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Commission électorale nationale indépendante : Le poison dangereux et l’énorme paradoxe de la CFR

Publié le jeudi 3 août 2006 à 07h18min

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Le collectif devenons citoyens (CDEC), au travers de son comité exécutif national, s’indigne des conclusions du groupe parlementaire Convergences des forces républicaines (CFR) qui a demandé la suppression de la CENI. Le CDEC proteste et condamne des recommandations qui remettent en cause des années de négociations ayant abouti à un consensus entre l’opposition et la majorité.

Le groupe parlementaire Convergence des forces républicaines (CFR) a surpris désagréablement l’opinion nationale et internationale en recommandant la suppression pure et simple de la CENI.

En effet, partie pour réfléchir sur les acquis et les insuffisances du processus électoral à la faveur de ses journées parlementaires, la CFR a conclu à la nécessité de liquider l’actuelle Commission électorale indépendante et de confier l’organisation des élections à une « administration républicaine ».

Une décision qui, bien qu’étant encore en l’état une recommandation, nous interpelle quant à sa gravité. C’est donc conscient des lourdes conséquences que pourraient avoir une telle position des parlementaires de la mouvance présidentielle, que le collectif s’insurge contre la décision de la CFR.

D’abord, parce que la CENI est l’aboutissement d’un long processus politique ; fruit d’un consensus entre l’opposition et la majorité, obtenu à la suite de multiples revendications et tractations : table ronde des partis politiques convoquée par le président du Faso en 1991, celle demandée par le G-9 en 1997, celle demandée par le G-14 en 1998 et enfin celle projetée par la commission pour les réformes politiques suite au rapport du collège des sages.

La CENI est donc, avant tout, en plus des missions électorales qui lui sont assignées, la pierre angulaire de notre système démocratique en ce qu’elle cristallise et garantit la confiance entre les parties.

Nous sommes perdus dans un énorme paradoxe

Dans cette optique, sa liquidation constitue une remise en cause systématique du processus électoral et partant de la démocratie dans notre pays. Encore que, pour l’heure, dans les pays en voie de démocratisation, les commissions électorales indépendantes constituent les meilleurs dispositifs à même de renforcer les systèmes électoraux et d’enraciner la démocratie.

Jusqu’à preuve du contraire, l’administration publique est presque dépassée en la matière, car sa dépendance vis-à-vis des pouvoirs en place crève les yeux. Il est donc inadmissible qu’après de longues années d’ouvrage, d’avancée démocratique et après avoir réussi à exorciser le spectre de l’administration centrale dans l’organisation des élections, l’on veuille revenir à la case départ.

C’est un abîme inqualifiable ! Qui plus est, le remède alternatif qui voudrait qu’on remette à une administration républicaine l’organisation des élections n’est moins qu’un poison dangereux. Ce, d’autant plus que la CFR reconnaît d’elle-même explicitement qu’il faut dépolitiser l’administration.

Ce qui suppose, pour elle, que cette dernière est politisée donc partisane, donc non républicaine. En doutant sérieusement d’un côté, de l’administration comme l’ont révélé de nombreux rapports publics ; et en soutenant d’un autre, qu’il faudrait confier à cette même administration les élections, nous sommes perdus dans un énorme paradoxe.

De surcroît, quand la CFR réclame une administration républicaine, on se pose la question suivante : est-ce à dire que la CENI, créée par loi, n’est pas républicaine ? Et si elle ne l’est pas, qu’en serait-il, ce faisant du crédit et de la légitimité des élus des dernières élections municipales, présidentielle et surtout des législatives de 2002 qu’elle a organisées, lesquelles ont accouché de la présente Assemblée nationale ?

Le collectif condamne avec la dernière énergie la logique du "un pas en avant, deux pas en arrière"

Au demeurant, les arguments avancés par la CFR ne sont pas convaincants, car ne résistant pas à l’épreuve du moindre raisonnement. En effet, il n’est pas contestable que la création de la CENI soit le fait des partis politiques. Ils pourraient donc se targuer de pouvoir décider de son sort.

Si bien que toute position de la société civile sur cette question peut être de ce fait mal interprétée. Mais la classe politique ou une partie doit admettre qu’elle ne peut pas faire les choix unilatéralement en démocratie, surtout pas à force d’humeurs, sans concertation préalable sans provoquer la réaction des autres acteurs.

En tout état de cause, le Collectif condamne avec la dernière énergie la logique du « un pas en avant, deux pas en arrière » que veulent imposer les élus nationaux de la CFR. Fort de ce qui précède, et de ce que le renforcement du processus électoral et l’enracinement de la démocratie incombent à la fois et au même titre à la société civile, aux institutions, aux citoyens et aux partis, le CDEC prend position en qualifiant la proposition de la CFR de volonté manifeste et délibérée de brader un instrument de stabilité politique et de provoquer un recul démocratique dans le pays. Aussi, le Collectif :

Prend à témoin l’opinion nationale et internationale quant au péril de la proposition du groupe parlementaire CFR relative au processus électoral et démocratique au Burkina Faso ;

s’indigne et proteste vivement auprès de la CFR et lui demande de revenir sur sa proposition ;

- appelle la société civile et les citoyens burkinabé épris de démocratie à désapprouver la recommandation de la CFR et à s’ériger contre toute tentative de suppression ou d’atteinte des fondements de la CENI.

Le Comité exécutif national

Observateur Paalga

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