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Burkina-Niger : Renforcer la cohabitation entre les populations frontalières

Publié le vendredi 29 décembre 2006 à 07h37min

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Les populations vivant de part et d’autre de la frontière nigéro-burkinabè s’entendent difficilement. Afin de trouver des solutions à ces préoccupations, les gouverneurs des régions de l’Est et du Sahel du Burkina Faso ont rencontré le gouverneur de la région de Tillabéry du Niger, Adamou Iddé à Fada N’Gourma.

Malgré les bons rapports de coopération et de voisinage... expression d’une volonté politique affirmée par nos deux chefs d’Etat à savoir les présidents Blaise Compaoré et Mamadou Tandja, des préoccupations apparaissent très souvent de part et d’autre de notre frontière commune".C’est en ces termes que le gouverneur de la région de Tillabéry du Niger, Adamou Iddé a planté le décor de la rencontre entre lui et ses homologues des régions de l’Est et du Sahel Kilimité Théodore Hien et Bila Dipama.

Au cours de cette rencontre d’échange qui s’est tenue, le 27 décembre 2006 à Fada N’Gourma au Burkina, Adamou Iddé qui était accompagné d’une forte délégation a d’emblée laissé entendre : "la collaboration transfrontalière connaît des perturbations régulières". Raison pour laquelle le gouverneur de Tillabéry a souligné que ses deux sujets de préoccupations communes et parfois spécifiques, dont entre autres la sécurité transfrontalière, la circulation des personnes et des biens et les incursions sporadiques ont été examinées afin d’en trouver des solutions. La situation semble être complexe.

"En effet, nous constatons qu’en dépit des efforts déployés par nos régions, voire nos deux pays, individuellement ou collectivement, des préoccupations persistent le long de nos frontières", a déclaré Adamou Iddé.

La question de la frontière entre le Burkina Faso et la République du Niger a déjà été soumise au jugement de la Cour internationale de justice de La Haye. "En attendant, nous devons arrêter, de commun accord, des stratégies et prendre des mesures appropriées pour renforcer la coopération transfrontalière...afin de permettre à nos populations de livrer la seule bataille qui vaille : celle du développement", a suggéré M. Iddé.

Pour le gouverneur de la région de l’Est du Burkina Faso, Kilimité Théodore Hien, " lorsque nous parlons de difficultés, il s’agit de celles que peuvent connaître des frères vivant côte-à-côte ou sous le même toit, il s’agit de celles que peuvent connaître deux conjoints vivant sous le même toit, pour dire que le Burkina Faso et le Niger qui partagent une frontière longue de 600 km, ne peuvent pas échapper à cette réalité".

Ainsi, a-t-il poursuivi, en reconnaissant l’existence de ces difficultés, il s’agit de les évoquer avec sérénité et de se donner les moyens de les aplanir à travers le dialogue et le respect mutuel dans l’intérêt des deux peuples" qui vivent ensemble et qui ignorent royalement les 38° et autre 32° parallèle". Selon M. Hien, cette rencontre n’a pas pour but de dire que " tel arbre ou tel hameau de culture se situe dans les limites territoriales de tel pays ou tel autre.

Il s’agit de créer et de consolider les conditions d’une collaboration pacifique, harmonieuse et fraternelle entre nos populations". Le gouverneur de la région de l’Est a relevé qu’ils devront tout mettre en ouvre pour ne pas occulter des questions qui conditionnent ou qui influencent la vie des Nigériens et ou des Burkinabé. Kilimité Théodore Hien a affirmé qu’entre le président du Faso, Blaise Compaoré et son homologue nigérien , Mamadou Tandja, il existe des relations cordiales.

Ainsi, il a invité ses collaborateurs et la délégation nigérienne à amplifier ce bon climat dans leurs circonscriptions administratives. Il a souhaité que cette rencontre ne soit qu’un début et que beaucoup d’autres rencontres se tiennent, car c’est seulement à ce prix que les populations burkinabé et nigériennes vivront en symbiose.

Ali TRAORE


Des préfets à la frontière exposent les difficultés

A écouter les préfets des frontières du côté burkinabé comme du côté nigérien, rien ne va entre les deux populations frontalières. Les deux camps s’accusent et trouvent que la rencontre est la bienvenue.

