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Casamance : Le prêtre « rebelle » s’en est allé

Publié le mardi 16 janvier 2007 à 08h38min

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De 1982 à 2007, l’Abbé Augustin Diamacoune Senghor s’est battu pour sa « Casamance » : la lutte puis le dialogue. Après sa mort survenue le dimanche dernier, bon nombre d’observateurs s’interrogent sur l’avenir « du pays des rivières ».

L’abbé Augustin Diamacoune Senghor, le leader charismatique de la Casamance, est décédé. Le patron du Mouvement des forces démocratiques de la Casamance s’est éteint, le dimanche 14 janvier 2007, à l’hôpital Val-de-Grâce à Paris. Il allait avoir 79 ans le 4 avril prochain.

L’abbé Augustin Diamacoune est connu au Sénégal comme celui qui s’est battu depuis le 26 décembre 1982 pour la cause casamansaise. Selon Sud FM Ziguinchor, l’homme se confondrait avec la Casamance. « La Casamance est après Dieu, ma raison d’exister » disait Diamacoune. Toujours habillé d’une soutane, le crâne parsemé de cheveux blancs, le visage ridé et le cou « chaussé » des plastiques, il ne laissait personne indifférent. Selon le journal, sa foi, sa passion et son amour inébranlable, en un mot, son « patriotisme » pour la Casamance l’ont poussé à baptiser cette terre « pays des rivières ». Son combat lui a valu plusieurs arrestations.

Il a été d’abord arrêté le 23 décembre 1982 à la cathédrale Saint Antoine de Padoue à Ziguinchor puis jugé le 5 décembre 1983. Il écopera de cinq ans de prison qu’il purge à Thiès. Libéré le 23 décembre 1987, il retrouve ses anciennes fonctions d’archiviste de l’évêché.

Mais « l’homme du 4 avril » faisait la part des choses entre l’Eglise et son combat. Ce n’est pas la visite du Pape Jean-Paul II à Ziguinchor qui va l’en dissuader.
Il a écrit deux lettres à Senghor, une à Abdou Diouf, dix à l’ambassade de France à Dakar, une à la Présidence française et une, au secrétaire général de l’ONU. Dans ces correspondances, l’Abbé demandait la levée de la tutelle sénégalaise sur la Casamance.

Pour certains observateurs, la crise en Casamance, dont on ne peut évoquer sans citer l’Abbé Diamacoune se nourrit d’un cocktail de frustrations : manque de routes, chômage des jeunes...Assigné à résidence surveillée. L’Abbé Diamacoune Senghor annonce des signes de paix en 1993 en demandant clairement aux MFDC de ranger les armes. Après cet accord de cessez-le-feu, il signera deux autres en 2001 et 2003 avant la signature des accords généraux de paix, le 30 décembre 2004, en présence du chef de l’Etat, Abdoulaye Wade. Son œuvre pour la paix se poursuivra jusqu’aux négociations de février 2005.

Mais si la plupart de ses discours avaient une forte connotation de paix, il reste que certains membres du MFDC comprenaient mal sa volonté de paix avec ses positions indépendantistes. Salif Sadio et bien d’autres dissidents refusent les injonctions à l’option de paix et préfèrent l’option militaire. Aujourd’hui avec la disparition de Diamacoune, on se demande quel est l’avenir de la Casamance ?

Selon « Walfadjiri », toute la difficulté réside dans ce challenge. Car, même si certaines de ses décisions étaient contestées, l’Abbé Diamacoune restait la seule constante, le seul homme consensuel au sein du MFDC. « Même les présumés radicaux du mouvement, à l’image de Mamadou NKrumah Sané ou Salif Sadio se reconnaissent de lui », précise Walfadjiri. Pour ce journal, tout laisse croire que la disparition du vieux prélat indépendantiste place le MFDC sur une corde raide, plongé qu’il est dans une situation où il lui sera difficile de trouver l’homme providentiel capable de combler le vide.
La Casamance devient ainsi un champ de guerre où s’expriment les différentes factions rebelles pour le contrôle du maquis.

La mort de l’Abbé Diamacoune suscitera-t-elle un sursaut de conscience au sein du MFDC ou exacerbera-t-elle les tensions dans ce mouvement qui donne l’impression de s’essoufler ? S’interroge Walfadjiri.

En tous les cas, Jean-Marie Biagui, le secrétaire général du Mouvement des forces démocratiques de Casamance se veut être optimiste. « La flamme de la paix ne s’éteindra pas. Toutes mes responsabilités de président par intérim du MFDC est de porter haut la flamme de la paix que l’Abbé nous a léguée », dit-il. Il a appelé tous ces frères et sœurs du MFDC en particulier, à poursuivre sur la voie du dialogue pour un parachèvement définitif de paix. Car il pense que le processus de la paix engagé par l’Abbé Diamacoune est irréversible. Reste à croire que l’appel sera entendu par la branche armée.

Hamadou TOURE

Sidwaya

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