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Afrique cherche leaders pour la marche vers Addis-Abeba

Publié le mardi 19 décembre 2006 à 08h40min

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La démocratie souhaitée par le grand chef blanc français Mittérand pour l’Afrique reste à se concrétiser. Travailler à l’éveil des consciences, se battre pour la liberté et la justice sont une raison suffisante de vivre. C’est ce que doivent comprendre les Africains, selon l’auteur de ces lignes, pour une révolution pacifique en s’inspirant des dignes fils du continent qui l’ont aimé et servi avec dévotion.

Au début des années 90, lors du Sommet de la Baule, lorsque le président français de l’époque, François Mittérand, avait conditionné l’aide au développement par l’instauration de la démocratie, nos Etats n’ont pas hésité à enclencher le processus. Plus de 15 ans après, force est de constater que la plupart de nos pays pratiquent une démocratie de façade. Les journalistes sont assassinés, les droits de l’homme sont bafoués, la presse est muselée et on veut nous faire croire qu’il y a progrès en la matière.

Camarades ! Le combat pour la démocratie en Afrique reste entier. Travailler à l’éveil des consciences est une raison suffisante de vivre. Se battre pour la liberté et la justice est une raison suffisante de vivre. Beaucoup de gens affectionnent l’idée selon laquelle le temps guérit les maux.

La révolution pacifique pour éviter le pire

En réalité, le temps est un élément neutre dans l’évolution de la condition humaine. Le temps a été longtemps plus utilisé à des fins destructrices par des hommes de mauvaise volonté qu’il n’a été utilisé de façon constructive par des hommes de bonne volonté.

Dans nombre de pays africains, la révolution est la seule et l’unique voie de salut pour ces peuples opprimés. Permettez-moi de vous rappeler que l’article 2 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen d’août 1789 vous donne le droit à la résistance à l’oppression.

La révolution telle que nous la prônons est d’abord pacifique, mais nous sommes d’avis avec le président Kennedy quand il disait que ceux qui empêchent les révolutions pacifiques rendront inévitables les révolutions violentes. Au passage, nous mettons en garde ceux qui ne connaissent pas le "goût de la sueur" contre une telle aventure. En effet, quand on s’engage dans une révolution, on doit être prêt à faire le sacrifice suprême.

Du reste, c’est de l’ignorance totale que de penser qu’on peut être attaché à des valeurs telles que la justice et l’équité sans être la cible privilégiée d’un monde globalement injuste, méchant et malhonnête. "La liberté n’est jamais accordée de bon gré par l’oppresseur. Elle doit être exigée par l’opprimé", disait Martin Luther King.

Ici et ailleurs, quand nous avons pris certaines positions, nous avons été la cible de gens d’une naïveté et d’une crédulité inquiétantes et dangereuses pour l’humanité.

Cette position parce qu’elle est juste

Des gens dérangés dans leur tête et atteints de myopie nous ont attribué des intentions d’une bassesse rare. Cela nous a davantage persuadé que la tâche est immense et qu’elle est la même tant dans les milieux soi-disant intellectuels que dans les milieux arriérés. C’est toujours avec un sourire couplé d’une dose de compassion que nous les observons. Nous leur avons toujours pardonné. Pendant qu’il subissait le supplice de la Croix, le Christ lui-même n’a-t-il pas dit : "Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font" (Luc chapitre 23 verset 34).

Nous ne prenons pas une position parce qu’elle est populaire. Nous ne prenons pas une position juste pour faire plaisir à des gens. Nous prenons une position parce que nous estimons qu’elle est juste.

Au soir de sa vie, le grand philosophe et prix Nobel de physique Albert Einstien disait : "De l’homme, je ne dirai plus rien, il est inconstant".

Oui, inconstant, l’homme l’est. Il peut prôner une chose aujourd’hui et la décrier demain. Il peut vous jeter des fleurs aujourd’hui et vous jeter des pierres demain. A quoi sert-il donc de prendre une position juste pour lui faire plaisir contre sa propre conscience ?

En Afrique, des gens qui ne savent même pas où se trouve le nord veulent diriger. Des gens qui ne sont même pas en mesure d’élaborer un programme d’actions sont portés à la tête.

Certains sont élus parce qu’ils sont riches ; sans qu’on cherche à connaître l’origine de leurs richesses. Une fois à la tête, ils perdent la tête, cultivent le "regard du lion" et s’entourent de mythes inventés de toutes pièces. Nous disons alors qu’ils ont changé. En réalité, ils n’ont pas changé. Ils se sont révélés. "Seul le pouvoir révèle l’homme", a dit Machiavel.

Je pense aux vaillants

Quand un homme n’a pas le pouvoir (économique, solidaire, religieux), gardez-vous de dire que vous le connaissez. En effet, beaucoup de ses tares peuvent être refoulées dans le subconscient quand il n’a pas le pouvoir.

Quand je pense à l’avenir de l’Afrique, je pense à Nelson Mandela. L’homme a passé 27 ans en prison pour que les Noirs de l’Afrique du Sud recouvrent leurs droits. Quand je pense à l’avenir de l’Afrique, je pense à Thomas Sankara, celui-là qui a osé inventer l’avenir au Pays des hommes intègres. Les progrès que le Burkina Faso enregistre (si progrès il y a) sont essentiellement dus à la révolution de Thomas Sankara (Thom Sank pour les intimes).

Quand je pense à l’avenir de l’Afrique, je pense à Marien N’Gouabi. Pendant qu’il passait la majeure partie de son temps au travail, ses compagnons d’armes erraient dans les rues de Poto-Poto (quartier populaire de Brazzaville).

Quand je pense à l’avenir de l’Afrique, je pense à tous les journalistes de la trempe de Norbert Zongo (journaliste d’investigation burkinabè lâchement assassiné le 13 décembre 1998), sur qui l’épée de Damoclès plane chaque jour.

Quand je pense à l’avenir de l’Afrique, je pense à tous les artistes de la trempe de Bob Marley, qui ont su mettre leur talent d’artiste au profit de la cause des Noirs. Au sein de la nouvelle génération, l’Afrique trouvera-t-elle des dirigeants aptes à la conduire ? J’ai foi.

Oui, j’ai foi que nous parviendrons à construire une Afrique noire solide et prospère avec Addis-Abeba comme capitale fédérale. Mandela, Sankara et les autres y reposeront pour l’éternité. J’invite tous les princes à ne pas être trop attachés à leur titre de noblesse et à quitter les palais pour la construction ; car les véritables princes, ce sont les acteurs de la construction.

Chacun de nous doit jouer sa partition, sinon devant l’histoire, nous seront tous responsables, tous coupables.

Depuis la place d’Addis-Abeba, nous verrons l’étoile de Malcom X, celle de Martin Luther King et celle de Che Guevara (Le Che) briller du haut du Kilimandjaro. Main dans la main, nous dirons alors d’une seule et même voix "Enfin...".

Bassèlougou Kazagabou (basselougou@yahoo.fr)

L’Observateur

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