LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Soyez un repère de qualité. Certaines personnes ne sont pas habituées à un environnement où on s’attend à l’excellence.” Steve jobs

Kigali-Paris : Une tempête dans un verre d’eau ?

Publié le jeudi 23 novembre 2006 à 07h53min

PARTAGER :                          

Dominique de Villepin et Paul Kagamé

Les relations entre la France et le Rwanda, déjà mal en point depuis le déclenchement du génocide de 1994, se brouillent davantage ces derniers jours avec l’annonce par le juge antiterroriste français, Jean Louis Bruguière de poursuivre l’entourage du président rwandais, Paul Kagamé.

Cette action judiciaire qui tend à faire comparaître des responsables actuels du régime devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) à Arusha a plutôt des allures d’épouvantail pour calmer les ardeurs de Kigali qui a, elle aussi, diligenté une enquête pour établir la responsabilité de la France dans le génocide rwandais. Une autre plainte de survivants du génocide est pendante devant la justice en France sur le rôle de l’armée française pendant ce drame qui restera à jamais dans les mémoires.

En effet, Paris est accusée par Kigali d’avoir entraîné et armé les auteurs du génocide, et d’avoir facilité la fuite des responsables des massacres dans le cadre de son opération militaro-humanitaire au Rwanda. A ce petit jeu de l’épouvantail où chaque protagoniste essaie de tenir ou tient réellement l’autre par la barbichette, les politiques se servent allègrement de la justice pour se régler les comptes.

Le ministre de la Justice rwandais est on ne peut plus clair sur la question : "Ce sont des jeux politiques plutôt qu’une procédure judiciaire."

Paris sait très bien que l’enjeu des conclusions du juge Bruguière est plus politique qu’autre chose. Même si le porte-parole du Quai d’Orsay invoque la séparation des pouvoirs pour affirmer l’indépendance de la justice dans le traitement de cette affaire.

Un argument qui est difficilement soutenable quand on sait qu’au nom de la raison d’Etat l’enquête sur l’assassinat du juge Borel à Djibouti piétine, et qu’au nom de cette même raison d’Etat les assassins du journaliste Guy Kieffer en Côte d’Ivoire courent toujours.

Une fois de plus, c’est la France qui veut se faire championne des droits de l’homme en réclamant la tête d’un chef d’Etat africain alors qu’elle doit balayer d’abord devant sa porte.

Certes, pour le monde entier, les rescapés et la mémoire des victimes, il est historiquement nécessaire d’établir les responsabilités des uns et des autres dans cette tragédie. Le juge français a cité nommément neuf personnes dans l’entourage du président, contre lesquelles il a requis des poursuites judiciaires. Le président Kagamé est lui-même visé, le juge estimant qu’il est le commanditaire de l’attentat contre l’avion du président Juvénal Habyarimana en 1994. En l’état actuel de la procédure, seul le TPIR peut inculper le président rwandais. La demande du juge français est sur la table du secrétaire général de l’ONU, une institution qui n’est pas exempte elle-même de tout reproche dans la gestion de la crise rwandaise avant et pendant le génocide.

La question qui mérite d ’être posée est de savoir si la période est bien choisie au moment où le pays dit des mille collines se remet peu à peu de son cauchemar. Les Grands Lacs constituent une poudrière ethnique. Tout calcul politique dans la région doit forcément tenir compte de cette donne. Et même si c’est d’une main de fer, Paul Kagamé est en train de panser les plaies du génocide avec l’aide de la communauté internationale.

Il est vrai que l’Homme de Kigali n’a rien d’un francophile et que Paris tient à ne pas perdre pied dans cette région dont les richesses font l’objet de tant de convoitises. La géopolitique a ses raisons que le citoyen lambda ignore.

Cependant, faut-il prendre le risque, au nom de la justice, de fragiliser une paix aussi relative que celle que vivent les Rwandais ? C’est une question bien difficile. Ne pas y répondre maintenant ne signifie certainement pas, pour autant, que l’on va passer par pertes et profits les 800 mille victimes du génocide. Que nenni. Notre conviction est qu’ aucun des auteurs du génocide ne doit rester impuni. Et c’est pour cela que la justice ne doit pas être instrumentalisée au profit d’une puissance, quelle qu’elle soit.

Le Pays

PARTAGER :                              

Vos commentaires

  • Le 24 novembre 2006 à 12:13, par Me Baugha (Londres) En réponse à : > Kigali-Paris : Une tempête dans un verre d’eau ?

    une france a la tete de la quelle trone un president (Chirac jacques) qui trainent des casseroles juridiques a toujours la meme tactique en Afrique :
    1) monter un coup d’etat pour controler le pouvoir
    2) essayer une rebellion si la premiere etape ne marche pas
    3) intimider le pourvoir par tous les moyens ( son armee, RFI, ses reseaux mafieux en afrique et enfin sa justice selective)
    Regardez le tchad,le congo de sassou avec l’affaire du beach, la cote d’ivoire, le rwanda etc...
    Portez ensuite un regard sur les pays dociles vis a vis de la france . Leurs presidents sont des anges ( Bongo ,wade ,sassou etc)

    Arretons de pleurnicher et levons nous comme un seul homme pour defendre notre Afrique
    Ne nous laissons plus distraire par la France .
    Les europeens ne respectent que ceux qui ont de la dignite et de l’intelligence
    cessons nos larmes inutiles et mettons nous au travail pour l’Afrique.

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique