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Moussa Michel Tapsoba, président de la CENI : “La reprise des municipales à Pô pose problème”

Publié le mardi 19 septembre 2006 à 08h14min

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Moussa Michel Tapsoba

En attendant que la nouvelle équipe de la CENI prête officiellement serment le 27 septembre prochain, l’ancien et nouveau président de la CENI évoque des sujets relatifs à son institution.

Moussa Michel Tapsoba affirme faire face à un problème juridique dans la reprise des élections de Pô, évoque la question de la révision du fichier électoral et revient sur la polémique qui a marqué sa réélection.

S. : Quelles innovations majeures la CENI nouvellement constituée entend-elle apporter au système électoral burkinabé ?

M.M.T : Le travail à la CENI est une activité collective. Une nouvelle équipe vient d’être mise en place mais elle n’a pas encore pris officiellement fonction. Car comme vous le savez c’est seulement après avoir prêté serment conformément à la loi que cette équipe prend effectivement fonction.

Il appartient à l’équipe nouvelle, le moment venu de définir ses priorités et également ses méthodes de travail pour atteindre l’objectif qui ne change pas et qui est de conduire des élections libres et crédibles au Burkina Faso.

S. : Quelle est votre réaction après le vœu de suppression de la CENI formulé par Toussaint Abel Coulibaly, président du groupe parlementaire de la Confédération des forces républicaines (CFR) ?

M.M.T : Je n’ai pas de réaction particulière, je pense que c’est un groupe parlementaire qui a fait ses analyses et a abouti à ses conclusions quand bien même en lisant de près, on se rend compte que l’analyse aussi a abouti au fait que nous ne sommes pas encore prêts pour faire autrement.

S. : Que signifie ne pas être prêt ?

M.M.T : Je voudrais dire, confier les élections à l’administration. D’ailleurs le groupe parlementaire de la CFR reconnaît lui-même que pour le moment les choses ne sont pas encore au point au niveau de l’administration pour une telle démarche.

De façon générale, en matière électorale, les problèmes des pays en voie de développement viennent surtout du fait qu’il y a un besoin répété de vouloir imiter l’Occident, plus précisément notre ancien tuteur, la France. Il n’y a pas un effort d’immagination pour trouver des solutions à nos problèmes.

Mais à travers la CENI, les Burkinabè ont imaginé quelque chose de tout à fait original pour pouvoir faire face aux besoins de notre processus national de démocratisation.

D’autant plus que, si la démocratie n’est plus à inventer, je crois très sincèrement que les méthodes pour y parvenir doivent faire l’objet d’adaptation et d’immagination en fonction des contextes de chaque peuple.

S. : Comment avez-vous, avec le recul, apprécié l’attitude de vos adversaires de la société civile, dans sa composante droits humains, lors de la désignation de son représentant à la CENI ?

M.M.T : Lors du processus de remodèlement des composantes de la CENI, la société civile s’est retrouvée dans une situation d’amateurisme. Dès lors que la polémique s’est calmée et que chacun a eu tout le temps de dire tout ce qu’il avait sur le cœur, je voudrais simplement qu’on tourne la page « à cette querelle », pour ne plus y revenir. A l’époque, je ne pouvais pas participer aux débats pour plusieurs raisons. La rencontre du ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation (MATD) avec les partis politiques et les organisations de la société civile avait eu lieu le 09 août.

Moi j’étais en mission en République démocratique du Congo d’où je suis revenu le 07 août dans la nuit, et c’est le 08 août dans la matinée que j’ai appris au bureau qu’il y avait cette rencontre le lendemain. J’avais tellement d’instances que matériellement je ne pouvais plus participer à cette rencontre, si bien que les critères qui ont été dressés et le choix des organisateurs de ce mini scrutin si on peut l’appeler ainsi, je n’ai pas pu y participer et je n’ai pas donc été partie prenante. On m’a également donné l’information selon laquelle à l’issue de la rencontre du 09 août, les organisations de la société civile devaient désigner leurs représentants le 12 août, pour communication le lundi 14 août 2006 au MATD.

Et j’ai constaté, sans pouvoir me l’expliquer jusqu’à présent, que j’ai bénéficié de suffrages que je n’ai pas vraiment mobilisés. Mais on ne refuse pas bien sûr les suffrages : Je ne saurais vous dire ce qui s’est passé entre temps entre les différentes organisations.

S. : Quelle sera la particularité de la relecture du fichier électoral ?

M.M.T : Il y aura une révision exceptionnelle des listes électorales pour recueillir les noms de tous ceux qui ne figurent pas encore dans le fichier et dont l’âge leur permet d’y être. Cela va faire l’objet d’un travail d’informatisation mais aussi de confrontation avec le fichier existant pour que des insuffisances puissent être supprimées.

L’amélioration du fichier est un travail permanent et nous allons requérir les compétences nécessaires au niveau des partis politiques pour concevoir un fichier plus performant chaque fois que des élections s’imposent.

S. : Est-ce que toute cette controverse autour du code électoral et surtout du fichier électoral n’entame pas la crédibilité de la CENI ?

M.M.T : Pas du tout, puisque de toutes les façons la crédibilité de la CENI n’est pas fonction de la qualité du fichier. Le fichier requiert un travail technique et nous avons fait appel à des techniciens nationaux y compris ceux de la CENI et à une expertise étrangère.

