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Faramana : L’ADF/RDA exige la démission du maire

Publié le jeudi 12 octobre 2006 à 07h43min

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L’on se rappelle qu’à l’issue des dernières élections municipales, l’Alliance pour la démocratie et la fédération / Rassemblement démocratique africain (ADF/RDA) avait obtenu 17 conseillers contre seulement 3 pour le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), et s’était subséquemment adjugé la mairie de cette commune rurale.

Mais, dans une lettre datée du 16 septembre 2006 et adressée au président de l’ADF/RDA, le maire, Seydou Traoré et 8 de ses conseillers ont, "pour convenances personnelles", notifié leur démission du parti de l’Eléphant, pour déposer armes et bagages au CDP. Du côté de l’ADF/RDA, on soutient que ce retournement de veste de leurs associés d’hier est consécutif à un "achat de conscience". Ils auraient été "achetés par ceux qui ont les moyens". Pour les militants du parti de l’Eléphant, ces démissions n’"engagent que leurs auteurs" mais cependant, "ternissent l’image des conseillers honnêtes et des militants des base".

Ils ont exprimé leur indignation hier mardi 10 octobre 2006, par une marche-meeting sur la mairie de Faramana avec à la clef, une déclaration dans laquelle ils exigent "la démission pure et simple de Seydou Traoré au poste de maire de la commune rurale de Faramana". Retour sur une matinée d’effervescence politique dans cette ville à l’extrême Ouest du Burkina, à quelques encablures du territoire malien.

La délégation partie de Bobo Dioulasso avait à sa tête le premier vice-président national de l’ADF/RDA, Diaho Mamadou Koné. Il était accompagné, entre autres responsables locaux du parti, de Balamine Diané, secrétaire général provincial du Houet, et de quelques membres du bureau politique national dont Célestin B. Koussoubé, ex-maire de Bobo Dioulasso. A Faramana, ils ont été accueillis au foyer du parti par la section locale conduite par Abdoulaye Sawadogo, avec quelques centaines de militants et de militantes de tous les âges.

"Indignation et révolte"

L’objet de la rencontre était connu de tous. Néanmoins, l’hôte du jour, Abdoulaye Sawadogo, introduisit les débats en ces termes : "Ici, à Faramana, nous nous sommes battus lors des municipales pour avoir des conseillers. Mais 9 d’entre eux nous ont ensuite trahis. Nous sommes donc là ce matin pour leur exprimer notre indignation et demander aux militants fidèles de rester soudés derrière le parti". Puis, en rang serré et les points levés, les marcheurs empruntèrent la nationale 9 et se dirigèrent vers la préfecture qui abrite en même temps la mairie. En tête du peloton, il y avait les dirigeants locaux du parti.

Les slogans scandés étaient, bien entendu, hostiles aux conseillers démissionnaires du parti de Gilbert Ouédraogo : "Corruption, à bas !" ; "L’intégrité, c’est l’affaire du RDA !", "Le RDA n’est pas en vente !",... criaient-ils en "choeur", tantôt en langue dioula, tantôt en langue mooré. L’indignation et le sentiment de révolte se lisaient sur les visages. Mais également l’espoir et la certitude d’un triomphe ultérieur, au vu de la mobilisation et de la détermination des centaines d’hommes et de femmes sortis pour la cause de l’Eléphant.

A la préfecture/mairie de Faramana, les marcheurs ont été accueillis par le préfet André Pierre Kambou. Derrière lui et à une distance prudente, se tenaient le maire démissionnaire, ses deux adjoints et quelques membres du conseil municipal transfuge de l’ADF/RDA. En réceptionnant la déclaration des marcheurs, le préfet leur a exprimé son regret de n’avoir pas été tenu informé à temps de leur intention de marcher. Il a accepté prendre la déclaration pour ensuite la transmettre à qui de droit pour, dit-il, "apaiser la situation".

De la mairie, les marcheurs ont mis le cap sur le poste de police. Environ une demi-heure de marche, sur la grand-route qui traverse la ville, pour rallier la police, située à l’autre extrémité de la ville. Et pas une seconde de silence : "RDA, burkindi" ; "RDA, hôronya", clamaient sans arrêt les insurgés, pour dire "RDA égale intégrité", en langues mooré et dioula. Si bien que les populations riveraines sortirent de leurs cases pour suivre la caravane.

Au poste de police, une copie de la déclaration a été remise au commissaire Youssouf Salou qui s’est réjoui du caractère pacifique de la marche. De la police, la foule ADF/RDA fit demi-tour, scandant les mêmes slogans et passa près du siège du CDP. Non loin de là, se trouvaient le maire de la commune et sa suite, assis sur un banc, mine de rien. La marche prit fin au foyer ADF/RDA et fit place au grand meeting.

