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3e Congrès ordinaire du CDP : Les bagarres sont à venir

Publié le lundi 13 novembre 2006 à 08h47min

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Ceux qui s’attendaient à un chamboulement dans l’état-major du CDP ont déchanté, car le congrès ordinaire du parti majoritaire, troisième du genre, tenu les 9, 10 et 11 novembre derniers à Ouagadougou, s’est apparenté à une relève de la garde rouge de la Présidence du Faso. Tout a bougé au sommet du CDP pour que rien ne bouge.

Et pourtant, nos confrères putatifs, le téléphone arabe (radio trottoir) et Dame Rumeur avaient prédit un petit séisme. Mais au matin du 11 novembre, rien de tout cela. Le caractère modéré d’un Roch continuera à tempérer la fougue de Salif Diallo. Certes des têtes sont passées à la trappe et d’autres ont émergé. Ainsi en est-il du docteur Kapuné Karfo, ci-devant commissaire politique de la région du Centre-Sud qui cède sa place à Bertin Ouédraogo, coordonnateur du PASEC-T.

Si le décagnotage de Kapuné Karfo qui solde là les comptes des mauvais scores des dernières municipales (perte de la mairie de Pô, percée de l’ADF/RDA à Bindé et de l’UNDD à Gombousgou) était attendu, la nomination du patron du PASEC-T a créé la surprise. D’aucuns se posant la question de savoir pourquoi l’avoir préféré à un Jean-Claude Bouda, actuel maire de Manga. Autre départ, celui de Christophe Dabiré du Sud-Ouest, qui semble lui aussi payer cash les contre-performances du parti dans cette contrée et son immixtion supposée ou réelle dans les vicissitudes qui ont entouré l’élection de la mairesse de Kiembara.

S’il faut parler de surprises, c’est d’abord de la "montée" de Benoît Ouattara, bombardé commissaire politique des Cascades, en remplacement d’Alain Ludovic Tou. Alors qu’avant le congrès, se susurrait le nom d’un certain Maurice Mélégué Traoré. Le nouvel arrivant aura en tout cas la lourde tâche d’éviter que toute la région du Paysan noir tombe dans le giron de l’opposition. Tâche ardue s’il en est, pour "Koro Ben". Qui doit mériter cette nouvelle casquette pour ne pas donner raison à ceux qui murmurent (déjà ?) qu’il est le cas même du "plongé par le sommet".

L’autre surprise, c’est le maintien de Kader Cissé comme secrétaire chargé du développement et commissaire politique du Sahel. Parce qu’il a perdu la mairie de Dori aux derniers scrutins locaux, d’aucuns ne donnaient pas cher de sa peau. L’homme en réchappe, car, dit-on, il demeure efficace pour contrer aux prochaines joutes législatives Arba Diallo du PDS (opposition) et bourgmestre de Dori.

Ce congrès aura été, à en croire les premiers responsables, aussi celui des décisions courageuses et des débats francs. De par son gigantisme et son péché originel (les premiers responsables sont, pour la plupart, des révolutionnaires reconvertis), le CDP a généré en son sein des maux qui le rongent, notamment les bravades de plus en plus nombreuses à l’encontre de la direction. Le rassemblement de ce week-end aura aussi eu le mérite de tenter d’apurer ces contentieux en récompensant les bons et en punissant les mauvais. Car, à force de vouloir ménager la chèvre et le choux, le CDP confinait souvent à une auberge espagnole.

A la décharge des militants "grogneugneu", l’imposition par la hiérarchie de candidats électoralement petits pose effectivement problème. C’est pourquoi au présent congrès, de nouvelles procédures pour choisir ceux qui, désormais voudront être mandatés par le peuple ont été définies. On procédera de la base au sommet par un système de tri et de notation, laissant in fine aux premiers responsables par l’entremise d’un comité ad hoc le soin de trancher. Si sur le papier un tel mode de candidature peut paraître clean et objectif, il faut cependant attendre d’en mesurer la faisabilité effective sur le terrain.

En effet, le fait même que ce soient les structures de base qui, au moyen de collèges d’appréciation doivent confectionner ces short list, relève déjà d’un casse-tête. Qui est habilité à siéger dans ce collège ? Quels sont les critères de présélection ? Sur quoi va se baser le comité de candidature pour déclarer définitivement admis ceux qui iront à la recherche de l’onction populaire ? Les éventuels recalés accepteront-ils de bonne grâce de se plier à la discipline du parti ?

Avec cette IIIe législature qui s’achève, de nombreux députés sont à leur 15e année à l’hémicycle et n’ont pas l’intention d’aller grossir l’effectif de l’Association des anciens parlementaires. Mais il y a aussi l’armée de tous ces militants qui trépignent d’impatience, pour avoir longtemps rongé leur frein. Pour eux, à force d’attente, la conquête de l’écharpe du député commence à s’apparenter au Saint Graal. Des législatives en ordre, voilà ce que veut le CDP en son sein, or l’enjeu et les intérêts individuels sont tels qu’il y aura vraisemblablement la bagarre à ces élections. La tambouille est à venir, car il y aura trop d’appelés, mais très peu d’élus.

Des recalés qui ne manqueront pas de manifester des actes anti-parti, certains, il faut le dire, ne pouvant pas concevoir une vie dans un parti, sans être à un poste nominatif ou électif. On l’aura aussi remarqué, si le CDP veut éviter la bagarre en son sein, celle avec d’autres partis, notamment avec l’ADF/RDA, paraît inévitable avec la sortie sans gants de Salif Diallo, à l’ouverture du congrès. En fustigeant "cette nouvelle race de politiciens... ces fantassins aux ordres du général, mais qui ne reconnaissent pas son armée face à laquelle ils ont connu la déroute", le coordonnateur général du congrès a fait une allusion si claire qu’il n’est point besoin de jouer aux devinettes.

A l’évidence, les deux coépouses de Blaise Compaoré se crêperont le chignon en mai 2007, car le gentlemen agreement qui a prévalu entre le CDP et l’ADF/RDA lors de la présidentielle semble voir vécu. Cet exercice funambulesque consistant à être avec Blaise tout en rivalisant avec le parti présidentiel a suffisamment montré à Gilbert et à ses ouailles qu’ils ne pouvaient pas longuement prospéré. En signifiant au parti de l’éléphant, que quand on combat pour un même général, on est embarqué sur un même bâteau et que c’est kif- kif bourricot, Salif Diallo dit haut ce que d’ailleurs certains n’ont pas manqué de signifier souvent à l’ADF/RDA.

Dans tous les cas, l’horloger politique principal du Burkina attend encore de voir en mai 2007 les performances des uns et des autres avant de tourner la grande roue pour faire ou défaire ceux qui se chamaillent pour appliquer son programme quinquennal.

Observateur Paalga

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