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Diébougou : Des requins blancs contre des alevins

Publié le jeudi 10 août 2006 à 07h47min

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L’écrit paru le mardi 8 août 2006 dans notre journal concernant la commune de Diébougou et titré "11 conseillers ADF/RDA migrent au CDP" a suscité la réaction de Farma Cyrille Papa, instituteur certifié à Diébougou. Il apporte ici sa compréhension des événements qui ont abouti à la situation qui prévaut dans sa ville.

Témoin privilégié, nous avons été de toutes les luttes et de tous les combats dans cette ville de Diébougou. Très peu de fois je me suis exprimé par voix de presse parce que peut-être très porté vers l’action.

Aujourd’hui cette lettre parue dans vos colonnes en date du 8/8/06 sous le titre : "Diébougou : des conseillers ADF/RDA migrent au CDP" m’y oblige, cela pour éclairer l’opinion nationale, les hommes, femmes épris de démocratie, de paix et de développement.

Cette lettre n’est que la partie visible du hold-up électoral manigancé, orchestré et exécuté par des maestro du CDP, depuis la campagne électorale jusqu’à la proclamation des résultats de la municipale d’avril 2006 - dans le but non pas de mettre l’ADF/RDA sur la touche (ce qui est normal) mais de voler à la population sa victoire et cela quoiqu’il en coûte.

Le contenu de la lettre est d’une légèreté déconcertante et d’une incohérence d’idées si flagrante que les auteurs auraient pu s’en passer. Nos scribouillards commencent par justifier la cinglante défaite du CDP, leur nouvelle religion, par le fait qu’après l’élection de leur divin candidat, le seigneur Blaise Compaoré (tant pis pour celui qui mal y pense), « des personnes ont sillonné les villages récupérer les pièces d’identité de nos militants et sympathisants pour le compte du CDP ; identifiées, elles se sont révélées être des activistes de l’ADF/RDA ».

Ces révélations me paraissent intéressantes parce que dévoilant les méthodes de ce parti pour prendre en otage les électeurs puisque vos prétendus militants, très habitués à cela, ont remis leurs pièces. Pauvre président de la CENI, lui qui est si optimiste sur nos scrutins, vous voilà !

Messieurs, pourquoi après avoir découvert le pot au rose n’avez-vous pas simplement fait défection au lieu de prendre les fonds de l’ADF/RDA et de vous pavaner pour battre campagne ? Ridicule cet argument, mais cela s’explique, car quand on écrit pour faire signer par des pauvres gens, on verse dans ces travers.

Le CDP ne veut pas jouer les seconds rôles

Pressés de vous dédouaner devant les mogo puissants de Ouagadougou, doublés d’une telle boulimie du pouvoir, vous tentez de noyer le poisson dans l’eau. Seulement voilà, c’est parce que plus de dix ans sous la férule du CDP Diébougou, on n’a connu que la corruption, la concussion sous toutes ses formes, la gabegie, l’insolence, l’arrogance, la fourberie, le tout couronné par des discours ethnicistes et xénophobes.

Tous les ingrédients de la mal-gouvernance du système CDP. Et comme les conditions de vie déterminent la conscience des hommes, les populations de Diébougou ont, dans un élan citoyen, voulu savoir pourquoi vendre la maison des jeunes. Où étaient les véhicules du parc auto ? Pourquoi l’hôtel de Ville de Diébougou n’a pas d’électricité depuis trois mois ? En réponse, ils n’ont reçu que mépris et arrogance.

Alors, les plus optimistes ont fini par déchanter et, comme on pouvait s’y attendre, une répression d’une violence inouïe s’est abattue sur la ville. Des erreurs politiques, on en était passé à la faute politique. La population malgré les intrigues et autres pratiques pour redorer le fanion CDP a opté pour un vote sanction.

L’ADF/RDA et le RPP/G ne pouvaient que rencontrer la sympathie. Les urnes ayant parlé l’ADF/RDA se voit confier la destinée de la commune. La population a décidé d’un changement (même si personnellement je n’y crois pas, conviction idéologique oblige) qui a été une réalité, n’est-ce pas là magnifier la démocratie et notre jeune processus de décentralisation ?

Mais c’était sans compter avec le CDP qui ne se voit pas jouer les seconds rôles. Je serais distant s’il n’était question que de la guéguerre entre le CDP et l’ADF, mais seulement voilà, il implique également la question de l’avenir de notre chère Djiboue (appellation originelle de Diébougou).

