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Politique : Querelles de mots et coups bas...

Publié le samedi 26 août 2006 à 19h36min

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La guéguerre récemment constatée pour désignation des membre de la Commission électorale nationale indépendante - adjectif d’ailleurs sujet à débat - n’est pas près de se calmer, si l’on en croit ce qui se dit ou s’est fait. Cela prouve suffisamment que la société civile du Burkina n’est pas aussi bien structurée qu’on voudrait le faire croire. Des questions restent en suspens, parmi lesquelles celle de savoir la place et le rôle exacts de certaines associations dans le jeu démocratique.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’élection du représentant de la société civile aura été des plus controversées, plutôt cocasses sur les bords, selon certains participants, qui affirment que tout aurait été mis en uvre pour qu’il en fût ainsi. Ce n’est sans doute pas sans raison que les quatre autres candidats, sur les cinq que comptait le panel des prétendants, ont demandé la reprise pure et simple de cette élection. Mais que pourrait-il se passer si jamais le « statu quo » était maintenu ? Question difficile quand on sait que la Commission est le fruit d’un consensus qu’il faudrait bien se garder de briser...

Un clan chassant l’autre, une autre bataille de mots devait se dérouler un peu plus tard au niveau des partis politiques pour savoir qui, exactement, était de l’opposition ou ne l’était pas. Ce qui, visiblement, visait l’ADF-RDA dont le président, jadis « chef de file de l’opposition » ainsi que l’un des militants, participent au gouvernement. Il est vrai que jusqu’à présent nombre de Burkinabè éprouvent un certain malaise en se rappelant la façon dont s’est opéré, à l’époque, le soutien de l’ADF-RDA à la candidature de Blaise Compaoré.

Le parti de Gilbert Ouédraogo aura-t-il été réellement compris dans sa tentative de justifier sa position ? Il a été maintes fois répété qu’entre le programme de l’ADF-RDA et celui, quinquennal, de Blaise Compaoré il existe, sur l’essentiel, un certain accord.

L’avis du parti majoritaire semble tout autre lorsque la question est posée à certains militants ; ce qui met tout le monde dans l’embarras. Plus optimistes, d’autres émettent l’hypothèse que ce n’est sans doute pas pour deux portefeuilles ministériels que l’ADF-RDA aura apporté son soutien au candidat Blaise Compaoré. Au Burkina, les appréciations qu’ont certains partis de la situation politique nationale et les valeurs qu’ils professent semblent parfois équivoques à plus d’un titre ; ce qui apporte plus de questions que de réponses aux problèmes posés...

Ceux qui ont dénoncé la non appartenance de l’ADF-RDA à l’opposition seraient, par définition, au-dessus de tout soupçon ! Mais ils n’ont que leur « bonne foi » comme preuve de leur clairvoyance, laquelle est sérieusement mise en doute par l’ADF-RDA, pour laquelle seuls des préjugés, des choix idéologiques ou autres seraient à la base de cette « inutile » levée de boucliers. Ce qui est loin d’ôter les doutes et continue de susciter nombre d’interrogations...

Comment comprendre alors la position de ce parti ? En attendant qu’un jour les nombreux non-dits soient connus, le débat n’est pas près de s’estomper. Il est généralement admis que l’opposition c’est la position d’une chose placée vis-à-vis d’une autre ; en politique, le parti de ceux qui sont opposés au gouvernement.

Ce qui ne semble guère le cas pour l’ADF-RDA. Sans doute le parti, très bien conseillé, a-t-il fait appel aux oxymorons qu’offre la rhétorique, qui admettent cette sorte d’antithèse par laquelle on réunit deux idées, deux expressions paraissant tout à fait contradictoires. Dans ces conditions, l’on pourrait affirmer que la position de ce parti est d’une « prudente hardiesse »...

D’une façon ou d’une autre, la question des candidatures indépendantes s’est encore posée et l’on peut constater tout le bien que cela pourrait apporter à la démocratie. Il ne serait pas inconstitutionnel de revoir cette prépondérance des partis politiques, lesquels s’arrogent ainsi le droit de « choisir » pour les électeurs ; de déterminer le degré de leur bien-être et leur devenir...
Des candidatures indépendantes pourraient faire éviter certains désagréments : la semaine dernière il a été fait état d’une « démission collective » de conseillers municipaux ADF-RDA de la Bougouriba.

La suite de l’histoire a prouvé qu’il s’agissait en fait d’un véritable coup bas orchestré par un groupe d’individus au profit du parti majoritaire. L’ordre est revenu mais de tels agissements destinés à récupérer des voix constituent des dérapages qui, à terme, pourraient avoir des conséquences dévastatrices. Les partisans de tous bords devraient éviter d’assommer leurs partis de trop de militantisme et d’intérêts inavouables. La pléthore de partis politiques ne contribue-t-elle pas aussi à l’éclosion de telles manigances ?

Lorsqu’on demande à l’électeur de choisir dans un fouillis de tendances suffisamment disparates, il faut s’attendre à toutes sortes de surprises. Accepter d’évoluer selon les règles de la démocratie, tel est le problème réel. Et il faut se méfier de ce que l’écrivain brésilien Jorge Amado nomme des « coqs de basse-cour terriblement insignifiants qui se croient professionnels de l’agressivité publique et ne sont, en fait, que des apeurés mondains »...

Le calme apparent constaté au sein des partis politiques cache cependant mal les travaux souterrains qui s’y effectuent. Des sources informées soulignent que les élections législatives se préparent déjà, minutieusement dans certains partis ;que de nombreux « sous-marins » seraient déjà à l’uvre, qui pour « briser le moral », qui pour récupérer de « gros poissons » de façon adroite. La rumeur fait cas de « ralliements » qui pourraient être spectaculaires ; de la désintégration même de certaines formations dont les leaders s’accommoderaient bien de quelque place enviable.

La rentrée politique promet de nombreux coups de théâtre et cela remet à l’ordre du jour une question que se posent généralement les Burkinabè. Les hommes politiques du Faso ont-ils seulement le souci du bien-être de leurs compatriotes ? Les calculs égoïstes d’épiciers de bourgs auxquels l’on assiste parfois laissent perplexe.

A. Pazoté

Journal du jeudi

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