’une armée républicaine.

Chacun a eu pour son grade

« La réaction des jeunes soldats a jeté le trouble dans les esprits et créé une méfiance des populations vis-à-vis de l’armée, car certains de ses éléments ont même rompu avec les règles du statut militaire à cette occasion », a-t-il déploré, après avoir relevé plus haut, une autre conséquence de ces événements qui est le ternissement de l’auréole de stabilité dont s’était paré depuis, le Burkina Faso.

En accord avec son secrétaire général, Yéro Boly reconnaîtra, dans son diagnostic de la situation, l’existence de problèmes structurels et de gouvernance dans l’institution militaire. Et pour la thérapeutique nécessaire, il a annoncé « la poursuite du dossier pour situer les responsabilités du commandement d’une part et permettre aux autorités judiciaires compétentes de dire le droit d’autre part ».

L’autre point saillant de son discours a été l’annonce des mesures déjà prises pour répondre aux préoccupations de ses hommes. Ce sont, a-t-il cité, l’adhésion à la mutuelle qui sera désormais sous le régime du volontariat, l’octroi du prêt franc à tous les soldats non logés en caserne et la dotation en parka (manteau court à capuche, en tissu imperméable).

A toute cette panoplie de décisions, viendront s’ajouter, à partir du 1er janvier 2007, d’autres avantages comme l’augmentation de la prime globale d’alimentation avec un meilleur suivi de la gestion de l’ordinaire, la hausse des indemnités de logement et des charges militaires pour certaines catégories, l’accroissement du taux d’avance de solde pour toutes les catégories et la construction d’infrastructures et de nouvelles casernes dans les différentes régions militaires.

Sitôt les nouvelles mesures annoncées, le ministre Boly a martelé de son air habituellement impassible : « Rien ne justifie de prendre les armes pour résoudre un problème. L’arme ne peut être un outil de dialogue et sans un minimum de confiance réciproque, aucune solution durable ne peut être envisagée. »

S’adressant tout particulièrement à la hiérarchie militaire, il a rappelé : « La punition redresse la conduite et sanctionne l’oubli du devoir. On ne peut tolérer plus longtemps encore les actes d’insubordination ou fuir ses responsabilité : il faut commander ».

Alain Saint Robespierre

Observateur Paalga

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