Alors soyez bons joueurs repartez vers le staff technique de Ouaga, dites la vérité et ensemble, modestement, revoyez vos copies et, pour une fois, faites ce que le peuple demande. La preuve, vous le reconnaissez vous-même implicitement, malgré votre mauvaise foi et l’esprit d’aventurier qui vous caractérise, que vous tentez maladroitement de prêter aux autres : « compte tenu des événements récents de Diébougou, le discours, l’argumentaire de campagne n’ont pas été suffisants pour ramener les populations à la raison ».

Pourquoi alors vous vous chatouillez pour rire dans une telle entreprise ? Dans cette ligne, vous dites : « nous désirons l’instauration d’une paix sociale, une réconciliation des frères et sœurs pour nous mettre au travail en vue du développement de cette ville carrefour ».

Permettez-moi d’en douter, car l’objectif premier est de bloquer le fonctionnement du conseil ; pour cela, vous vous êtes assujetti les conseillers du RPP/G dès la mise en place du bureau du conseil.

En contrepartie vous leur avez promis de placer le candidat M. Victor Ouattara comme adjoint, argumentant que l’ADF n’est qu’un ramassis de Dagari et que Diébougou appartient aux Djan. Pensez-vous que de tels propos participent à la paix et à la réconciliation ?

La pieuvre mafieuse du parti

Ensuite vous ambitionnez de reprendre la tête de la mairie par le code des collectivités locales (motion de défiance..., etc.) car selon vos propres indiscrétions, la pieuvre mafieuse du parti est là et je n’en doute pas, parce que j’ai en mémoire le dossier PAI contre PAI, le dossier Norbert Zongo pour ne citer que ceux-là.

Pourquoi aller contre la volonté populaire ? Pourquoi ce cancrétisme politique ? De cette lettre, parlons-en ; j’ai personnellement été approché courant mai 2006 par les émissaires du bureau provincial Bougouriba (CDP) pour une réconciliation avec les anciens. Seulement, pour eux, toute réconciliation rime avec retour aux affaires. Quel infantilisme !

Alors affolés, cette lettre a été rédigée. A la question de savoir pourquoi avez-vous démissionné ? deux des démissionnaires : « Notre frère (dont je tais le nom exprès) est venu il y a quelques jours à Bapla nous dire que sont frère doit venir des Etats-Unis et que le papier pour le financement des micro-projets viendrait demain de Ouaga ; alors, ceux qui sont élus seront les dirigeants ; après il est venu et on a signé ».

Ingénieux non ? En effet, on est tenté d’applaudir. Le reste n’était qu’un jeu d’enfant. Messieurs, que faites-vous de la morale ? Où avez-vous appris à faire la politique ? La démocratie, vous l’avez vidée de son sens.

Ma peur, c’est l’avenir de cette commune martyrisée qui n’a que trop souffert et qui est au bord d’un conflit interethnique dont elle se passerait volontiers. Mais que peut-on, quand elle se sent orpheline de ses fils et filles (et Dieu seul sait combien elle en a) qui ne se contentent que de brèves apparitions le temps de montrer la nouvelle voiture acquise à Ouaga ou à Bobo et distribuer des billets de banque ?

De la décentralisation et de ses enjeux, on en a cure. C’est un cri du cœur afin que tous le pays nous aide à sortir de cette crise qui, si on n’y prend garde, fera monter Diébougou au hit-parade des villes déchirées.

A commencer par le pape du progrès continu pour une société d’espérance (suivez mon regard) afin qu’il s’intéresse aux problèmes de l’interland du Burkina au- delà des journées de paysans et autres qui commencent à nous lasser.

Autrement dit, monsieur le président, le progrès sera pour vous et votre entourage et l’espérance pour nous dans nos tombes. Quant à la décentralisation, considérée comme un cadeau pour les populations, elle se transformera en un véritable brûlot.

C’est dans la douleur, la souffrance et l’humiliation qu’on a balayé les hommes que le CDP nous impose depuis. Alors, ne forcez pas le passage, car aller contre la volonté populaire, c’est se faire hara-kiri.

Nous lançons un appel à toute la population de la commune au calme, à ne point accorder le moindre intérêt au discours xénophobisant de politiciens pyromanes en manque d’inspiration, qui ne gesticulent que pour leur poste perdu et pleurnichent comme des enfants gâtés auxquels on vient de retirer des bonbons sucrés. Je m’excuse d’avoir été si long, mais le sujet mérité qu’on s’y attarde et excusez-moi du peu.

Farma Cyrille Papa
IC/CEB Diébougou
BP 13

Observateur Paalga

P.-S.

Lire aussi :
Municipales 2006

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