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Visite de Hugo Chavez au Mali et au Bénin : Une autre vision de la coopération

Publié le jeudi 3 août 2006 à 06h54min

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Hugo Chavez est-il devenu le champion de la résurrection du mouvement des non-alignés, actif dans les années 1950-60 et dont les principaux acteurs avaient pour noms Nasser, Soekarno, Nehru, Tito, pour ne citer que ceux-ci ?

Cette question, l’on est tenté de se la poser, au regard des différentes initiatives développées par le président vénézuélien depuis son arrivée au pouvoir en 1999. En rappel, le non-alignement, né en pleine guerre froide, à l’époque où les deux blocs (Est et Ouest) se disputaient l’hégémonie du monde, s’était donné comme ligne de conduite de se situer à équidistance de Moscou et de Washington, les deux épicentres de ce conflit Est - Ouest. Après l’Amérique latine où il a réussi plus ou moins avec ses pairs (Castro, Lulla, Morales) à constituer un bloc contre le capitalisme, notamment yankee, l’Asie où il forme avec le président iranien Mahmoud Ahmadinejad un parfait duo antilibéral, Hugo Chavez s’intéresse au continent africain. Après le Mali hier, Chavez se trouve actuellement au Bénin.

Mais, pourquoi le Mali et le Bénin ? Certes, ce n’est pas la première fois que celui que certains qualifient de fils spirituel de Fidel Castro foule le sol africain, puisqu’il a participé au dernier sommet des chefs d’Etat de l’Union africaine en début juillet dernier à Banjul, en Gambie. Mais le choix de ces deux pays de l’Afrique de l’Ouest n’est certainement pas fortuit. On peut penser que les présidents Amadou Toumani Touré et Thomas Yayi Boni présentent un intérêt particulier pour l’homme fort de Caracas : ils sont beaucoup plus en phase avec leurs peuples qui les ont élus démocratiquement sans manipulations internes ou ingérences extérieures. En effet, Hugo Chavez, qui doit sa légitimité au soutien populaire et se considère comme " fléau de l’oligarchie et héros du peuple" dans son pays, a certainement trouvé en ces deux chefs d’Etat, des partenaires sûrs.

Il est clair que ce séjour en terre africaine du fondateur du "Movimiento Quinta Republica" (Mouvement pour la cinquième République) constitue une bonne occasion pour lui de récolter des dividendes et des appuis diplomatiques dans le cadre de sa croisade anti-américaine. N’est-ce pas lui qui, lors du sommet de l’UA en Gambie, a demandé à l’Afrique de développer des liens plus étroits avec l’Amérique latine pour contrer "le danger de l’hégémonie des USA" ?

Ceci étant, quels peuvent être les enjeux socioéconomiques de cette visite du président Chavez pour son pays, le Vénézuela, et pour le Mali ou le Bénin ? En dehors du fait qu’il est l’un des gros producteurs de pétrole de la planète (5e rang), le Vénézuela semble logé à la même enseigne que le Mali et le Bénin : la pauvreté de la majorité de ses habitants. Issu d’une famille modeste, Hugo Chavez s’évertue, depuis sa prise du pouvoir, à réduire les inégalités sociales dans son pays à travers la mise en oeuvre de son programme de " révolution bolivarienne". Sa venue en terre africaine est donc une belle occasion pour lui de s’imprégner de l’expérience de ses hôtes africains.

C’est sans doute dans cette perspective qu’il a visité au Mali des réalisations socio-économiques, et signé, avec les autorités de ce pays, divers accords relevant des secteurs sociaux (éducation, santé, etc.). Hugo Chavez a mis à profit son séjour pour s’imprégner du mode de fonctionnement de ce qu’on appelle, à Bamako, "la banque des pauvres", et a prospecté les perspectives de financement des micro-projets. Mais les avantages à tirer en pareille rencontre n’étant pas exclusifs, les dirigeants béninois et malien ne devraient pas être en reste, surtout que le président Boni Yayi, en ce qui le concerne, vient d’hériter d’une situation économique difficile.

A ce titre, la visite de Hugo Chavez est avantageuse à plus d’un titre, en ce sens qu’elle offre une opportunité aux deux pays de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) d’expérimenter d’autres formes de coopération qui, sait-on jamais, pourraient se révéler plus porteuses en matière de lutte contre la pauvreté que la traditionnelle coopération Nord-Sud. Sans compter que le Vénézuela, en ces temps d’embellie des cours du pétrole, dispose d’importants capitaux dont il pourrait investir une partie dans ces Etats, à des conditions moins draconiennes, étant donné l’orientation antilibérale du régime Chavez.

Mais, au-delà du Mali et du Bénin, cette présence du Vénézuela pourrait être une alternative pour la majorité des pays du Sud, toujours confrontés aux mêmes problèmes de développement. Elle semble, en effet, constituer une véritable chance pour eux de diversifier et de renforcer la coopération Sud-Sud. Mais sauront-ils, englués qu’ils sont dans leur apparent confort douillet mais suicidaire de la classique coopération avec les puissances occidentales, saisir cette occasion ?

Le Pays

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