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Politique et affaires : Une frontière difficile à tracer

Publié le samedi 18 novembre 2006 à 09h43min

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Politique et affaires, dit-on, ne font pas bon ménage. C’est une assertion qui demande à être vérifiée, tant il est vrai que sous nos cieux les affaires ne prospèrent qu’à l’ombre du politique. Ceci est d’autant plus vrai qu’on assiste à une ruée des opérateurs économiques vers les politiques. Certaines personnes se demandent si finalement on ne devrait pas les qualifier d’« opérateurs politiques ».

Des Burkinabè ont encore en mémoire la mainmise d’un certain « nopérateur néconomique » de Bobo-Dioulasso sur la vie politique de la deuxième ville du Faso. Barro Djanguineba, pour ne pas le nommer, était l’homme à tout faire dans la capitale économique burkinabè.
Sur la quasi-totalité des régions du Faso, les opérateurs économiques ont leur mot à dire. La situation est encore plus tranchante à Ouagadougou, la capitale. Le constat est que le monde des affaires a fait une intrusion dans le domaine politique.

Hommes politiques et opérateurs économiques n’hésitent pas à faire des alliances contre-nature pour, chacun, préserver ses intérêts. Par ces temps de précampagne, les opérateurs économiques sont l’objet d’une cour assidue de la part des grosses pointures. Pour les plus petits, c’est le mouvement inverse. Les voix du richissime OK, de Léonce Koné, de Lassiné Diawara ou de Alizéta Gando sont décisives dans les cercles politiques.

On murmure même que Léonce Koné manuvrerait pour être candidat aux prochaines législatives dans la province de la Comoé. A ce qu’on dit, il aurait suscité la création d’un comité de soutien à sa candidature. La chose aurait été savamment préparée avec son implication dans les activités sociopolitiques de sa localité. Ainsi a-t-on senti son soutien à la jeunesse lors du forum sur l’emploi des jeunes organisé tout récemment dans la capitale du Paysan noir.

Bien plus pragmatique, Lassiné Diawara a construit une école dans le village de Sarfalaye où sont concentrés ses intérêts économiques et politiques. Ces exemples montrent que les opérateurs économiques ont décidé de s’investir dans la politique. Ces actions sont si visibles que certaines personnes se demandent pourquoi ils se laissent embarquer dans cette galère. Il y a simplement que la politique semble indissociable du monde des affaires.

En la matière, les Burkinabè n’ont rien inventé. Cette collusion est aussi une réalité ailleurs, avec la percée politique de certains opérateurs économiques, et dans certains cas, la multiplication des procès pour financement occulte de partis politiques. Quelques-uns, comme l’Italien Silvio Berlusconi, ont joué les premiers rôles dans leur pays. En effet, ce magnat des affaires et de la presse a été élu par deux fois président du Conseil, correspondant au poste de Premier ministre.

Bernard Tapie, pour sa part, aura marqué le monde politique français des années 1980 sous le pouvoir socialiste de François Mitterrand. Les politiques n’ont jamais toléré la présence de ces deux personnalités du monde des affaires considérées comme des « intrus » venus leur dicter leur loi.

Il est vrai que les opérateurs économiques burkinabè ne sont pas aux avant-poste ; pour autant ils ne sont pas hors de la sphère politique. La frontière est donc difficile à tracer entre ces deux mondes. Cela n’est pas sans conséquence pour la démocratie car, très souvent, les soutiens des financiers se font sur la base de compromissions.

Dans leur logique commerciale, qui est que rien n’est gratuit, les opérateurs économiques attendent des politiques qu’ils leur concèdent de juteux marchés en contrepartie de leur engagement sur le terrain. Les politiques deviennent alors incapables de décision, liés qu’ils sont par la défense d’intérêts partisans.

Adam Igor

JOurnal du jeudi

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