Des "conseillers brouettes"

Tour à tour, les représentants des jeunes, des femmes, et des anciens, se sont déclarés choqués par la trahison dont ils ont été l’objet de la part du conseil municipal. Dans leurs allocutions alternées d’acclamations et parfois de pas de danse, les ténors provinciaux de l’ADF/RDA ont tenté de jouer les modérateurs : "En réalité, il n’y a aucun problème à l’ADF/RDA de Faramana. Vous avez fait la différence lors des municipales, mais le parti a été berné par des conseillers-brouettes et des conseillers malhonnêtes. Nous devons maintenant rester soudés et nous tourner résolument vers l’avenir, c’est-à-dire les prochaines échéances électorales. Ce sont eux qui ont honte. A leur place, je me serais pendu (...)" ; a déclaré Célestin B. Koussoubé, sous les ovations du public et le regard approbateur de ses compagnons de lutte.

Le premier vice-président du parti, Diaho Mamadou Koné, qui s’est exprimé au nom du président du parti, Gilbert Ouédraogo et du président d’honneur, Gérard Kango Ouédraogo, a lui aussi demandé aux militants ADF/RDA de rester sereins et soudés derrière le parti, et surtout de ne pas suivre l’exemple des conseillers dissidents. « Ils ont pris de l’argent pour quitter le parti et ils vont certainement revenir quand l’argent va finir. S’ils frappent aux portes du parti, je vous prie de les recevoir et ne pas les honnir » a déclaré le numéro 2 du parti de l’Eléphant.


Déclaration des marcheurs

Suite à la lettre adressée au président de l’Alliance pour la démocratie et la fédération /Rassemblement démocratique africain (ADF/RDA) en date du 16 septembre 2006 par le maire de la commune rurale de Faramana, monsieur Seydou Traoré, lettre relative à sa démission, à celle de tous les conseillers ainsi que leurs militants de base, nous, militants de base de la section ADF/RDA du département de Faramana, disons que cette démission n’engage que son auteur. Mieux, nous protestons vivement contre cette démission qui engage les conseillers honnêtes et les militants de base. Par ailleurs, nous disons que monsieur Seydou Traoré a trahi notre confiance et a abusé de la confiance des conseillers et les militants honnêtes.

A ce titre, nous, militants de base de la section ADF/RDA de Faramana, demandons la démission pure et simple de monsieur Seydou Traoré au poste de maire de la commune rurale de Faramana.

Ont Signé :

Diané Balamine, Secrétaire général provincial de l’ADF/RDA du Houet

Abdoulaye Sawadogo, Secrétaire général de la section de l ‘ADF/RDA de Faramana


Des protagonistes et observateurs s’expriment

André Pierre Kambou, préfet de Faramana : "En tant que responsable administratif du département, j’aurais dû être informé, au moins une semaine à l’avance, de la tenue de cette marche et du fait que je serais destinataire d’un mémorandum ou d’une déclaration. Cela n’a pas été fait. Néanmoins, j’ai cru bon, dans un esprit d’apaisement et de soulagement, accepter la déclaration et inviter les marcheurs à respecter, pour les prochaines fois, les lois de la République.

Ils ont certes reçu une autorisation du maire pour une marche qui était prévue pour le 7 octobre. Il y a eu report, mais les intéressés n’ont pas renouvelé leur demande. Nous n’avons pas voulu rentrer dans tous ces détails, mais à mon sens, la marche n’a pas respecté les normes républicaines".

Youssouf Salou, commissaire de police de Faramana : « Notre inquiétude pour cette marche, c’était le respect de l’ordre public. Sinon, les marches sont tout à faits normales en démocratie. Et comme vous l’avez suivi, la marche était initialement prévue pour le samedi passé, et a eu lieu finalement ce matin (ndlr :10 octobre). C’est vrai qu’aujourd’hui, ils n’avaient pas d’autorisation mais le préfet, dans un esprit d’apaisement, a autorisé la marche pour que les esprits ne s’échauffent pas.

"Le Pays" : Que savez-vous sur l’objet de la marche ?

"J’ai cru comprendre que c’est pour protester contre la démission du conseil municipal, et montrer qu’ils ont toujours des militants au sein du parti".

Seydou Traoré, maire de Faramana : "C’est seulement hier (9 octobre, ndlr) que j’ai été informé de la marche de ce matin (mardi 10 octobre). C’est à dire donc que la marche n’a pas respecté les dispositions légales. D’ailleurs, la demande ne respectait aucune norme. Nous leur avons néanmoins donné l’autorisation de manifester parce que c’est une première fois. Nous n’étions même pas obligé de les recevoir".

Que répondez-vous à ceux qui disent que le conseil municipal de Faramana a été acheté par le CDP ?

"En politique, personne ne peut acheter personne. N’est-ce pas que nous étions d’abord au CDP avant même d’intégrer l’ADF/RDA ?"

Qu’est-ce qui a donc motivé votre démission de l’ADF/RDA ?

"C’est la politique ! Je ne rentrerai pas dans ces détails-là."

