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Emeutes du casque : Ça n’a pas été qu’une simple réaction

Publié le jeudi 14 septembre 2006 à 07h38min

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Le port obligatoire du casque avec la manifestation de rue qui s’en est suivie le vendredi 1er septembre 2006, a donné l’occasion au président du PNR/JV de tirer à boulets rouges sur le pouvoir de la IVe République. L’élection du 13 novembre 2005, le train de vie de l’Etat, la vie chère et les récents événements liés au casque que l’auteur de l’écrit qualifie de simple réaction du peuple, tout est passé au crible.

Le Burkina est à une phase critique de son évolution politique et sociale. Face au peuple, un pouvoir arrogant et de plus en plus dangereux parce que grisé par ses succès savamment fabriqués (élu par 80% de 1 500 000 Burkinabé !) à l’élection présidentielle du 13 novembre 2005 et aux municipales calamiteuses du 23 avril 2006.

Voilà pourquoi nous contestons et contesterons la légitimité de Blaise Compaoré. Voilà pourquoi tous les démocrates devraient contester sa légitimité car elle n’a aucune assise populaire. Il ne travaille que pour plaire à ses maîtres français et aux bailleurs de fonds, et se satisfait de l’adhésion d’une minorité. Les autres, la majorité, tant pis !

Qu’ils survivent ou meurent. Quant à l’opposition, dont c’est le rôle principal d’être le thermomètre de l’état de santé de la démocratie qu’elle équilibre et régule, elle est à la limite complice.

Nous en voulons pour preuves l’incurie d’éminents intellectuels qui se font financer et noyauter par le pouvoir pour, croient-ils, devenir de bons opposants, ou la déculottée mémorable que l’histoire retiendra d’un chef de file de l’opposition qui va rejoindre celui à qui il est censé s’opposer, avec armes et bagages et sans contrepartie, ou la pitoyable bataille de chiffonniers à laquelle s’est livrée l’opposition pour prendre des postes de perdiem et de compromission à la CENI, ou encore la satisfaction et la fierté que nos grands opposants semblent tirer des fessées électorales qu’on leur a infligées, pour reprendre les propres termes d’un poids lourd du CDP commentant à chaud les résultats de la dernière présidentielle.

Une situation qui devait inviter à la mobilisation

Malgré les sondages tendancieux du CGD, nous soutenons que Blaise Compaoré et son CDP sont impopulaires, et nous en voulons pour preuve, la valeur numérique du corps électoral qui a déterminé le sort de ce régime. Pour ce faire, invitons les lecteurs et tous ceux qui s’intéressent à la vie publique à porter leurs réflexions sur le processus, qui a conduit à sa reconduction à la tête de l’Etat.

En effet, la cause était entendue depuis que Blaise Compaoré a annoncé qu’il écouterait les "sollicitations" de son peuple pour se déterminer et depuis que ses stratèges, par courtisans interposés, ont monopolisé tous les médias d’Etat pour lui faire briguer un troisième mandat anticonstitutionnel, boostés en cela par la seule alternative : la prison en cas d’alternance que lui prédisait le fameux mémorandum de l’opposition, document rendu public en 2004.

Flairant le danger d’un tel mémorandum, (le PNR/JV s’est désolidarisé du mouvement qui l’a conçu), la machine électorale du Président candidat s’est mise en marche, durant tout ce temps, le CDP et ses satellites de l’AMP, les ABC, les tanties, les tontons de Blaise Compaoré et autres se sont mis au recrutement des électeurs et malgré les moyens mis, le battage médiatique, les pressions de toutes sortes, la moisson à été bien maigre, rien que 3 800 000 électeurs se sont inscrits sur une population de plus de 13 millions d’individus, avec un potentiel d’électeurs d’environ 9 millions.

Cela nous conforte dans notre analyse que le régime est vraiment impopulaire. Son Zorro, présenté sur les affiches publicitaires en cow-boy avec chapeau et deux colts aux flancs, tout un (symbole) n’a aucune légitimité populaire même s’il a été élu avec 80,35% des suffrages exprimés 57% de votants, près de 200 000 bulletins nuls et un taux d’abstention de 43%. Ces chiffres sont révélateurs de l’aversion du peuple pour un système démocratique tronqué.

Cette situation qui devait faire réfléchir le pouvoir et l’inciter à la modération, s’est transformée en drogue enivrante, donnant l’illusion d’être le plus fort, multipliant les provocations à l’endroit du peuple, dont la détresse et le ras le bol sont de plus en plus perceptibles.

