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Rentrée judiciaire 2006-2007 : Aplanir les conflits de compétence entre institutions

Publié le mardi 3 octobre 2006 à 08h54min

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La rentrée judiciaire 2006-2007 a eu lieu le 2 octobre 2006 à la salle d’audience du Tribunal de grande instance de Ouagadougou sous le thème : « Des conflits de compétence entre les institutions judiciaires et d’autres institutions au Burkina Faso ».

C’était en présence du président du Conseil supérieur de la magistrature du pays, Blaise Compaoré, président du Faso.

La justice burkinabè a repris du service pour l’année judiciaire 2006-2007. Une reprise qui marque en même temps la clôture de l’année judiciaire 2005-2006. Les deux événements se sont déroulés dans la matinée d’hier 02 octobre 2006 au cours d’une audience solennelle, comme le veulent les textes réglementaires.

En effet, la rentrée des juridictions est, selon le statut de la magistrature, fixée à chaque 1er octobre de l’année. Et lorsque cette date coïncide avec un jour férié, comme c’est le cas actuellement (le 1er octobre a coïncidé avec un dimanche), la rentrée est renvoyée au jour ouvrable suivant. A l’audience, le président de séance était le premier président du Conseil d’Etat, Mme Haridiata Dakouré.

Elle avait à ses côtés son collègue de la Cour de cassation M. Cheick D. Ouédraogo et celui de la Cour des comptes, Boureima Pierre Nébié. La Cour s’étant installée quelques minutes après l’arrivée du président du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), le président du Faso Blaise Compaoré, les choses peuvent commencer.

La parole est donnée à un conseiller de la Cour de cassation, M. Barthélemy Sinini notamment, pour lire le rapport diagnostiquant le thème de la présente rentrée judiciaire : « Des conflits de compétence entre les institutions judiciaires et d’autres institutions au Burkina Faso ». Ce thème qui, a priori, suscite des doutes quant à sa pertinence, pose un problème réel, affirmera la présidente de séance Haridiata Dakouré.

L’Etat des lieux des conflits de compétence

Une affirmation qui trouve toute sa confirmation dans le rapport lu par M. Sinini. Il ressort en effet que différentes juridictions peuvent se retrouver à traiter des mêmes questions. Mieux, des institutions judiciaires partagent parfois le même terrain que d’autres institutions du pays, sans que, relève le rapport, les règles du jeu ne soient clairement définies.

Toute chose qui donne lieu à des conflits de compétence, entravant sérieusement la bonne collaboration et le bon fonctionnement des institutions de l’Etat. La Cour de cassation par exemple a parfois des conflits avec le Conseil d’Etat dans l’application de certaines dispositions du code de travail. De même, laisse transparaître le rapport, la Cour ne perçoit pas toujours l’effectivité de la complicité qui devrait exister entre elle et les structures de l’Etat en charge de la promotion de la bonne gouvernance.

Dans ce sens, le vœu a été émis pour que la Haute autorité de coordination de la lutte contre la corruption (HACLC) puisse dénoncer auprès de la Cour de cassation ou du Procureur général les cas de corruption qu’elle décèlera dans l’accomplissement de sa mission. Ainsi, une suite judiciaire pourra être donnée aux conclusions de la HACLC. Par ailleurs, le Conseil d’Etat n’est pas mieux loti.

L’institution, de par ses prérogatives devait donner son avis sur les projets de décret au Burkina Faso. Une consultation qui, défendra le commissaire du gouvernement à l’audience M. Boniface N. Djiguemdé, permettra d’éviter de nombreux contentieux nés de l’application de certains décrets. Mais le constat est que le Conseil d’Etat est rarement consulté, témoigne le rapport.

Ce qui a fait dire au commissaire du gouvernement Djiguemdé « qu’au Burkina Faso, on préfère la bagarre à la prévention ». Outre ce sentiment d’être négligé, le Conseil d’Etat est parfois à « couteaux tirés » avec le Conseil constitutionnel dans la gestion des élections, surtout celles locales. Laquelle des deux institutions doit proclamer les résultats définitifs ou trancher des contentieux électoraux.

Les textes sont on ne peut plus clairs sur ces questions, dit le rapport. Néanmoins, le commissaire du gouvernement dans sa réquisition n’a pas manqué de proposition : « Ou bien on confie toutes les matières électorales à une seule institution ou encore confier les élections nationales au Conseil constitutionnel et celles locales au Conseil d’Etat ».

D’un autre côté, la Cour des comptes chargée du contrôle des finances publiques et l’Inspection générale d’Etat ont des compétences similaires, a diagnostiqué le rapport. Cela peut être source de conflits de compétence. Face à ces difficultés de fonctionnement des institutions judiciaires entre elles d’une part, avec les autres institutions d’autre part, les magistrats ont estimé imminente la mise en place du Tribunal des conflits. Ils ont également demandé la relecture des textes mis en cause pour aplanir au maximum les interférences fâcheuses entre les institutions. Car, comme l’a rappelé la présidente de séance Haridiata Dakouré, la Justice a besoin d’un cadre réglementaire concis, précis,...

En réponse, le ministre de la Justice garde des Sceaux, Boureima Badini en sa qualité de vice-président du CSM a expliqué la complexité de la répartition des compétences dans le système judiciaire. Les textes, a-t-il indiqué, n’ont pas pour but de susciter la concurrence entre les institutions, mais de favoriser la complémentarité entre elles dans l’optique d’une plus grande efficacité.

Il a pris acte des propositions et promis de les examiner avec le sérieux qui sied. Toutefois, Boureima Badini a fait comprendre qu’il était nécessaire de « laisser le temps aux institutions de s’institutionnaliser », avant d’envisager les réformes. Le Conseil d’Etat, la Cour de cassation, la Cour des comptes et le Conseil constitutionnel sont nés seulement en 2000 suite à l’éclatement de la Cour suprême.

En marge du débat sur les conflits de compétence, le ministre Badini, au nom du président du CSM, Blaise Compaoré, a félicité et encouragé tous les acteurs de la Justice. Il a rappelé les qualités dont ils doivent faire preuve : écoute, conscience professionnelle,... Et pour sa part, a-t-il rassuré, l’Etat ne ménagera aucun effort pour accompagner la marche vers une justice d’égalité au Burkina Faso.

Koumia Alassane KARAMA (karamalass@yahoo.fr)


Les commentaires de Blaise Compaoré

« Comme des acteurs judiciaires viennent de le dire, il y a effectivement une situation de conflit entre des institutions. Cela est dû en partie à leur jeunesse et à celle de notre Constitution. Au fil de la consolidation du caractère républicain de nos institutions, ces problèmes relèveront du passé. L’essentiel aujourd’hui, c’est d’avoir posé le problème.

Une commission technique et juridique va travailler à voir ce qui peut être fait pour corriger les imperfections. Nous sommes venus encourager et féliciter les services judiciaires pour le travail difficile et sensible qu’ils abattent. Avec davantage d’écoute, nous allons pouvoir aider ces services ».

K.A.K

Sidwaya

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