C’est un travail à perfectionner. C’est comme si vous me demandiez si la controverse n’entache pas la crédibilité de la démocratie burkinabè. Je ne crois pas ... C’est une recherche permanente de crédibilité que nous faisons pour le fichier, pour la démocratie et pour la CENI.

En tout cas, la qualité de la structure ou de la démocratie n’est pas tellement liée à celle du fichier qui est une œuvre que l’on doit perfectionner chaque jour.

S. : En quoi consistera concrètement les préparatifs de la réorganisation électorale de Pô et le scrutin des députés en 2007 par la nouvelle équipe ?

M.M.T. : Le nouveau bureau n’est pas encore opérationnel juridiquement parlant. Et les réflexions qui sont en ce moment menées se passent avec l’ancienne équipe dont le mandat n’est pas encore achevé puisqu’il prend fin le 27 septembre prochain. Nous sommes déjà dans la réflexion sur le rapport de ces élections.

La CENI fait d’ailleurs face à un problème juridique en ce qui concerne Pô. Conformément à la loi portant sur les collectivités, il est dit que dans de pareilles situations, la reprise doit avoir lieu dans les deux mois qui suivent la dissolution du conseil municipal. Or le code électoral exige que les candidatures pour une élection soient déposées également deux mois avant le scrutin, c’est-à-dire le jour même de la dissolution du conseil. Ce qui n’est pas matériellement possible. Nous avons pris langue avec le MATD pour trouver une solution à cette situation.

S. : A quoi est dû cet état d’esprit des uns et des autres ?

M.M.T. : Il y a la critique qui revient très souvent que la CENI ne communique pas assez ou le fait mal. Je crois que c’est réel pour une bonne partie mais il y a également des moments où il faut partager les responsabilités. Quand nous organisons des rencontres avec les partis politiques, malheureusement ils nous envoient des représentants (peut-être des cadres qui sont choisis par ces partis pour ce genre de rencontres) qui ne font pas le relais après. En effet, nous avons constaté que quand nous rencontrons les responsables mêmes des partis politiques à certaines occasions il y a des questions auxquelles nous avons pourtant déjà trouvé des réponses lors de nos rencontres précédantes qui reviennent.

Cela veut dire qu’il n’y a pas de feed back entre ceux qui viennent à nos réunions et les premiers responsables des partis politiques. Cette situation donne l’impression que c’est la CENI qui ne communique pas bien ou assez alors que dans les partis politiques aussi, l’information ne circule pas toujours comme il se doit. Donc c’est un peu cela que nous appelons les incompréhensions que nous voudrions améliorer. Autrement dit, il faut que les représentants des partis politiques de retour d’une mission après une rencontre avec la CENI se fassent le devoir de faire un compte rendu fidèle à ceux qui les ont mandatés à cet effet.

En outre, si le temps le permet, il est bon pour nous d’avoir accès aux premiers responsables des partis politiques parce qu’en ce moment, les débats qui peuvent s’en suivre sont d’abord d’une autre qualité et également il y a réciproquement les informations de première main.

S. : Trouvez-vous normal que l’on sache s’acquitter de son devoir civique au Burkina tout en ignorant ce que c’est que la CENI ?

M.M.T. : Je pense effectivement que ce n’est pas nécessaire pour les Burkinabè de savoir ce que c’est que la CENI.

Par ailleurs ils ont besoin que les élections se passent bien, sans difficulté, que l’on ne manque pas de trouver son nom quand on va pour voter sans chercher à savoir qui a organisé. Cela n’a pas d’importance, pourvu que la structure qui organise les élections fasse en sorte que les citoyens soient en mesure de voter s’ils ont a envie de voter. L’important pour tout le monde est de pouvoir dire au final que les élections se sont bien déroulées même si on ne sait pas qui les a organisées.

S. : Que promet le président réélu de la CENI à ses votants, ses adversaires et aux citoyens Burkinabè pour les cinq ans à venir ?

M.M.T. : A titre personnel je ne peux rien promettre. Mais avec la nouvelle équipe qui va prendre fonction bientôt, je crois que nous pouvons simplement dire que les Burkinabè peuvent compter sur nous afin que nous donnions le meilleur de nos énergies, de notre intelligence pour le travail qui nous a été confié. Nous laisserons toujours le soin aux Burkinabè d’apprécier.

S. : Sous quel signe placez-vous votre nouveau mandat quinquennal ?

M.M.T. : Je voudrais simplement dire que les Burkinabè qui seront forcément et légitiment plus exigeants soient satisfaits c’est-à-dire que le nouveau mandat doit être plus brillant que le précédent. Si le président de la CENI n’est qu’un porte-parole, j’ai besoin alors du sentiment des autres. Lequel sentiment ne peut pas s’exprimer aujourd’hui 16 septembre (NDLR : ou de la réalisation de l’interview) puisque la loi ne leur a pas encore donné le droit de parler. Quand nous aurons prêté serment et que nous nous serons assis pour tracer les grandes lignes de notre action, le président de la CENI pourrait être beaucoup plus précis. Par ailleurs, je voudrais remercier Sidwaya qui nous a souvent tendu le micro pour nous permettre de communiquer avec les Burkinabè.

Comme vous le savez, en dehors des médias nous n’avons aucun moyen de communiquer avec les électeurs et les électrices burkinabè, alors que nous assumons des tâches qui les concernent et il y a un besoin régulier de communiquer.

Interview réalisée par Abdoul Rasmané ZONGO
(Stagiaire)

Sidwaya

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