Un refus citoyen

Ne vient-il pas en effet de faire essuyer par le pouvoir un désaveu cinglant en s’opposant violemment au port obligatoire de casque ? Révolte qui se justifie et s’explique en tant que refus citoyen de portée historique. En effet, malgré son acceptation et son respect béats de l’autorité et de la loi, le peuple a compris tout le mépris d’une telle mesure davantage basée sur des applications et prévisions mercantiles que sur les accidents et les traumatismes crâniens.

Sinon comment comprendre qu’à cette veille de rentrée scolaire et avec l’ahurissante augmentation des prix du carburant, de l’électricité, des frais de scolarité, des gens ne rêvent que du pactole à amasser en multipliant un casque par x francs pour chacun des milliers de motocyclistes roulant à Ouagadougou, et que viendraient grossir bientôt les milliers d’élèves ? Mais il faut les comprendre, l’impopularité fait naître l’équivoque chez ceux qui gouvernent, car coupés des réalités de leur peuple.

On s’encoquine avec des hommes d’affaires du dimanche, dont on devient les instruments pour le plus grand malheur de son peuple d’autant plus que de telles mesures ne frappent pas les classes dirigeantes ni leurs femmes, ni leurs enfants.

L’arrogance du pouvoir n’a pas de limite depuis qu’il a repris la main après l’ouragan social qui a failli l’emporter en 1998 avec le crime odieux de Sapouy, la fronde sociale s’étant essoufflée par la félonie de la direction du collectif, qui n’a pas voulu ou su capitaliser cette insurrection populaire.

A l’époque, la conjonction des événements avait considérablement affaibli le régime ; grogne dans l’armée en 1999 en pleine crise ce qui avait contraint le pouvoir aux abois à faire des concessions majeures, à adopter un profil bas et à rechercher des compromis.

Dans une conjoncture économique difficile

Pris dans la tourmente, il a érigé la corruption et le mensonge en méthode de gouvernement pour sauver sa peau. C’est également dans cette logique, que pour se mettre à l’abri, il a entrepris de dompter la hiérarchie militaire en lui accordant toutes sortes de privilèges, dont un élargissement inhabituel en haut de la pyramide des grades.

Jamais, l’armée n’a autant été aux petits soins, envahissement de la ville par les militaires en lieu et place des casernes, équipement en voitures de luxe au mépris des véhicules de corvée traditionnels dans toute armée. Pendant ce temps, la troupe, désemparée par les difficultés économiques, est abonnée à toutes les institutions de crédit, aux usuriers et au PMU’B.

Dans cette conjoncture économique particulièrement difficile pour le citoyen ordinaire, le train de vie de l’Etat a considérablement augmenté ; de mémoire de Voltaïque ou de « Burkinabè », jamais l’Etat n’a disposé d’autant de véhicules payés par le Trésor public et jamais les bons d’essence n’ont autant circulé. Les grands du régime et ceux qui jouissent de leur protection se payent le luxe de prélever des véhicules du parc de l’Etat, de les banaliser aux fins d’usage privé.

Toujours dans cette même veine, est en train d’être édifié, depuis plus de cinq ans à Ouaga 2000, un palais de la Présidence, qui engloutit, bon an mal an, 500 millions de francs de fonds publics, (le coût initial n’ayant jamais été rendu public, il excèderait les 10 milliards) alors que l’on ne sait même pas si c’est le Palais de la république ou la résidence privée du chef de l’Etat.

Et comme le pays est dirigé par des "copains", le Nº 2 du régime fait bâtir à quelques pas du Palais présidentiel de Ouaga 2000, un joyau de plus de 4 milliards, qui abrite le ministère de l’Agriculture et des Ressources halieutiques, pendant que le bâtiment de la Primature est une vieille bâtisse austère ne disposant ni d’ascenseur ni même de carrelage digne de l’institution.

A cette allure, il vaudrait mieux faire du ministre de l’Agriculture et des Ressources halieutiques le Premier ministre, et chacun en aura pour son compte. Dans la hiérarchisation gouvernementale, qui de la Primature ou du ministère de l’Agriculture prime ?

Il faut également savoir que depuis l’avènement du gouvernement Paramanga II il est accordé à tout ministre entrant en fonction, un prêt de 15 millions, il serait bon qu’on nous dise si ces prêts sont réellement remboursés et comment.

Ce qui est sûr, les institutions de la République à l’instar du gouvernement ne sont pas en reste ; à tous les niveaux, le luxe et l’opulence vous captent, vous sidérent à comparer la misère ambiante dans les quartiers de la ville avec la pléthore de véhicules fonds rouges et fonds bleus qui garnissent les parcs.

