LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Vous n’empêcherez pas les oiseaux de malheur de survoler votre têtе, mаis vοus рοuvеz lеs еmрêсhеz dе niсhеr dаns vοs сhеvеux.” Proverbe chinois

Burundi : Ceux qui s’exilent devront rembourser leurs études

Publié le samedi 13 janvier 2007 à 09h06min

PARTAGER :                          

Plus question d’investir dans la formation d’étudiants qui ne travaillent pas au Burundi une fois leurs études finies. Pour arrêter la catastrophique fuite des cerveaux, le pays entend faire rembourser ceux qui ne rentrent pas par la force si besoin est !

Le ministère burundais de la Force de Défense nationale n’y est pas allé par quatre chemins : les 15 officiers burundais sur la quarantaine partie étudier en Europe, qui ne sont pas rentrés à l’issue de leur troisième cycle, ont été révoqués début décembre.

Désormais, tous les étudiants qui souhaitent bénéficier d’une bourse d’études doivent s’engager au préalable à la rembourser si, en fin de cursus, ils ne reviennent pas travailler au pays. Le gouvernement compte solliciter l’intervention des pays hôtes pour recouvrer ces dettes et au besoin rapatrier les débiteurs.

Selon le porte-parole de Défense, le lieutenant-colonel Adolphe Manirakiza, la révocation est une mesure « très grave » : les exclus ne pourront plus, même s’ils rentrent ensuite, obtenir un quelconque contrat avec les services de l’Etat. Une mesure dissuasive pour les quelque 25 militaires en train de terminer leur thèse...

Le ministère estime que le pays fait de gros investissements pour une intelligentsia qui ne lui rend pas la pareille. Expliquées au Conseil des ministres par Germain Niyoyankana, ministre de la Défense, ces mesures ont incité le gouvernement à les étendre à tous les étudiants pour tenter d’endiguer la fuite des cerveaux. « Une véritable hémorragie », estime le président de l’Association des professeurs de l’Université du Burundi, Isaïe Nimpagaritse. De fait, selon le président du Syndicat des travailleurs de l’Université du Burundi, Paul Nkunzimana, sur la période 1999-2006, plus de la moitié des docteurs formés en Europe (83 sur 163) ne sont pas rentrés !

65000 dollars par étudiant

Le pays a pourtant beaucoup payé pour eux. D’après une étude de 2003 de la Planification de rééducation, la formation d’un docteur coûte à l’Etat et aux parents au moins 65 000 dollars US Sans compter la rémunération des enseignants. Pour une centaine de docteurs qui ne regagneraient pas le pays, la nation perdrait quelque 6,5 millions de $ soit plus de 10 fois le budget annuel du livre de l’enseignement primaire.

Dans les années 1990, l’Etat burundais n’avait pas pu imposer l’idée de prêt-bourse : les étudiants, censés rembourser petit à petit dès qu’ils avaient un emploi, s’y étaient opposés. Mais il est bien décidé aujourd’hui à faire payer au moins ceux qui ne veulent pas servir le pays.

Plus radical, le Rwanda voisin oblige désormais tous les étudiants des universités tant nationales qu’étrangères qui ont bénéficié de prêts-bourses depuis les années 1980 à les rembourser dans les plus brefs délais. Des prêts continueront à être consentis aux étudiants à condition qu’ils remboursent la totalité des frais engagés. Seuls ceux qui étudient les Sciences et la technologie en seront exemptés à condition de travailler ensuite pour l’administration. D’autres stratégies susceptibles d’inciter les Africains les plus diplômés à rentrer ont été tentées.

C’est le cas du système TOKTEN (Transfert des connaissances par des nationaux expatriés) du Programme des Nations unies pour le développement. Le PNUD fait venir des experts et universitaires expatriés pour travailler avec leurs compatriotes et redécouvrir les réalités de leur pays d’origine, espérant ainsi susciter en eux l’envie de rentrer définitivement.

Au Burundi, aucun n’a fait ce choix. Les autorités burundaises déplorent d’autant plus cette fuite des cerveaux que ceux qui rentrent ne sont pas si mal lotis. Les médecins militaires, par exemple, peuvent travailler dans d’autres universités de la place ainsi que dans des structures de soins de santé publiques ou privées pour compléter leur solde.

Jacques BUKURU et
Albert Baudoin TWIZEYIMANA

Sidwaya

PARTAGER :                              

Vos commentaires

  • Le 19 janvier 2007 à 16:55 En réponse à : > Burundi : Ceux qui s’exilent devront rembourser leurs études

    Justes, courageuses et exemplaires mesures. En effet, l’étudiant boursier devrait réaliser davantage que ce sont aux frais (combien couteux !) du pauvre contribuable de son pays qu’il est presqu’entièrement (sinon totalement) formé, voir nourri, hébergé, habillé pour bon nombre de boursiers ’internationaux’. Et que le simple devoir de justice devrait motivé le renvoi de la pèle, d’autant plus que chacun est conscient des besoins primordiaux pour l’Afrique en ses cadres qualifiés. Je crois bien que l’Afrique mérite beaucoup mieux que la honteuse pratique courante.

    Lorenzo, étudiant boursier burkinabé au Maroc.

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique