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Crise ivoirienne : On ne change pas une équipe qui fait du surplace

Publié le jeudi 12 octobre 2006 à 07h39min

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Gbagbo et Banny

Encore des prolongations, pour ne pas dire le statu quo, à la cime de l’exécutif ivoirien. Un délai supplémentaire d’un an serait alloué, selon toute vraisemblance, à l’attelage Gbagbo-Banny pour faire aboutir le processus de désarmement, d’identification du corps électoral et de la tenue d’élections avant le 31 octobre 2007.

Ce serait là la proposition que les chefs d’Etat de la CEDEAO, réunis dernièrement en sommet extraordinaire à Abuja, auraient transmise à l’Union africaine.

Bien entendu, pour le moment, ces informations, bien que plausibles, ne sont que des rumeurs car émanant d’indiscrétions non encore confirmées par la CEDEAO ou l’Union africaine.

Mais si d’aventure elles se révélaient exactes -d’ailleurs personne n’en doute encore - ce serait alors une victoire pour Laurent Koudou Gbagbo et ses affidés, à commencer par l’inénarrable Pascal Affi N’Guessan, président du Front populaire ivoirien (FPI) au pouvoir.

Affi, comme l’appellent certains de ses proches, doit particulièrement se caresser le nombril, lui qui avait menacé de représailles, avec des mots à peine voilés, les ressortissants de la CEDEAO qui vivent sur la terre d’Eburnie, si jamais le sommet d’Abuja accouchait d’un bébé dont ne voudrait pas le FPI.

Est-ce cette menace qui a pesé dans la balance ? Pas si sûr car, à vrai dire, la situation étant bloquée depuis un certain temps en Côte d’Ivoire, les chefs d’Etat n’avaient pas d’autres choix que de maintenir l’enfant terrible de Mama à la magistrature suprême, au risque de faire dériver la Côte d’Ivoire tel un bateau ivre au-devant des grandes vagues et autres icebergs, sans aucune chance, sinon celle de se saborder, de voler en éclats. Et cela, la CEDEAO en a pleinement conscience.

Cette proposition est donc une pilule amère qu’il faudra faire avaler à l’opposition ivoirienne, notamment celle armée conduite par les Forces nouvelles (FN) de Guillaume Soro. Et pour que ça passe facilement, ladite pilule a été saupoudrée de sucre, à savoir le renforcement des pouvoirs du Premier ministre. Si fait qu’on présentera Gbagbo comme une sorte de reine d’Angleterre qui régnera sans gouverner.

On est tout de même curieux de savoir comment ce renforcement des pouvoirs va s’opérer. Car une chose est de prendre un édit conférant au chef du gouvernement la totalité des pouvoirs exécutifs, le contrôle de l’armée y compris, une autre est de traduire cela sur le terrain.

Le banquier Banny n’étant pas du sérail, ce n’est pas évident qu’il puisse avoir la main haute sur l’armée dont le chef d’état-major a récemment réaffirmé sa fidélité au président Gbagbo.

Du reste, ce ne sera pas facile pour le Premier ministre de soumettre « la grande muette » puisque, on l’oublie très souvent, la Côte d’Ivoire n’est plus, au sens noble du terme, une république où l’armée et les autres institutions se plient en quatre face aux lois et injonctions de la hiérarchie.

Ici, tout est devenu une affaire d’intérêts de clans et personne ne s’embarrasse de la nation qui, depuis, ne fait que trinquer.

En maintenant donc en place le tandem Gbagbo-Banny, les chefs d’Etat de la CEDEAO, quoi qu’on dise, ont certainement vu juste. Pour l’heure, c’est le moindre mal, vu qu’on ne pouvait pas, d’un « tour de Sommet », écarter des affaires le mari de Simone.

Ce qu’il faut faire désormais, c’est indiquer au tandem la direction à suivre, une feuille de route claire et nette avec les différentes escales répertoriées et dans lesquelles on fera le point des objectifs intermédiaires fixés jusqu’à la destination finale, la grande gare, théâtre de l’élection présidentielle tant attendue.

Les FN ont déjà expliqué en long et en large les raisons qui les ont poussées à se rebeller : l’éradication de la politique ségrégationniste basée sur l’ivoirité et la reconnaissance de la nationalité ivoirienne aux populations du Nord, victimes comme elles le sont souvent du délit de patronyme.

Tout règlement durable de cette crise passe nécessairement par une large satisfaction autant que possible des revendications des FN. Si cela est fait, le désarmement ne sera plus qu’un jeu d’enfant.

Parce qu’on imagine bien que les rebelles ne déposeront jamais les armes sans avoir obtenu au préalable ce pour quoi ils ont pris les armes. En effet, si au moment où l’on est armé on n’obtient pas gain de cause, ce n’est pas sans armes qu’on en bénéficiera.

C’est la voie indiquée de sortie de crise, tout autre chemin étant sans issue, qui ne fera que camper les forces en présence dans une logique de guerre ou même de partition du pays d’Houphouët. La question qu’on peut se poser est de savoir si ce procédé arrange le camp présidentiel. Pas si sûr ! Alors que faire ? Là est tout le problème.

En fin politicien, Gbagbo, qui n’est pas en odeur de sainteté avec le grand chef blanc, Jacques Chirac, joue sur le temps en espérant que dans les mois à venir le nouveau locataire de l’Elysée sera quelqu’un qui lui sera favorable.

Si tel est son calcul, il joue là à la roulette russe car nul ne peut dire avec certitude qui remplacera Chirac, le mari de Bernadette, à la présidence française.

S’il est une chose qui est par contre sûre c’est que, quel que soit le camp qui sortira vainqueur de cette longue crise ivoirienne, il lui faudra au moins une génération pour recoller les morceaux ô combien épars de la Côte d’Ivoire.

San Evariste Barro

L’Observateur

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Vos commentaires

  • Le 12 octobre 2006 à 09:42, par Le Burki En réponse à : > Crise ivoirienne : On ne change pas une équipe qui fait du surplace

    Merci à San Evariste Barro pour cet article dont l’analyse me paraît d’une grande objectivité. Rien à voir en tout cas avec certains écrits d’un autre confrère particulièrement aveuglé lorsqu’il s’agit de parler de la situation en Côte d’ivoire et qui s’en prend sans discernement Laurent Koudou Gbagbo. L’indépendance dont se revendique ce journal ne semble pas être vrai quand il s’agit des forces nouvelles de Soro.
    Je saisis l’occasion pour féliciter l’Obs qui à mon sens est resté très objectif dans ces écrits sur la situation en Côte !
    Prions pour que la situation revienne à la normale même s’il faut l’avouer, elle est encore fumeuse et tout le monde, à commencer par le peuple ivoirien est FATIGUE de cette guerre dont les seuls bénéficiares sont les GBAGBO, ADO, SORO et autres.....
    A bon entendeur !

    • Le 12 octobre 2006 à 22:48, par Burkinbi, KALMOGO En réponse à : > Crise ivoirienne : On ne change pas une équipe qui fait du surplace

      Je pense à mon humble avis que pour que cessent toutes ces tergiversations, il faut en finir avec le wody de Mama, Gbagbo, qui constitue l’ostacle majeur de la résolution de la crise ivoirienne. Et comme toi, Burki, tu le dis, TOUT LE MONDE est FATIGUE et il faut que ce BOULANGER cesse de rouler tout le monde dans la farine. Comme le match de football, on en est au deuxième et la dernière prolongation pour ce roublard. Et j’espère qu’en Octobre 2007,on ne parlera plus de crise en cote d’Ivoire pour le bonheur de tous !

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