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Sénégal- Investiture d’Idrissa Seck au Rewmi : Wade a du souci à se faire

Publié le mercredi 4 octobre 2006 à 07h29min

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Seck et Wade

Ainsi donc Idrissa Seck "Idy" pour les Sénégalais s’apprête vraiment à essayer de commettre un parricide politique en février 2007 au Sénégal. Tout porte à le croire, puisque après avoir annoncé sa candidature à la présidentielle le 4 avril 2006, Idy a été investi le 2 octobre dernier président du parti REWMI, qui signifie en langue wolof "pays".

Et le fait même que l’ex-premier ministre sénégalais ait usé de contorsions politiques pour se faire adouber à la tête de REWMI est caractéristique des "carnivores" politiques, qui tant qu’ils n’ont pas assouvi leur faim n’abandonnent jamais la poursuite de la proie.

En effet, l’homme a profité du congrès du Front pour le progrès et la justice (FPJ), un parti, ironie de la politique, qui est membre de CAP 21, une coalition de formations de la mouvance présidentielle, pour non seulement changer la dénomination de ce parti et surtout en prendre la tête.

A cet effet, le scénario de ce grand "coup politique" a été bien orchestré. Dans un discours bien a propos, Insa Sankaré, le président du FPJ expliquera que le parti va changer de dénomination et que le maire de Thiès, Idrissa Seck, "figure incontournable de la politique sénégalaise est tout indiqué pour en être le premier responsable".

Le FPJ reconnu donc sous le récépissé n°11137/Minit./DAGAT/DAPS du 24 février 2003 se mue de ce fait en REWMI avec comme président un certain... Idrissa Seck. A vrai dire, si "l’ex-deuxième numéro un" du PDS, comme il aimait se désigner lui-même a usé de ce tour de passe-passe politique, ce qui est du reste de bonne guerre, c’est qu’il n’était pas évident de pouvoir créer légalement un parti.

En effet, politiquement rien n’était sûr pour qu’il puisse le faire et surtout administrativement l’obtention d’un récépissé allait s’avérer une équation insoluble pour l’ancien étudiant de l’Institut des études politiques de Paris et de l’université de Princeton aux USA.

Chaque jour que Dieu fait donc les choses se précisent dans la rivalité entre "NGorgui", le vieux Wade et son élève "NGorsi" le "petit". Huit mois après donc sa sortie de la prison de Rebeuss où il a passé 6 mois et 17 jours, Idy affiche une volonté inébranlable d’occuper en février 2007, le palais de l’avenue Roume, le siège de la présidence sénégalaise.

Donc sa foi, de battre Abdoulaye Wade, candidat à sa propre succession. Et pourtant que d’années de compagnonages entre les deux hommes, jusqu’au désamour puis à la séparation le 21 avril 2004 où Seck a été éjecté de la primature. Dans un numéro de l’émission "Le grand jury, RTL, le Monde, TV5" de mars 2006, Abdoulaye Wade déclarait : "Je ne veux pas blasphémer, c’est Dieu qui fait tout, mais c’est moi qui ai fabriqué Idrissa Seck, depuis son Bac, jusqu’à maintenant". Dans ces propos du pape du Sopi se trouve concentré tout le degré des rapports entre Wade et Seck.

Le premier a fait du second dès 1988 son directeur de campagne, puis quand vient la gloire en mars 2000, son directeur de cabinet (mars 2000 à novembre 2002) puis son Premier ministre (de 2002 à 2004). Ce parcours fulgurant a une seule explication : Son pygmalion politique avait une totale confiance en lui "Il connaît ma pensée. Je n’ai pas besoin de fournir de grandes explications pour qu’il comprenne ce que je veux dire... J’ai besoin de Seck à mes côtés... Je lui fais confiance... C’est mon fils" (1), affirmait Wade à l’époque.

C’est justement à partir de son poste de PM que commencent les bisbilles entre le père et le fils. Abdoulaye Wade soupçonnant son PM, de lui faire un bébé dans le dos, de comploter contre lui, de vouloir qu’il lui cède sa place, bref de vouloir être président de la République.

Ce qui n’est pas totalement faux, car Idy à partir de la primature a multiplié les actes de défiance, envers celui qui quoiqu’on dise est à la base de sa montée politique. Ainsi, s’est-il mis à nommer ses "gars" à certains postes, à ne plus écouter Wade, et à écarter certains lieutenants du président du sérail du PDS. Mieux on raconte qu’un jour Wade lui aurait confié qu’il pensait sérieusement se rétirer et qu’il pense à lui pour lui succéder. Cela a suffi pour que Seck se voit déjà trônant au palais Roume comme le 4e président du Sénégal.

On connaît la suite, accusé de "malversations dans l’affaire des chantiers de Thiès, il aurait détourné des milliards CFA et d’atteinte à la sûreté de l’Etat, "Mara" dimunitif de marabout, autre surnom de Seck, est embastillé, puis libéré.

La perspective que redoute le président-candidat Wade se configure depuis ce 2 octobre avec cet adoubement puisque "le moins mauvais de ses élèves" va vraissemblablement le défier aux prochaines élections en février.

Jean François Copé l’actuel ministre français délégué au Budget et porte-parole du gouvernement a dit : "La réalité même de la vie politique, c’est la concurrence" (2). Traduction : la rivalité est consubtentielle à la politique.

Quatre mois séparent les Sénégalais des élections générales (présidentielle et législatives) que déjà ces deux figures de proue de l’arène politique se guettent, s’épient et jouent chacun à faire peur à l’autre.

Wade reste le patron du PDS. Il a derrière lui plus de deux décennies de vie d’opposant. Il a toujours le bagout, et peut toujours enflamer des foules de sopistes. Il est également au pouvoir. En outre, malgré son âge, 80 ans, il reste "un cas pathologique de bonne santé" (3), son grand frère Moustapha Wade n’est-il pas toujours debout et pète lui aussi la forme.

Enfin sous Wade, l’économie a connu un bond malgré le recul de la filière arachidière. Seuls bémols à ce capital politique, c’est ce que d’aucuns appellent "la familialisation du pouvoir" avec la galaxie Wade constituée de ses enfants, neveux et autres parents qui gravitent autour du président.

Enfin, ses rapports conflictuels avec certains leaders politiques tels l’emprisonnement (encore) des Dias père et fils, et avec la presse n’arrange rien à cette course à sa succession.

Seck lui aussi a ses chances car incontestablement il va piocher dans le vivier du PDS, pour grossir les rangs de REWMI. Il semble s’être préparé toute la vie pour briguer la magistrature suprême. Ses handicaps à lui aussi sont connus : l’homme a une haute opinion de sa personne. Ne déclarait-il pas "je suis très riche, mais je défie quiconque de prouver que j’ai volé". Comprenez il ne nie pas qu’il n’a pas volé mais il n’y a pas de preuves.

En outre, il s’est fait de nombreux ennemis politiques car ayant été, alors qu’il était dircab de Wade à la base de la disgrâce de beaucoup de personnes qui ne manqueront pas de se rappeler à son mauvais souvenir.

N’empêche, il reste confiant à son étoile car "ne m’arrivera que ce que Allah aura prescrit" déclare-t-il. Mais c’est connu également Allah n’est pas obligé !

Z. Dieudonné Zoungrana

L’Observateur

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