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Ressources pétrolières et minières : Des richesses qui appauvrissent ?

Publié le vendredi 18 août 2006 à 07h19min

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Il est indéniable que la possession de ressources naturelles est un élément important pour le développement d’un pays, le bien-être de sa population. Et cela pour peu que ces ressources soient bien exploitées, que les retombées (les fruits de la croissance comme diraient les économistes et autres experts) soient équitablement réparties.

En somme, que chacun y trouve son compte. Malheureusement, ce n’est pas le cas pour bien des pays dont le sous-sol regorge de pétrole, de diamant, d’or, d’uranium, etc. Car, paradoxalement, ces ressources deviennent sources de conflits fratricides et se révèlent, en fin de compte, être une malédiction. En la matière, les pays au sud du Sahara (encore eux) sont ceux qui en paient un lourd tribut. Il suffit de prendre l’exemple du pétrole pour s’en convaincre .

Plus près de nous, au Nigeria, les régions pétrolifères sont les parents pauvres du développement. Pourtant, des milliers de barils de pétrole y sont extraits chaque jour. Leur situation d’abandon et de mal-être est souvent telle que les habitants n’ont plus d’autre choix que d’user de la violence pour se faire entendre de leurs autorités. D’où des prises d’otages par des travailleurs de raffineries de pétrole ou des actes de vandalisme sur des installations qui alimentent de temps en temps l’actualité au Nigeria.

Toujours dans ce pays, l’on se souvient de la pendaison de Ken Saro Wiwa et de ses compagnons d’infortune qui avaient osé, du temps de feu général Sani Abacha, revendiquer plus d’égards pour le peuple Ogoni qui ne bénéficiait pas des retombées de l’exploitation qui était faite du pétrole de sa région, ne serait-ce que la contrepartie de la pollution, de la dégradation de l’environnement. Comme on ne fait pas d’omelettes sans casser des oeufs, il apparaît pratiquement impossible d’exploiter le pétrole sans porter atteinte à l’environnement à brève ou longue échéance. Ce qui, tout naturellement, appauvrit les régions abritant des puits de pétrole.

L’exemple nigérian n’est pas le seul, loin s’en faut. Il y a ceux des deux Congo et du Gabon qui méritent d’être cités. En dehors d’une poignée de privilégiés, les dirigeants, généralement, la grande masse est sur la touche. C’est à peine si les populations se rendent compte que leurs pays sont producteurs de pétrole. La seule évocation de cette ressource rime avec malheurs, guerres, divisions, etc. Des situations à l’origine desquelles les compagnies pétrolières ne sont souvent pas étrangères. L’illustration parfaite est celle de Elf Congo qui, au-delà de son statut de compagnie pétrolière, est un "Etat" dans l’Etat, un faiseur de rois avec lequel il faut forcément composer. L’ancien président congolais, aujourd’hui en exil en Grande-Bretagne, Pascal Lissouba, en sait sans doute quelque chose.

Le Gabon, autre pays africain producteur de pétrole, ne se porte également pas mieux. Ce pays que l’on qualifiait d’émirat pétrolier africain, toute honte bue, a revendiqué d’être classé dans la catégorie des pays pauvres pour bénéficier de l’initiative de remise de dette appelée PPTE (Pays pauvres, très endettés). Autre pays de la zone mal en point malgré un sous-sol généreux : la République démocratique du Congo. Contrairement à certains de ses voisins, c’est beaucoup plus les ressources minières comme le diamant, le coltan, le cuivre, le zinc, le cobalt et le manganèse qui sont sources de malheurs de ce pays, qualifié fort justement de scandale géologique.

En effet, le pays de feus Maréchal Mobutu et Patrice Lumumba a tout pour être riche. Malheureusement, le plus grand nombre croupit dans la misère tandis qu’une minorité se met plein les poches ainsi que certaines compagnies étrangères. Et c’est celui qui sait le plus faire usage de la poudre à canon qui s’approprie la plus grosse part du gâteau. Il n’y a pas lieu de s’étonner que les conflits qui déchirent ce géant de l’Afrique centrale n’aient pour cause que l’accaparement de ses richesses.

Ce sombre tableau ne serait pas complet si on excluait le Tchad qui vient d’entrer dans le club des pays producteurs de pétrole. Là aussi, des signes de ce qui se passe ailleurs sont perceptibles avec la résurgence de la rébellion armée. La transparence et la bonne gouvernance dans la gestion de la manne pétrolière commencent à ne plus être des vertus essentielles au regard du bras de fer momentané entre les autorités et la Banque mondiale à propos des fonds réservés aux générations futures. La renonciation de la Banque mondiale à croiser le fer avec les autorités de Ndjamena est finalement regrettable, parce que sans doute faite à la manière de quelqu’un qui se lave les mains après avoir vainement tenté de faire entendre raison à son prochain qui hypothèque l’avenir de son pays. Dans cette situation, la Banque mondiale qui, en tant qu’institution de financement du développement, ne fait pas de la philanthropie, a été finalement prise de compassion et de pitié pour le Tchad.

Ce petit tour des pays africains au sous-sol riche mais qui, en fin de compte, ne profite pas aux populations, incite à se demander si les ressources pétrolières et minières de l’Afrique subsaharienne sont des richesses qui appauvrissent. Cependant, il y a les autres pays non africains qui profitent bien de leurs ressources pétrolières.

Le Venezuela de Hugo Chavez est une démonstration parfaite de ce que le pétrole n’est pas synonyme de malheurs. Ce pays de l’Amérique latine, qui s’oppose à l’influence des Etats-Unis dans la région, a décidé de vendre son pétrole à des pays africains à l’occasion de la visite de son président sur le continent noir. Une première dans la coopération Sud-Sud.

En Afrique, l’exemple algérien est tout aussi éloquent. On peut également citer les pays arabes du Golfe persique dont les fortunes reposent essentiellement sur la manne pétrolière. Alors, pourquoi le pétrole, les ressources du sous-sol, portent-ils chance à certains alors qu’ils sont synonymes de tant de déconvenues pour d’autres ?

La transparence dans la gestion, la répartition équitable des revenus sont visiblement à la base de cette situation enviable. D’une manière générale, certains pouvoirs africains se sont tellement inféodés aux puissantes compagnies pétrolières qui pillent le continent, qu’ils mettraient leur pouvoir en péril en manifestant des velléités de réelle indépendance.

Le Pays

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