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Relations diplomatiques franco-burkinabè :le bilan de Francis Blondet

Publié le jeudi 12 octobre 2006 à 07h42min

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Francis Blondet

Venu à Ouagadougou dans le cadre des échanges bilatérales entre le "Pays des hommes intègres" et son ancienne métropole (France), Son Excellence Francis Blondet, ambassadeur de France au Burkina est en fin de mission. Lors de la remise de tricycles aux handicapés moteurs à sa résidence le 26 septembre 2006, nous lui avons posé quelques questions sur les relations entre la France et le Burkina Faso.

Excellence, vous venez d’annoncer à nos autorités politiques, votre départ prochain de notre pays. Pouvez-vous nous établir un bilan succint des relations bilatérales franco-burkinabè au cours de votre mission de trois ans ?

• Je dirai d’abord que trois ans, ce n’est pas assez. Parce que pour des missions aussi vastes et variées que la mienne, il faudrait au moins quatre ou même cinq ans. C’est vrai que les fonctionnaires, les représentants des Etats et des chefs d’Etat doivent bouger, tourner. Je maîtrise bien sûr ce qu’on appelle le mouvement diplomatique. Le bilan, sur le plan des relations bilatérales, est qu’elles se sont considérablement rassérénées.

Je ne tiens aucun motif de gloire personnelle. Car je suis arrivé il y a trois ans, et au début il y avait une certaine incompréhension et même une certaine méfiance de part et d’autre. J’ai essayé de nouer le dialogue ici et en Côte d’Ivoire. Mais également sur d’autres terrains où on n’arrivait pas à se comprendre. Ce n’est pas que les crises ont disparu. Elles ont plutôt pris une autre forme. Et je crois qu’on a établi des parcelles de dialogue pour les étancher. C’est ce qui fait qu’aujourd’hui on se comprend et on a à peu près les mêmes objectifs.

Pour les relations bilatérales, elles pourraient être un peu plus nourries d’échanges. Mais néanmoins vous le savez bien, elles sont très riches. Il y a de multiples échanges. Il faut se dire que nos deux pays se connaissent très bien.

Excellence, quelle idée générale avez-vous eu du développement du Burkina Faso ?

• Votre pays, le Burkina Faso évolue lentement mais favorablement. Car les 50 millions d’euros que nous consacrons chaque année au développement de ce pays, doivent se traduire d’une façon ou d’une autre. En effet, il existe des domaines qui valent mieux que d’autres.

C’est normal parce que tout ne peut pas aller du coup. Dans l’ensemble, le Burkina Faso est un bon partenaire et on peut compter sur l’avenir. Une chose prévisible et rassurante et nous laisse penser que l’avenir sera plutôt bon pour le Burkina. Mais pour le moment, il y a des secteurs comme je le disais tantôt, qui n’avancent pas et même qui réculent.

Sur le plan judiciaire par exemple, et je crois que beaucoup seront d’avis avec moi, le Burkina Faso est en retard dans ces dernières années sous l’effet peut-être d’une gestion corporative (du corps des juges, des magistrats...). Peut-être aussi, parce que la volonté politique a manqué. On peut ainsi se justifier.

Mais il faut se dire qu’un pays où la croissance est prioritaire, lorsqu’il faut d’abord manger, s’habiller, se loger... on a comme l’impression que la justice est un luxe qui viendra plus tard. Je ne suis pas du tout de cet avis. Je pense comme beaucoup d’autres que c’est donc une justice qu’il faut construire dès à présent.

L’éducation est la pierre d’assise du développement de toute nation. Quelles sont les contributions que vous avez apportées dans ce domaine ? Et quels sont les projets en cours ?

• Je parlais tout de suite des tares de la justice. Mais le sentiment prioritaire dans la gestion d’une communauté de 13 millions d’habitants dont on est responsable, c’est de développer l’éducation. Les priorités s’affinent quand la conscience du citoyen est accessible. Et la conscience du citoyen vient du niveau d’éducation qu’il a atteint...

Je suis quand même content que nous Français, Européens et bailleurs de fonds en général, ayons investi une somme considérable dans le PDDEB (Plan décennal du développement de l’enseignement de base). C’est-à-dire que nous nous sommes engagés pour que dans dix ou vingt ans, l’éducation soit un acquis dans les sociétés burkinabè.

Et c’est plusieurs générations d’écoliers que nous allons bien sûr construire. Ce n’est pas à mon seul service ni à celui de mon successeur qu’on aura le résultat, mais dans vingt ans plus tard.

Il faut ajouter que le vrai investissement, ce n’est pas celui fait en fonction des richesses du sous-sol tel que le pétrole, mais plutôt pour une société d’individus éduqués. En ce qui concerne le niveau supérieur, la France offre aussi des bourses d’études soit une quarantaine ou cinquantaine par an.

Mais attention, nous offrons uniquement des bourses d’études pour le 3e cycle c’est-à-dire le niveau de la recherche. C’est surtout les étudiants qui ont terminé leurs études au Burkina Faso et veulent bien approfondir leurs connaissances, qui peuvent solliciter une bourse de recherche de doctorat en France.

Ils sont sélectionnés par une commission mixte (franco-burkinabè), et selon les critères qui correspondent aux besoins du Burkina Faso. C’est pourquoi la commission chargée de la sélection est mixte. Il y a l’Université de Ouagadougou, celle de Bobo et les représentants du ministère de l’Enseignement secondaire, supérieur et de la Recherche scientifique (MESSRS) qui nous aident à définir les secteurs dans lesquels l’université aura besoin de ces cerveaux.

C’est aussi en fonction des ressources disponibles. On ne peut pas non plus donner des bourses à des étudiants qui n’ont pas la certitude d’avoir un emploi à leur retour. Donc la précaution que nous prenons, c’est pour que les intéressés, après trois ans d’études, viennent trouver de l’emploi dans leur pays. Et qu’ils soient aussi utiles à leur pays.

Les nouveaux bacheliers ne peuvent pas avoir cette bourse. Excepté quelques-uns. Ce sont des bourses d’excellence. Ce sont surtout quelques bacheliers burkinabè du lycée Saint-Exupéry. Ce sont des Burkinabè, premiers de chaque section, qui ont cette bourse après leur baccalauréat.

En général, les bacheliers burkinabè ont un bon niveau car ils n’ont pas de difficultés à poursuivre leurs études en France. Et dès qu’ils finissent, ils retournent dans leur pays. C’est exactement ainsi que nous percevons les échanges entre la France et le Burkina Faso.

Entretien réalisé par Adama Barro,Stagiaire
L’Observateur Paalga

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