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Etats-Unis : Le mur de la honte

Publié le lundi 30 octobre 2006 à 06h43min

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Après avoir exercé une certaine influence dans la réunification de l’Allemagne, les Etats-Unis veulent tracer une ligne de démarcation entre eux et le Mexique. George W. Bush vient en effet de promulguer une loi permettant la construction d’un mur à la frontière mexicaine.

Près de 1 200 km de barrière ultra-sophistiquée devraient être érigés d’ici 2009, entre le sud des Etats-Unis et le Mexique. Au total, ce mur occupera un tiers de la frontière, dans le but de freiner l’immigration clandestine. Quelque 11 millions de Mexicains vivraient aux Etats-Unis, dont la moitié illégalement.

Cette nouvelle loi n’est pas dénuée de visées électoralistes. Par sa promulgation, le président américain cherche sans doute à séduire les électeurs ultra-conservateurs, à l’approche des élections parlementaires

(dans moins de deux semaines). Reste qu’il faut craindre un effet boomerang, George W. Bush risquant de s’attirer les foudres d’une communauté hispanique influente aux Etats-Unis.

Par ailleurs, en promulguant cette loi, Bush fils voudrait donner l’impression à ses concitoyens qu’il reste attaché à leur sécurité, et l’illusion que son pays reste debout et fort, malgré les épreuves, en termes d’attaques et de menaces terroristes. Mais de là à vouloir transformer un pan des frontières du pays en forteresse, il y a un pas qu’il faudrait se garder de franchir. D’autant que la mise en application d’une telle loi serait contraire au principe de liberté de circulation.

En tous les cas, un second "mur de la honte" ne devrait pas empêcher que des Mexicains fassent illégalement leur entrée aux Etats-Unis pour y chercher du travail. Tout comme il ne sonnera sans doute pas le glas de l’entrée de la drogue en territoire américain. A ce propos, on peut être d’avis avec l’opposition démocrate américaine, qui estime que l’érection d’un tel mur ne réglera pas le problème mais risque d’enrichir les passeurs.

De fait, l ’Histoire lointaine et immédiate nous enseigne que les murs de séparation n’ont jamais constitué un réel frein à l’immigration clandestine. Jusque-là, le phénomène n’a pas trouvé le remède infaillible qu’on voudrait lui appliquer. Grande muraille de Chine, mur de Berlin, rien de tout cela n’a été, on le sait, infranchissable. En dépit des mesures prises pour empêcher le flux massif de migrants clandestins subsahariens à Ceuta et Melilla, ces lieux à hauts risques sont, malgré tout, toujours pris d’assaut par des sans-culottes déterminés à forcer les portes d’un ailleurs meilleur.

Qu’on ne se voile pas la face, quels que soient les barrières et "les rideaux de fer" qui seront dressés, les laissés-pour-compte continueront de remuer ciel, terre et mer, toujours à la recherche d’un éden mythique. Ce sera ainsi, tant qu’il y aura d’un côté le monde des repus, et de l’autre, celui des meurt-de-faim et des gueux.

Les Etats-Unis devraient s’attaquer aux vraies causes de l’immigration, notamment mexicaine, en commençant par aider ces candidats clandestins à l’immigration à s’installer chez eux en leur offrant des perspectives meilleures, plutôt que de ruiner leurs relations avec leurs voisins mexicains et de gaspiller de l’argent qui pourrait servir à une humanité désemparée. Dans un monde réduit à un "village planétaire" où sont censées être brisées les frontières, ériger un tel mur serait se livrer à un anachronisme éhonté.

Il est vrai que les contrôles aux frontières restent un casse-tête pour les pays riches qui se voient ainsi obligés de fermer leurs frontières par des mesures draconiennes. Il est tout aussi clair que les menaces répétées des attentats et la grave récession économique que connaissent, ces derniers temps, ces pays ont accentué un repli sur soi. Chômage et insécurité n’ont jamais autant été des thèmes de préoccupation majeurs et communs à la plupart des pays du Nord.

Quoi qu’on dise, ces pays riches restent des îlots de prospérité et il est clair que si les ressources étaient mieux distribuées, l’humanité ne se porterait que mieux.

De fait, tout se passe comme si la mondialisation ne devait profiter qu’aux uns, les plus forts, et que les autres, les plus faibles, devaient se contenter des miettes qu’on voudrait bien leur céder. Comme si le principe de liberté de circulation des biens et des personnes devait beaucoup plus s’appliquer dans un seul sens : du Nord vers le Sud ; et, comme si, enfin, les Etats-Unis qui entendent être les seuls maîtres de séance dans la gestion des affaires du monde et voir toutes les têtes dodeliner dans le sens du oui approbatif, ne devaient pas être contredits dans leurs ambitions.

Aucun brise-vent ne devrait être installé pour freiner leur déferlante. Assurément, ça n’a pas été une mince affaire pour tous ceux qui se sont érigés en censeurs de la vision américaine du monde. Des dirigeants latino-américains comme Hugo Chavez du Vénézuéla et Evo Morales de Bolivie, deux moutons noirs de l’Administration Bush, ne diront pas le contraire .

Le Pays

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