Dr Djibo Mayaki Saïdou, préfet de Say/Niger

"Le déplacement au Burkina Faso s’inscrit dans le cadre des préoccupations que nous vivons à la frontière. En réalité, la cohabitation entre nos populations frontalières est de plus en plus difficile du fait de l’insécurité permanente, du fait des actes de banditisme, de la prolifération des armes à feu, mais également du fait des exactions que subissent nos populations. Quelques fois, nous constatons des interférences des autorités burkinabé sur notre territoire et cela, de façon contraignante vis-à-vis de nos populations. Cette attitude n’est pas de nature à préserver de bons rapports de voisinage. La rencontre entre les autorités régionales des deux pays, de ce point de vue, est la bienvenue"

Patrice Béogo, préfet de Kantchari / Burkina

"Nous entretenons de bonnes relations avec le poste administratif nigérien le plus proche du Burkina. Nos deux populations vivent dans la paix, en dehors de petites difficultés de cohabitation. Celles - ci concernent essentiellement l’environnement. Les nigériens viennent entreposer du bois faisant semblant d’être sur leur territoire alors que ce n’est pas le cas. Ils rentrent dans la forêt située côté burkinabé et même y coupent du bois vert.

Des problèmes existent aussi avec la douane. Il arrive que les nigériens viennent avec des véhicules non dédouanés et sans immatriculation et veulent traverser. Quand nos services mettent la main sur eux, ils partent raconter des balivernes à leurs autorités qui se déplacent pour des négociations. Il est de même pour les motos non-dédouanées. Ils débarquent avec des motos à Kantchari soit disant qu’ils sont venus pour se promener, alors qu’ils sont venus pour les vendre en réalité.

Même des transitaires nigériens se permettent de rentrer sur le territoire burkinabé et parfois jusqu’à Kantchari pour y accomplir des formalités de transit alors que cela est anormal ! C’est essentiellement ces types de problèmes que nous rencontrons, sinons nos deux administrations entretiennent de très bonnes relations"

Propos recueillis par Ali TRAORE


Conflits frontaliers en Afrique : Commençons l’intégration par la base

Union africaine (UA), Union économique et monétaire Ouest Africaine UEMOA) Communauté économique des États de l’Afrique de Ouest CEDEAO)... Ce sont des regroupements africains qui militent pour l’intégration des populations. L’on nous dira que l’intégration africaine est en marche et que l’on tend incontestablement vers la suppression des frontières.

Nous assistons régulièrement à des rencontres, chèrement payées par les contribuables et fortement médiatisées. Des experts, des ministres... de ces organisations travaillent à nous convaincre que sans intégration, sans regroupement, notre développement en Afrique est voué à l’échec. C’est vrai, ils ont raison, mais le problème est que la réalité sur le terrain est tout autre. De plus en plus, l’on se laisse convaincre que l’intégration africaine se passe au sommet.

Les gros bonnets et autres décideurs sont intégrés ; ils disent avoir les mêmes visions, mais leurs peuples tiennent au karitié ou à l’arbre qui se trouve sur leur territoire. Ils ne semblent pas être concernés par ce modèle d’intégration, ou disons - le , ne savent même pas à quoi cela rime. Ce ne sont pas les preuves qui manquent ! Prenons juste le cas du Burkina Faso et ses voisins.

Il y a de cela quelques mois, un conflit frontalier a opposé Burkinabé et Maliens faisant des morts dans la localité de Woronkuy. L’on sait aussi qu’il y a des problèmes de frontière du côté Burkina Faso / Bénin. Ceux avec le Niger dépassent les limites de la résignation des populations frontalières des deux pays.

Ils viennent rappeler que beaucoup reste à faire. Il faut tout de même saluer l’attitude des Burkinabé et des Nigériens qui, au lieu de prendre des armes pour se combattre, ont préféré le dialogue afin de trouver des solutions à la situation. Mais c’est aux chefs d’État et autres experts et techniciens qui s’activent à ce que l’intégration africaine soit une réalité d’impliquer de plus en plus les populations à la base.

Cela demande une sensibilisation surtout des populations frontalières sur l’intérêt des regroupements afin qu’elles mènent ensemble la seule bataille qui vaille : celle du développement. Les chefs d’État devraient le savoir, sans une bonne intégration de leurs populations à la base, leurs amitiés au sommet seront difficiles...

Ali TRAORE

Sidwaya

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