Il est nécessaire de rappeler que l’an dernier, prétextant le renchérissement du coût de la vie, la représentation nationale (les députés) n’a pas hésité à augmenter substantiellement l’indemnité de représentation des élus. Pendant ce temps, c’est le peuple qui trinque, qui a mal et croupit dans la misère, assommé par le cours de la vie qui flambe, atteignant des sommets vertigineux.

Ces gens qui nous gouvernent et leurs suppôts ont beau jeu de pavoiser devant les médias pour dire, que tout va bien au Burkina, que l’économie prospère, que le taux de croissance étant d’environ 6% l’an, dans peu de temps, nous cesserons d’être un pays miséreux pour devenir un pays émergeant. Evidemment, eux peuvent tenir de tels propos, n’étant pas confronté aux dures réalités existentielles, ils ne vivent pas dans leur chair les angoisses de leurs concitoyens.

C’est pourquoi ces derniers temps, le gouvernement répercute sur la population les coûts de sa gabégie et de son extravagance. Ainsi, la pression fiscale est au maximum, les petits commerçants sont soumis à la rigueur douanière, pendant que leurs protégés, gros opérateurs économiques, se livrent à la fraude fiscale et douanière, sous la protection des grands du régime.

Luxe et opulence vous captent

En quelques années, le coût de la vie a plus que doublé, et le gouvernement soutient qu’il ne peut rien, que c’est la loi du marché qui l’impose. Oui, cela se comprend, quand on sait que, eux ne payent pratiquement rien ; ils ne connaissent même plus le prix du carburant à la pompe, puisqu’ils ne roulent qu’avec des bons d’essence, leurs familles et leurs amies en profitent largement et ils reçoivent des indemnités pour l’eau, l’électricité et le téléphone, tout ça sur le dos du contribuable, sur le dos du peuple.

Oui ! le peuple, contraint et forcé, paye les fastes de la République, c’est le peuple qui est saigné à blanc pour faire vivre ceux qui nous gouvernent ; pendant qu’il se serre la ceinture au point d’en mourir, ceux qui se réclament de la légitimité populaire desserrent la ceinture, parce qu’ils sont trop gras.

C’est en ces temps si difficiles pour le petit peuple que la Présidence choisit de s’octroyer à coût de milliards un deuxième avion présidentiel. Pour quoi faire d’un deuxième jet surtout que, nous l’avons tous vu, il s’agit d’un vieux 727 comme le premier ? Que devient donc celui-ci ? A-t-il été vendu ? si oui,, à combien et au profit de qui ?

Etait-il vraiment nécessaire d’effectuer une telle dépense de prestige en cette période de conjoncture particulièrement corsée où le peuple ne fait plus que tirer le diable par la queue. Oui, nous avons raison de dire que le pouvoir est déconnecté d’avec la réalité, qu’il vit sur un nuage, loin, très loin des préoccupations quotidiennes de son peuple.

Pour la majorité de la population, avoir un repas par jour, c’est la croix et la bannière ; ne parlons pas de se soigner et d’assurer l’éducation de ses enfants. Les esprits étroits diront : le Gouvernement fait des efforts, il bâtit des centres de soins, mais là n’est pas la question, car les soins et les médicaments ne sont pas gratuits, pas même pour les femmes en grossesse et les enfants de 0 à 5 ans, tout comme les soins en urgence pour tout citoyen.

Alors, de grâce, laissez les gens tranquilles avec votre affaire de casque, laissez-nous mourir de nos traumatismes crâniens comme nous mourons du Sida, du paludisme et autres. Egalement, c’est nous qui sommes pillés et abattus par les coupeurs de route ou dans les éboulements ou sous les gravats des mauvais chantiers qui s’écroulent.

Laissez les gens tranquilles

S’il est vrai que l’on peut reprocher au peuple sa propension à céder à la corruption et au clientélisme, à la société civile (syndicats et autres associations) de se laisser phagocyter et à la classe politique, notamment l’opposition, sa duplicité, son manque de courage, de clairvoyance, la responsabilité première revient au pouvoir.

Parlant de l’opposition, il faut dire que celle-ci n’a jamais pu ou su capitaliser le mécontentement populaire, elle est toujours en retard d’une lieue par rapport à l’actualité. C’est là une des raisons qui fait que le peuple se désintéresse de la chose politique à son détriment. Le peuple est également contrarié par le comportement de ce serpent à plusieurs têtes appelé société civile qui, après avoir été source d’espoir, a déçu pour son inféodation au pouvoir qui a érodé son crédit à la vitesse grand V.

