LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Soyez un repère de qualité. Certaines personnes ne sont pas habituées à un environnement où on s’attend à l’excellence.” Steve jobs

Baba HAMA, Délégué général du FESPACO : “Pour les salles de projection, aucun souci pour le prochain FESPACO”

Publié le jeudi 21 septembre 2006 à 08h10min

PARTAGER :                          

Baba Hama

Le FESPACO 2007, dans quelques mois donc, va coïncider avec la 20e édition, ce qui est considéré comme la plus grande messe du cinéma africain. N’est-ce pas pourquoi l’organisation a commencé à mettre les petits plats dans les grands pour que l’événement soit marqué d’une pierre blanche ?

Le thème « cinéma africain et diversité culturelle » situe déjà sur les enjeux et le grand tournant que doit prendre le FESPACO. Ainsi nous avons rencontré Baba HAMA, le DG autour des préparatifs et sur les grands problèmes du cinéma africain.

On dit que vous avez hiberné juste après le FESPACO 2005, un long temps de repos, n’est-ce pas ?

Baba HAMA (BH) : Si seulement on pouvait avoir cette joie ! Il faut savoir que la fin d’une édition du FESPACO annonce automatiquement les préparatifs de l’édition suivante. Il n’y a donc aucun temps de repos chez nous au FESPACO.

Comment se prépare alors le FESPACO 2007 ?

BH : L’organisation d’une manifestation comme le FESPACO comporte deux aspects. Le premier consiste à réfléchir et à définir le contenu de la manifestation, notamment les activités à inscrire au programme. Le deuxième aspect est l’organisation pratique, et cette phase se déroule généralement à quelque quatre mois du début de la manifestation.

Vous êtes donc à la première phase ?

BH : La première phase est pratiquement bouclée ; nous pouvons aujourd’hui dire que le programme général de la manifestation va s’articuler autour de quatre grands volets. Le premier volet, qui fait l’ossature de tout festival c’est bien sûr celui de « la compétition ». Le deuxième est celui qu’on appelle « Découverte », c’est l’ensemble des sections qui permettent de montrer d’autres types de cinémas. Le troisième est le marché du film, le « MICA » qui sera à sa 13e édition. Le quatrième volet est ce qu’on nomme « les Rencontres professionnelles ».

Peut-on avoir quelques détails sur ces différents volets ?

BH : Au niveau de la première section, « la compétition », l’une des innovations pour la 20e édition sera la compétition consacrée aux films documentaires.
Nous souhaitons donner plus de valeur aux documentaires à la demande des professionnels et aussi c’est un genre qui commence à prendre de plus en plus de l’importance. De plus en plus les professionnels se tournent vers le documentaire qui a été pendant longtemps l’affaire des producteurs et réalisateurs de télévision.

La particularité du volet « Découverte » va résider dans les focus ou rétrospectives. Cela va permettre de mettre en valeur un certain type de cinématographie. En nous collant à l’édition, la 20e du genre, un chiffre qui mérite une halte pour regarder dans le rétroviseur afin de mieux rebondir.

Ainsi on fera une rétrospective sur le cinéma malien. Pour la simple et bonne raison que c’est le cinéma malien qui bat le record en matière d’obtention de l’Etalon de Yennenga. Souleymane CISSE a remporté deux Etalons, et Cheick Oumar SISSOKO un Etalon.
On fera un focus sur le cinéma marocain qui aujourd’hui présente un certain nombre de facettes intéressantes pour le cinéma africain. L’industrie cinématographique marocaine est en plein essor.

Il nous est revenu que l’ambition du Maroc dans les prochaines années est de produire entre 30 et 40 films par an. C’est donc une expérience qui mérite d’être partagée, au moment où dans les autres pays du continent il y a une certaine morosité due à des contraintes d’ordre financier, ou administratif ou bien même organisationnel.

Au MICA, il y aura les activités classiques d’exposition de visionnement, nous avons pensé aussi organiser avec des partenaires une thématique autour de la musique de film. Car qui dit marché, dit commercialisation, ainsi avec toutes les opérations qui peuvent être faites pour la commercialisation d’un film, la musique joue un rôle très important.

De ce fait, la thématique pose les questions sur le rôle de la musique dans les films, quelle collaboration ou coopération possible entre les cinéastes et les musiciens ? Sur le plan « Rencontres professionnelles », le colloque fera le point focal comme d’habitude avec le thème « Cinéma africain et diversité culturelle ».

Quelles sont les raisons motivant le choix de ce thème ?

BH : Nous avons choisi ce thème pour son actualité et aussi parce qu’au-delà des différentes signatures de conventions comme celle de l’UNESCO, il s’agit pour nous de nous interroger sur comment exister dans cette diversité, par quels moyens exister ?

Et ce que nous devons y apporter. La diversité culturelle est une reconnaissance implicite de la mondialisation. Il ne faut donc pas que nous restions les éternels consommateurs, il nous faut aussi offrir quelque chose au reste du monde. C’est dans ce sens que le colloque va faire des réflexions sur la production, la distribution, l’exploitation et aussi sur les moyens de production. Le colloque va révisiter tout ce qui constitue aujourd’hui un goulot d’étranglement pour l’épanouissement du cinéma africain.

Que dites-vous sur l’émergence de cette nouvelle forme de cinéma très proche du public que font Boubacar DIALLO « J.J » et Sidnaba ?

