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Dossier Norbert-Zongo : Le Faso est-il malade de sa justice ?

Publié le samedi 26 août 2006 à 19h36min

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Se dossier Norbert-Zongo a pris une allure qui risque de le conduire vers la fin redoutée par tous : son enterrement pur et simple. Huit ans après la mort tragique du directeur de publication du journal l’Indépendant et ses compagnons d’infortune, le Burkina et sa Justice recherchent toujours, sans le moindre succès, le ou les auteurs de ce drame. En effet, la Cour d’Appel a confirmé la décision de non-lieu prise par le juge d’instruction Wenceslas Ilboudo.

Au plan purement juridique, on peut penser que la loi ayant été dite de façon impersonnelle, c’est-à-dire sans se laisser emballer par les pressions de toutes parts, le problème est résolu. Erreur ! Car en l’état actuel, tous les Burkinabè, de quelque bord politique ou idéologique qu’ils soient, ont conscience qu’il y a encore bien des questions à élucider.

La preuve est que même les conseils de Marcel Kafando, qui ont pourtant de réels motifs de satisfaction pour avoir été suivis par les juges, n’étaient pas particulièrement enthousiastes.
L’avocate Antoinette Ouédraogo, la porte-parole du groupe, a même senti le besoin de faire une longue explication qui, en elle-même, est un signe qui se laisse décrypter facilement.

Sans interprétation politique aucune, on est en droit de se demander si le processus démocratique dans lequel le pays est engagé sert les intérêts des populations ou s’il s’agit plutôt de présenter des apparences de démocratie pour épater les partenaires techniques et financiers.

En effet, le dossier Norbert-Zongo a été instruit selon les procédures en vigueur, c’est-à-dire avec la possibilité donnée aux différentes parties de s’attacher les services de conseils. C’est un principe fondamental en droit. Au plan théorique donc, les choses se sont déroulées normalement. Ce sont par contre les résultats qui laissent à désirer. Comment peut-on expliquer que pour un crime d’une telle cruauté, aussi bien les forces de l’ordre que la Justice restent impuissantes ?

La crainte légitime des uns et des autres, c’est que cette impunité n’encourage d’autres mauvais esprits à tenter des aventures similaires. Avec la donne actuelle, il est tout à fait compréhensible que des Burkinabè s’interrogent sur les causes réelles de l’incapacité de la Justice à identifier les auteurs de cette forfaiture.

A la vérité, ce sont les autorités du Faso qui devraient être les plus déçues de cette décision de justice, elles qui doivent souhaiter que la lumière soit faite sur ce crime qui, il faut avoir le courage de le reconnaître, est au carrefour du judiciaire, du politique et du social. Croire qu’on peut jouer avec le temps peut être une mauvaise interprétation du dossier.

Il convient également de prendre en compte le nouvel élément que constitue la sortie des traditionnels amis du Burkina, c’est-à-dire les bailleurs de fonds, qui ont fini par donner de la voix. L’Union européenne et les Etats-Unis d’Amérique, qui comptent parmi les partenaires techniques et financiers du pays des Hommes intègres, ont exhorté le Burkina à poursuivre l’instruction du dossier Norbert-Zongo. Il ne faut pas se faire la moindre illusion : si ce dossier continue d’être malmené de la sorte par la Justice burkinabè, il donnera lieu à des manifestations de colère.

C’est pourquoi, si on estime que certains regroupements de la société civile font de cette affaire un fonds de commerce, le mieux est de rendre justice et leur couper ainsi l’herbe sous le pied. Des actions comme celle initiée par les « femmes en noir » qui entendent mettre la pression jusqu’à ce que « justice soit faite » sont visiblement le signe que le Faso est vraiment malade de sa Justice.

Adam Igor

Journal du jeudi

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