Abdoulaye Sawadogo, S.G de la section ADF/RDA de Faramana : "Je suis vraiment très content ce matin, parce que le parti tout entier retrouve sa confiance après la psychose qu’avait suscitée la démission des conseillers. Ils avaient dit qu’ils démissionnaient avec l’ensemble des militants ADF/RDA, mais je suis vraiment comblé aujourd’hui de constater qu’il n’en est rien et que la population de Faramana reste soudée derrière notre parti. En témoigne la mobilisation que vous pouvez vous-même constater. Nous gardons espoir et savons qu’un jour, nous allons avoir raison sur nos traîtres. Ce sont des menteurs, des voleurs, ils n’ont pas honte. Nous ne les suivrons jamais. Nous restons solidaires au RDA".

Diaho Mamadou Koné, 1er vice-président national de l’ADF/RDA : "C’est vraiment une grande satisfaction pour moi, car comme vous le constatez, les gens sont sortis nombreux, pour cette manifestation d’indignation par rapport à ceux qui sont venus démobiliser les gens ici. Nous revendiquons la démission du maire. Parce qu’il n’est plus à mesure d’assumer ce rôle ; il y a de la malhonnêteté en lui. Il est très malhonnête !".

Célestin Koussoubé, membre du bureau politique national de l’ADF/RDA : "Nous sommes venus soutenir nos camarades de Faramana qui se sont sentis quelque peu trahis par leurs conseillers. Les élections n’ont pas souffert de débats ici et les populations ont voté RDA massivement. Nous trouvons que ce n’est pas normal que des gens viennent tromper cette population. Ce n’est pas honnête et c’était normal que nous protestions. La population n’a pas été mise au courant de ce qui s’est passé. Ça a été concocté entre quelques personnes qui ont finalement décidé qu’ils partaient au CDP, en disant que la population a suivi.

Et comme la population s’est rendu compte de cette tricherie, elle a estimé qu’il fallait marcher pour que les gens sachent qu’ils ne sont pas d’accord avec cette manigance. Je suis d’autant plus content que, comme vous l’avez constaté avec moi, la jeunesse qui nous avait déjà touchés a dit qu’elle n’était pas partie prenante de ce genre de comportement et qu’elle ne se laisserait pas berner par des tricheurs. Nous les en avons remercié et leur avons fait comprendre que la vie politique est aussi faite d’hommes de ce genre.

Nous espérons que ceux qui nous ont quittés aujourd’hui vont nous revenir un jour, car l’intelligence commande souvent que l’on revienne en arrière lorsqu’on se rend compte qu’on s’était trompé. Nous ne revendiquons pas la mairie de Faramana, mais nous disons seulement qui si le maire a honte, il devrait démissionner. Car on ne peut pas usurper les voix des populations pour ensuite en faire autre chose."

Mariam Ouédraogo, militante ADF/RDA Faramana : "Nous sommes sortis ce matin, pour montrer à ceux qui nous ont trahis que nous avons honte à leur place. Les femmes se sont mobilisées et je suis fière à l’idée que le parti est resté intact à Faramana. Nous resterons éternellement sur notre position de militants convaincus de l’ADF/RDA, avec ou sans argent. Nous ne sommes pas à vendre. Nous allons camper sur notre intégrité et mourir RDA".

Par Paul-Miki ROAMBA

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 12 octobre 2006 à 14:47 En réponse à : > Faramana : L’ADF/RDA exige la démission du maire

    L’attitude de ces conseillers démissionnaires s’apparente à un rapt de la décision et du choix du peuple de Faramana. Ils ont été élus sous la bannière A.D.F./R.D.A.. Ils devaient le rester jusqu’aux prochaines élections municipales et se présenter sous une autre bannière de leur choix. A quand la loi sur le "nomadisme politique" ?. La démocratie gagnerait en grandeur. Ange TAMPSOBA, France.

  • Le 12 octobre 2006 à 21:00, par Abdoult En réponse à : > Faramana : L’ADF/RDA exige la démission du maire

    Suite à l’article intitulé " Faramana : L’ADF/RDA exige la démission du maire", je voudrais réagir tout simplement en disant aux militants de ce parti qui ont la mémoire visiblement courte que si demissionner de son parti exige que l’on cède son siège d’élu, eux de l’ADF/RDA aurait dû en son temps prier Monsieur Celestin Koussoubé et les maires d’arrondissements de BOBO de rendre ceux qui ne leur appartenait pas avant de déposer leur bagage à l’ADF/RDA. On se souvient en effet que ces derniers tout juste avant les municipales avaient démissioner du CDP pour rallier le parti de l’éléphant qui les a accueilli à bras ouverts eux et leur siège. aujourd’hui qu’ils sont victimes à leur tour du départ du maire de Farmana , ils en font un problème . je pense que les partis doivent avoir le courage de poser véritablement le problème de ces migrations (choisies ?) au lieu de jouer un double jeu qui consiste à acueillir quand ça arrange et à rejeter quand ça arrange l’autre. ça ne fait pas honneur à notre démocratie.

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