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Ethique du Burkina : des funérailles de première classe

Publié le jeudi 12 octobre 2006 à 07h50min

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"Viima ya kanga". Cette expression en langue nationale mooré qualifie la cherté de la vie et demeure de nos jours l’expression la plus usitée. Toutefois, la vie n’est pas dure pour tout le monde car les affaires marchent bien pour certains. Plus que jamais, le Burkina est transformé en terre fertile aux "deals" les plus mafieux, aux comportements les plus indécents et préjudiciables à tout développement.

La culture de la paresse, la prime à la médiocrité, la courte échelle, la course effrénée à la richesse, la corruption, etc., sont devenues des activités très prisées. Aucun palier de la stratification socioprofessionnelle n’est épargnée. Pire, le poisson a pourri par la tête, comme l’énonce un proverbe bien de chez nous.

Et effet, au lieu de donner l’exemple, certains dirigeants et responsables, quand ils ne se rendent pas complices ou protecteurs d’auteurs de malversations, de trafics d’influence, ou de corruption, en sont les instigateurs. En témoignent les nombreux rapports du REN-LAC, de la Haute autorité de lutte contre la corruption ou du Comité national d’éthique. Non seulement l’immense travail abattu par ces structures est pratiquement vain parce que celles-ci n’ont aucun pouvoir exécutoire, mais aussi leurs rapports finissent généralement dans les tiroirs des décideurs politiques. Il n’est pas exclu que ces documents précieux, une fois tombés entre leurs mains, soient utilisés comme arme de chantage et de pression.

Car, il est très facile de solder ses comptes avec un adversaire d’obtenir son silence quand il devient trop entreprenant ou trop gênant. Il suffit de sortir ces casseroles sales, bien rangées dans les placards.

Malgré tout, plus personne ne semble avoir peur d’être dénoncé dans ce climat généralisé d’impunité. Car, après... "y a rien". Pourtant, une flopée d’institutions ont été créées par les gouvernants. Censées juguler, voire éradiquer les fléaux de la corruption, de la fraude, des détournements, etc., ces institutions se révèlent, pour la plupart, être de véritables coquilles vides. Le Burkina dispose, en tout cas sur le papier, d’une architecture institutionnelle à même de pouvoir mettre fin à l’hémorragie.

Hélas, la réalité déchante et le constat est amer : incapable de lutter contre les mauvaises pratiques, ces structures sont de surcroît parfois budgétivores.

Au fait, si la situation perdure, la responsabilité n’est-elle pas partagée par tous ses bailleurs de fonds qui ferment les yeux sur ces dysfonctionnements quand ils ne se mouillent pas eux-mêmes.

Certes, il y a des dirigeants honnêtes, tout comme il existe des citoyens intègres. Mais cette espèce en voie de disparition se présente de plus en plus comme l’exception qui confirme la règle. A l’étape actuelle de la situation, il est difficile de donner tort à ceux qui disent que la morale a été enterrée et qu’il reste à célébrer des funérailles de la classe.

Depuis plus de 40 ans, le Burkina et d’autres pays africains traînent les mêmes maux qui bloquent toute avancée vers la démocratie et la bonne gouvernance, ferments indispensables au développement de nos nations. On tourne en rond et, fait inquiétant, l’horizon semble incertain. Aucune lueur d’espoir ne se dessine, en dehors des déclarations prononcées lors des mille et un séminaires, budgétivores eux aussi, et dont les résolutions ne changent pas grand-chose.

Il est temps de nettoyer les écuries d’Augias et cela nécessite une décision politique forte, ferme et courageuse. Mais aussi, une réelle volonté des dirigeants et responsables burkinabè de donner de bon exemple qui, sans nul doute, exercera une influence positive sur les populations.

Pour suivre un confrère dans sa logique, comment faire distinguer à un enfant les biens publics du patrimoine familial quand c’est le véhicule de l’Etat qui le conduit à l’école et amène également la domestique au marché ? On ne cessera jamais de le dire, l’éducation civique et les leçons quotidiennes de morale doivent être enseignées dans les écoles primaires et même dans les établissements secondaires, afin d’inculquer durablement aux adultes de demain la bonne conduite à tenir en société. Il y va de la bonne marche de notre société. Assurément, toutes ces mauvaises pratiques sont en partie la résultante d’une éducation ratée depuis l’enfance.

Il urge de faire changer le vent de direction, autrement, le Burkina Faso ne sera pas digne d’être appelé "pays des hommes intègres".

Le Pays

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