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3è Congrès ordinaire du CDP : Accusés, levez-vous !

Publié le vendredi 10 novembre 2006 à 00h22min

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Roch Marc Christian Kaboré et Simon Compaoré

Le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) fait sa toilette. Il veut se débarrasser des « brebis galeuses » et éviter, de ce fait, que la barque du parti entre dans une zone de turbulence.

Plusieurs militants du parti sont en congrès, du 9 au 11 novembre, à Ouagadougou. Le thème de réflexion tient en trois mots : unité, cohésion, défis. Le congrès examinera des dossiers d’indiscipline et sanctionnera les coupables.

La rencontre s’est ouverte en grande pompe, hier matin, à la maison du peuple. Salle archi-comble, salves d’applaudissements, tonnerre de slogans... Le décor, savamment orchestré, témoignait bien de la grandeur de l’évènement. Ce congrès coïncide avec le 10e anniversaire du parti. Le coordonnateur général, Salif Diallo, ne manque pas d’éloges : "Le CDP est un parti dirigé et discipliné". Mais il y a tout de même des problèmes. Salif Diallo lui-même parle de « dysfonctionnements ». D’ailleurs, à ce sujet, le président du parti, Roch Marc Christian Kaboré, est formel : "Les trois dernières années ont été émaillées par des insuffisances certaines".

Surtout à l’orée des élections. Le président Kaboré égrène des comportements contraires aux textes du CDP : « indiscipline caractérisée, non respect des directives du parti et de ses structures, actes anti-partis grandissants... ». N’en pouvant plus, il avait décidé, le 24 mars 2006, d’exclure certains militants du parti. L’article 1 de la décision n°2006/009/CDP/CN/BPN/BEN et de bien d’autres est lourd de sens : "Les militantes et militants ci-dessous nommés sont exclus du parti en attendant la décision finale du congrès".

Les personnes concernées sont accusées, dit-on, d’avoir enfreint les textes fondamentaux du CDP. Ainsi, dans la province du Kadiogo, 9 conseillers municipaux et membres de certains bureaux de section ont été mis à la touche. Les indésirables étaient plus nombreux dans le Houet. 29 au total. Trois maires d’arrondissement (Célestin Koussoubé, Souleymane Sanou et Basile Pitroipa), « boutés hors de la maison », ont dû déposer leurs bagages à l’ADF/RDA. Les autres sont des conseillers municipaux ou des membres de bureaux de section. Des militants d’autres provinces ont également été exclus. Roch a donc donné le ton. Le congrès prononcera la sentence finale.

Mais ce n’est pas tout : le 19 juillet 2006, une épée de Damoclès plane encore sur la tête de certains responsables du CDP. Une lettre confidentielle est adressée au président du parti. L’objet mentionné à la première page est très évocateur : « Actes d’indiscipline et propositions de sanctions ». Le cachet qui y figure ne lésine pas sur la gravité du problème : « Urgent ». Son auteur ? Oubkiri Marc Yao, député de son état, commissaire politique régional de la Boucle du Mouhoun.

Dans ce document de 13 pages (chiffre de malheur), il accuse certains membres du CDP d’avoir trahi le parti lors de la dernière élection des maires de communes. Le maire actuel de Solenzo, Luc Coulibaly, alors militant du CDP, est ainsi accusé d’avoir "conclu une alliance contre-nature avec les conseillers de l’opposition (ADF/RDA, UNIR/MS et PDP/PS)" et d’avoir mobilisé les militants mécontents du CDP pour se faire réélire. Contre évidemment le candidat du parti, Laurent Coulibaly, adjoint au maire sortant. Oubkiri Marc Yao n’en revient pas. Dans la lettre adressée à Roch Marc Christian Kaboré, il est sans ambages : "Au regard de la gravité de l’acte d’indiscipline posé par le camarade Luc Coulibaly, nous proposons qu’il soit suspendu de toute activité du parti conformément à l’article 39 des statuts du CDP".