BH : Nous y avons pensé. Il y aura une rencontre de toutes sortes de panel autour du thème « Cinéma d’auteur et cinéma populaire ». Il est nécessaire de réfléchir sur les voies et moyens, de créer l’adhésion entre le public et le cinéma africain. Sans devancer les conclusions du panel, nous pensons qu’il y a de la place pour les deux types de cinémas.
Autant il faut le cinéma d’auteur qui fait la force des festivals pour son côté recherche, esthétique ; autant il faut le cinéma populaire car on fait les films pour le public. L’industrie cinématographique qui fait référence au marché, appelle forcément le public.
Il est donc important de voir les ressorts qui fonctionnent au niveau du public.

Ici au Faso, on a de plus en plus de jeunes réalisateurs comme Boubacar DIALLO et Sidnaba qui s’essayent avec bonheur dans le cinéma populaire. Il faut mener la réflexion sur ce thème parce qu’il y a de la place pour tout le monde pour aboutir au fait qu’il n’y a pas un cinéma avec grand « C » et un autre avec un petit « c ».
C’est pour cela qu’à côté du panel sur le cinéma d’auteur et le cinéma populaire, nous avons fait une section pour les films d’école.

Dans cette section, seront programmées les productions sorties tout droit des écoles de formation en cinéma sur le continent africain.

Pour nous c’est une manière pour le FESPACO d’encourager la formation, les cinéastes en herbe. C’est une section sans compétition, nous y voyons plutôt l’aspect didactique.
Dans le même prolongement, il y aura les « masters class », un regroupement des jeunes cinéastes, des amateurs aspirant au métier de cinéastes, et même des cinéphiles qui feront des discussions avec les professionnels pour mieux s’imprégner des ficelles du métier. A l’occasion de ce 20e FESPACO, nous voulons attirer l’attention sur la nécessité d’assurer la relève.

Le cinéma marocain aura une « grande fenêtre » au FESPACO, alors qu’on dit que le réalisateur marocain Etalon de Yennenga en 2003 avec son film « Ali Zaoua » a snobé le FESPACO, il n’était pas à la remise des prix même après ?

BH : Le réalisateur de « Ali Zaoua » n’a jamais snobé le FESPACO. Il n’était pas à la remise des prix parce qu’il y a eu des perturbations dans les vols. Nous avons eu d’énormes problèmes pour faire venir des professionnels de Paris. C’est un concours de circonstances qui ne lui a pas permis d’être présent à Ouagadougou. Après le FESPACO, nous ne reconduisons pas les invitations.

Y’aura-t-il dans le panel cinéma et musique un volet promotion des artistes musiciens avec de grands cinéastes qui leur feront des clips comme cela se fait aux USA ?

BH : C’est un aspect qui fait ressortir des débats, même si à notre niveau nous avions pensé sur l’apport de la musique dans la construction des films et dans leur promotion.

De plus en plus, là où il y a de véritables industries, des musiques de film assurent la carrière du film. Une des questions fondamentales du cinéma africain est liée à sa promotion. Il est indéniable que les réalisateurs peuvent apporter un plus aux musiciens avec des clips. Mais il faut reconnaître qu’en Afrique le problème se pose autrement, j’ai l’impression que les vedettes de la chanson en Afrique ont un peu plus de notoriété et des facilités que n’ont pas toujours les cinéastes.

Dans cette logique, un film africain qui porterait la signature d’une vedette internationale de la musique africaine aura plus de chance que l’inverse.

Le FESPACO vient au moment où il y a de sérieux problèmes de salles de ciné à Ouagadougou, cela ne va-t-il pas perturber la manifestation ?

BH : Il n’y a pas longtemps de cela la ministre de la Culture, et son collègue de l’Emploi ont visité les salles de ciné et ces autorités ont clairement dit que cette visite s’inscrivait dans le cadre d’une politique gouvernementale visant à mettre en état le « Ciné Burkina » et le « Ciné Sanyon » de Bobo. En termes de parc de salle, seul le « Ciné Rialé » fera défaut au prochain FESPACO, ce manque sera comblé par la salle du CENASA qui sera équipée d’une cabine 35 mm et vidéo. Il n’y a donc aucun souci à se faire pour le prochain FESPACO sur le plan des salles de projection.

Le cinéma africain a des difficultés financières énormes, qu’en est-il du FESPACO ?

BH : Les difficultés financières du cinéma africain n’épargnent pas totalement le FESPACO. Seulement le FESPACO avec sa longue expérience a su se créer un engagement au niveau des partenaires qui le soutiennent.

Le FESPACO passé a été perturbé à l’ouverture par des accidents graves au stade, quelles sont les précautions qui seront prises pour que la 20e édition ne puisse pas faire couler du sang mais de la joie ?

BH : Ce qui s’est passé à l’ouverture du FESPACO passé nous a attristé énormément. C’est pourquoi toutes les mesures de sécurité seront prises pour qu’au prochain FESPACO, une telle chose ne se reproduise pas. Au risque de créer quelques grognements et des grincements de dents, la sécurité veillera au grain pour éviter tout accident.

Avec la sécheresse dans les productions au Faso, ne va-t-on pas organiser le 20e FESPACO sans film burkinabè ?
BH : Je ne le crois pas, il y a des films en tournage avec Issa TRAORE, de Brahima et Tahirou OUEDRAOGO, je pense que ces films seront dans le temps pour représenter le Burkina en compétition officielle.

Interview réalisée Par Issa SANOGO

L’Opinion

P.-S.

Voir le site du FESPACO :
http://www.fespaco.bf/

PARTAGER :                              
 LeFaso TV