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Anciens combattants : Au-delà de la pension, un devoir de mémoire

Publié le mardi 3 octobre 2006 à 08h35min

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(Ph. D. Bergounhoux)

Révalorisation de la pension des 84 000 anciens combattants par la France ! Après cette mesure financière, les politiques, historiens, réalisateurs de cinéma... doivent eux aussi veiller à travers leurs ouvres à rendre hommage aux anciens combattants plutôt que d’éviter d’en faire cas. Sinon cela ressemblerait bien à un oubli ou au mieux à une distorsion de l’histoire.

La France va aligner les pensions des anciens combattants de ses anciennes colonies à celles qui sont versées dans l’hexagone. Cela après 47 ans de gel. Cette revalorisation coûtera 110 millions d’euros au budget français par an et sera introduite par amendement gouvernemental au projet de loi de finances 2007 de la France.

Les anciens tirailleurs sénégalais et ceux d’Indochine...sont aujourd’hui partagés entre la joie d’une justice rétablie et l’angoisse de ne pas en jouir.
Les moins âgés ont maintenant autour de 60 ans et si l’on tient compte de l’espérance de vie en Afrique, il y a lieu de comprendre le temps qui leur reste à vivre. Le poids de l’injustice, ils l’ont supporté jour après jour et ce, depuis 1959 quand les pensions ont été « cristallisées » par décision du gouvernement de Charles de Gaulle après la décolonisation.

Les combattants autrefois français sur le champ de bataille et qui prenaient l’assaut au même titre que leurs frères d’armes de la métropole ont de ce fait « perdu » leur nationalité française. Ainsi, les vétérans d’Afrique et d’Asie touchaient 30% des sommes versées à leurs frères d’armes français, d’autant plus que la pension actuelle est calculée en fonction du niveau de vie du pays d’origine. Par conséquent, beaucoup d’anciens combattants surtout en Afrique croupissent sous le poids de la galère et d’autres en sont morts, la France dans le cour, la médaille en guise de consolation et la maigre pension comme le prix de la trahison. Et cela se « justifie ».

Car comme l’a si bien dit un ancien combattant, « l’assaut a été donné pour tous ; en ce moment, il n’y avait ni noir, ni jaune, ni blanc, il s’agissait de la liberté de la France ». Même si pour le président français « cette revalorisation, la France la doit à ces hommes qui ont payé le prix du sang et à leurs enfants et petits - enfants dont beaucoup sont français », le Premier ministre français a raison de déclarer que cette reconnaissance, l’Etat français a trop tardé à l’exprimer concrètement. Même si un rattrapage de 47 ans d’inégalité n’est cependant pas d’actualité, il y a lieu de saluer la réparation de l’injustice d’un gaulliste réparé par un autre gaulliste.

Cette mesure coïncide avec la sortie en France du film « Indigènes » qui aborde le rôle des soldats maghrébins engagés dans l’armée française durant la seconde guerre mondiale. Bien d’autres films du genre ont vu le jour pour attirer l’attention du monde soit sur la contribution des anciens combattants à la libération de la France ou sur la misère de ces derniers.

Au Burkina Faso, le film Tasuma de Sanou Kolo met l’accent sur la galère d’un ancien combattant. Ce dernier a du mal a touché sa pension à cause de la tracasserie administrative. Une vraie préoccupation qui interpelle déjà plus d’un. Car les anciens combattants déjà ayant du mal pour avoir leur pension n’auront-ils pas des difficultés pour toucher les nouvelles pensions ?

En tout cas, il faudra veiller à ce que des personnes malignes n’en fassent pas leur « deal ». La réparation financière annoncée est une justice partielle rendue aux vétérans. Reste maintenant la réparation historique. Des inquiétudes existent à ce niveau.

Très souvent des politiques, des historiens, des réalisateurs, des analystes ont à travers leurs discours, films, documentaires, commentaires, etc., passé sous silence le rôle des anciens combattants dans les deux guerres. Lorsque certains se décident à le faire, c’est juste une parenthèse.

C’est pourquoi la distorsion historique doit prendre fin. Personne n’a le droit de refuser les faits tels qu’ils se sont déroulés. L’humanité doit léguer à la postérité la vraie place de l’ancien combattant dans la marche du monde.

Hamadou TOURE (hatoure@yahoo.fr)


Des milliers de disparus

Le corps des tirailleurs sénégalais a été créé en 1857 par Louis Faidherbe, gouverneur général de l’Afrique de l’Ouest au temps colonial.

En 1914, on comptait 14 000 tirailleurs sénégalais en Afrique de l’Ouest et 15 000 à l’extérieur principalement au Maghreb. En octobre 1915 près de 30 000 nouveaux conscrits et volontaires renforcent les troupes en France. Un décret du 9 octobre 1915 ordonne la mobilisation des Africains de plus de 18 ans. 51 000 Africains supplémentaires sont recrutés en 1916.

En 1917, dix-sept bataillons de tirailleurs sont engagés et 120 000 Africains servent dans les forces françaises. Des 212 000 Africains qui ont servi pendant la 1re guerre mondiale, 163 000 étaient en France et 30 000 y moururent. Le taux de mortalité des tirailleurs était de 185 pour mille. Au total 520 000 Africains ont été mobilisés lors des deux guerres mondiales.

En France à Chasselay près de Lyon reposent dans l’anonymat environ 200 tirailleurs du 25 RTS (le nom de leur régiment) depuis le massacre du 19 juin 1940 où 850 autres ont été brûlés ou ensevelis. C’est par refus de les oublier comme tous les autres combattants des deux guerres que le Sénégal a commémoré le 23 août 2004 le rôle et le sacrifice de ces vaillants soldats ayant combattu pour la France.

H. T

Sidwaya

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