"Un CDP plus uni, plus solidaire, plus opérationnel"

Il n’est pas seul sur la liste noire. Marc Yao souhaite vivement que l’ex-maire de Dédougou, Elizabeth Hakani Kondé, soit "suspendu du parti". Pas seulement elle : "Quant aux dix conseillers CDP qui ont suivi la camarade Kondé dans ses errements, il serait souhaitable qu’un blâme leur soit infligé", écrit le commissaire politique à la page 8 de son rapport. Ils sont tous accusés d’avoir trahi le parti. D’abord pour avoir "déposé une lettre de protestation sans fondements et d’avoir quitté la salle lors des primaires qui devaient désigner le candidat du parti". Le commissaire politique régional affirme aussi que le jour de l’élection du maire, « la camarade Kondé s’est présentée contre le candidat du CDP en essayant d’obtenir le soutien des conseillers UPR ». Mais elle a perdu. Cependant, Oubkiri Marc Yao tient mordicus : "Cette issue heureuse n’enlève rien à la gravité de l’acte posé par la camarade Kondé". Il faut, dit-il, la suspendre du parti.

Le Secrétaire général de la province des Balé, Boubakar Guira, pourrait, lui aussi, être « suspendu de toute activité du parti". Une militante de la province, Salamata Karantao, "retenue par consensus comme candidate du parti au poste de 2e adjoint au maire, s’est présentée comme candidate au poste de 1er adjoint et a battu le candidat du parti". Conséquence : Marc Yao propose qu’elle soit sanctionnée par un blâme.

La liste est longue. Cependant, selon certains militants incriminés, "le commissaire politique régional voulait, coûte que coûte, imposer ses candidats. Cela a créé des désagréments et nous avons décidé de prendre nos responsabilités". Des militants d’autres régions figurent dans des rapports transmis au président du parti.

Le congrès du CDP vise à faire le diagnostic de la situation afin d’éviter de telles discordes à l’avenir. "Il nous faut situer les causes si nous voulons véritablement en guérir", a déclaré Roch Marc Christian Kaboré. Objectif : "Un CDP plus uni, plus solidaire, plus opérationnel".


Des diplomates quittent la salle

Les représentants de certaines ambassades, bien qu’ayant leurs cartes d’invitation, n’ont pas eu de places pour s’asseoir. Ils ont quitté la salle, mécontents de n’avoir pas pu suivre l’ouverture du congrès. Le CDP saura-t-il éviter ces désagréments à la cérémonie de clôture ? On le saura demain, à 16 h.

H.D

Par Hervé D’AFRICK

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 10 novembre 2006 à 19:54, par JP’S En réponse à : > 3è Congrès ordinaire du CDP : Accusés, levez-vous !

    La question disciplinaire dans un parti a son importance et ne doit donc pas etre sousestimée. Mais un excès de disciplinarisme ne risque-t-il pas de faire perdre de vue le plus important ? Tant d’indiscipline est sans nul doute le signe d’un malaise politique qui mérite qu’on s’y arrete. Quel autre moyen a un parti de se rendre compte de sa vraie assise, sinon l’adhésion spontanée (ou alors la désaffection morale) aux directives qui émanent des organes centrales ? Si beaucoup ruent dans les brancards ou meme choisissent la voie de la rébellion ouverte, c’est que le temps d’une vraie autocritique, sans inopérante phraséologie, est arrivé. Le parti saura-t-il s’en rendre compte ? Ou le congrès fera-t-il le lit de plus profonds mécontentements et de plus fracassantes défections ?

  • Le 12 novembre 2006 à 13:34 En réponse à : > 3è Congrès ordinaire du CDP : Accusés, levez-vous !

    J’espère que le 10 ème anniversaire coincidant avec le 3ème congrès du CDP ne va simplement pas se limiter à faire le procès des "brebis galleuses" mais surtout à faire le point sur le programme politique du Président COMPAORE.
    Depuis un an, quel est le résultat, sur le terrain, des réalisations effectivement effectuées par le gouvernement du Burkina Faso. C’est donc, certainement sur ce bilan qu’il conviendrait de s’apesantir... un futur militant, France.

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