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Médiations africaines : l’art de tourner en rond

Publié le lundi 16 octobre 2006 à 07h51min

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Si la « palabre africaine » pouvait pousser plus loin et plus rapidement son efficacité à guérir les maux dont souffrent certains pays africains, la Somalie, le Soudan, le Tchad ou la Côte d’Ivoire pour ne citer que ces exemples, ne souffriraient pas autant des conflits qui les rongent depuis des années.

Pour ne citer que le cas de la Côte d’Ivoire, que de réunions, de palabre ! De Lomé à Dakar en passant plusieurs fois par Abuja, Bamako, Pretoria, Addis-Abeba, que n’a-t-on pas proposé comme solutions sous l’arbre à palabre pour une sortie de crise définitive dans ce pays ? Aujourd’hui, on n’est pas loin de s’en remettre, même pour ceux qui ne croient en rien, à Dieu, le Tout Puissant.

L’exemple de la Côte d’Ivoire est caractéristique des limites des médiations africaines telles qu’elles se présentent actuellement. Il serait fastidieux de remonter la longue histoire de ce pays pour expliquer l’état actuel de la situation dans laquelle il est plongé. Cependant, on peut noter que la colonisation étrangère ou française plus précisément a fait de la Côte d’Ivoire un pays qui n’a pas vocation à s’enfermer tant les apports extérieurs humains et matériels y sont importants.

Le défunt président Houphouët Boigny en a fait une terre d’attraction surtout pour les ressortissants des pays voisins et de nombreux Occidentaux qui y ont énormément investi. Au point que la Côte d’Ivoire est demeurée pendant longtemps le « principal phare » et la « locomotive » des économies de la région ouest africaine francophone.

Même les multiples crises économiques n’ont pas beaucouprop réduit l’attraction de ce pays avant que l’avénement de la rébellion en septembre 2002 ne remette en cause nombre de données. Cependant, beaucoup d’intérêts, surtout économiques et financiers sont en jeu dans ce pays. où nombre de personnes préfèrent cette situation de « ni paix ni guerre » à tout changement.

Pour des observateurs, c’est une des explications à la persistance de la crise même s’il faut y ajouter l’ »ivoirité », un concept « flou » que des « politicards » ont inventé pour conserver ou conquérir le pouvoir d’Etat. L’épouvantail de « l’étranger envahisseur » n’est qu’un prétexte pour instrumentaliser des « individus » acquis à une cause dont beaucoup ne perçoivent pas en réalité le danger.

C’est à ces « individus » qu’on demande de manifester bruyamment et violemmemnt, pourvu que ça « effraie ». Comme ils le font depuis le déclenchement de la rébellion pour conserver le pouvoir et réduire si possible à l’impuissance toute velléité de résistance et partant, « tuer » dans l’œuf toute tentative de remise en cause du statu quo d’où le président Laurent Gbagbo et son clan tirent la légalité, voire la légitimité de leur pouvoir.

C’est ce statu quo qu’il leur faut défendre encore demain, mardi devant le Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union africaine à Addis Abeba après l’avoir défendu le 6 octobre dernier à Abuja au Nigeria. Toujours la palabre africaine avant la rencontre des Nations unies à New York, le 25 octobre prochain. Ainsi donc, les Africains à travers leurs médiations auront passé quatre ans à tourner en rond sur la question ivoirienne et à s’en remettre une fois de plus. à l’ONU.

Parce que la solution se trouve, en réalité, à l’extérieur. On ne le dira jamais assez : la nature des conflits en Afrique, qu’ils soient intérieurs ou intra-étatiques trouve ses causes à l’étranger. Du coup, le médiateur africain qui n’est pas bien vu des Occidentaux ou qui ne cerne pas tous les enjeux va droit au mur.

Cette « extraversion » des conflits biaise du coup toutes les solutions proposées chaque fois que l’intérêt de l’un ou de l’autre camp est lésé comme c’est le cas en Côte d’Ivoire. L’Afrique n’ayant pas une « politique étrangère ou de défense commune », la situation s’en trouve ainsi compliquée malgré les professions de foi des uns et des autres.

En attendant les réunions du Conseil de Paix et de Sécurité de l’UA et du Conseil de Sécurité de l’ONU, les protagonistes de la crise ivoirienne ont prouvé (nous n’exagérons pas) qu’ils sont incapables de trouver une solution à la situation que vit leur pays. Gbagbo ne fait que divertir lorsqu’il demande de laisser les Ivoiriens trouver une solution à leur problème.

Sans préjuger de quoi que ce soit, un an de transition pour préparer des élections qu’on n’a pas réussi à organiser en quatre ans, n’est-ce pas encore une diversion et une perte de temps ? Pourquoi ne pas demander, comme par le passé en Angola, à l’ONU de prendre tout en main au lieu de tourner en rond ?

Par Bessia BABOUE

Sidwaya

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