A présent, elle s’avère être pire que la "société politique" par son clientélisme et sa partialité. C’est donc la déception et le manque de repère qui jettent le peuple dans les bras de Blaise Compaoré et son CDP faute de mieux.

Pour le PNR/JV, la situation qui prévaut ne nous surprend pas, ce qui se passe n’est ni innocent ni anodin, c’est un calcul politique du pouvoir pour maintenir le peuple dans la pauvreté pour mieux l’asservir, car un peuple qui a faim, n’est ni libre, ni réfléchi. Bien au contraire ! Il est enclin à confier son sort au diable pour incapable qu’il soit de changer son cours.

Le PNR/JV a toujours été à la pointe du combat, dénonçant sans détours les travers du régime, ses dérives, son extrême suffisance qui frise le mépris. Cette attitude est le propre de tout régime qui a accédé au pouvoir par les armes. La démocratie étant un vernis pour plaire aux partenaires, regardez au tour de vous et vous verrez que partout où des putschistes ont légalisé leurs pouvoirs par les urnes, les pratiques sont les mêmes, car les acteurs ne croient pas aux vertus de la démocratie.

La révolte devient un droit citoyen

Imaginez un seul instant ceux qui nous gouvernent dans un système démocratique classique, où chaque individu devrait se battre dans des partis au sein du peuple pour se hisser où ils sont, nous parions que, quasiment aucun des dirigeants actuels ne pourrait être ce qu’il est, aujourd’hui ; Blaise ne serait jamais chef de l’Etat ; Simon ne serait jamais maire de Ouaga ; Gilbert Diendéré, pas ce qu’il est.

Même s’il arrivait qu’ils accèdent à ces hautes fonctions, ils auraient eu un tout autre comportement, ils seraient plus humbles, démocratie oblige, ça aussi, il faut qu’on le dise. Bien que l’histoire ne se répète pas, elle peut balbutier ; cela pourrait être le cas de ces gens s’ils ne se ressaisissent pas. Un coup d’arrêt pourrait être donné au processus démocratique, et le peuple applaudirait un soldat, même pas un sous-officier.

Le PNR/JV est ouvert à tout citoyen, qui pense et croit que quelque chose peut être fait pour sauver le Burkina, pour donner espoir au peuple dans un cadre démocratique. Pour ce faire, il invite les cadres, les intellectuels patriotes à rejoindre ses rangs pour faire la politique autrement, car cela est possible.

Il faut seulement du courage, des perspectives claires et de la persévérance pour parvenir à des résultats probants. La politique, contrairement à ce que beaucoup croient, n’est pas une course de vitesse, mais plutôt une course d’endurance, si l’on veut mériter la confiance du peuple, jouir de ses efforts, la récompense étant au bout de l’effort. La précipitation, la ruse, la roublardise, les calculs, la cupidité et l’arrivisme ne sont que l’œuvre de prétentieux qui au bout du compte perdront au change.

Le PNR/JV soutiendra toujours la cause du peuple et considère cette révolte comme le début du commencement d’un processus, qui renverra ces démagogues qui nous gouvernent d’où ils sont venus. Par conséquent, il invite le peuple à rester vigilant et à se battre pour se faire respecter, car quand on en peut plus, la révolte devient un droit citoyen.

Pour le PNR/JV
Le Président,
Christian T. Koné

Observateur Paalga

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Vos commentaires

  • Le 14 septembre 2006 à 10:37, par Bernard Somwaoga En réponse à : > Emeutes du casque : Ça n’a pas été qu’une simple réaction

    Je ne suis pas contre les requisitoires formulées contre le regime en place. Cependant, je me demande si l’on est pas en train de devier le debat sur le casque. C’est vrai le casque n’est pas opportun vu donc les facteurs socio-politiques, financiers, et surtout conjoncturels. Mais le vrai debat sur la problematique du casque reside dans sa realisabilité technique, son bien-fondé d’un point de vue epidemiologique. Par exemple, supposons que le casque soit distribué gratuitement à tous les usagers des deux-roues, seriez-vous en mesure de porter une carrosserie crânienne tous les jours 365 jours/365jours, de payer une contravention de 3000FCFA le jour où vous l’avez oubliée, perdue ?
    Pour autant je ne dis pas d’arrêter de dire ce qu’on pense du regime, je voudrais que les gens posent le problème du casque en le critiquant dans le domaine de ses principes : la prevention routière.

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