LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Soyez un repère de qualité. Certaines personnes ne sont pas habituées à un environnement où on s’attend à l’excellence.” Steve jobs

Audiences foraines en Côte d’Ivoire : Ces "sauterelles" qui empestent la Côte d’Ivoire

Publié le mercredi 26 juillet 2006 à 07h10min

PARTAGER :                          

"Abidjan est gâtée". C’est le refrain d’une chanson mijotée sur le rythme zouglou. Dans la réalité, Abidjan est vraiment "gâtée" et, plus que la seule capitale économique, c’est le pays entier qui subit les effets dévastateurs d’une crise qui perdure.

La situation, sans être dramatique, est tristement préoccupante pour les populations, qu’elles soient ivoiriennes de souche ou étrangères. La route de la paix, à l’instar des avenues et autoroutes ivoiriennes parsemées de nids de poule, est révêtue d’embûches de toutes sortes.

Aujourd’hui, plus que jamais, les prémices d’affrontements violents généralisés entre les militants du parti au pouvoir et ceux de l’opposition affleurent, et se précisent. Déjà, Divo, ville située à 203 km d’Abidjan, a compté ses premiers morts et soigné ses dizaines de blessés, de même que la cité balnéaire de Bassam a connu ses bagarres qui se sont soldées par un mort, suite à la remontée de la tension sur les bords de la lagune Ebrié. Une fois de plus, deux camps se dégagent et campent sur leurs positions respectives, ne voulant visiblement céder la moindre once de terrain.

Les partisans du Front populaire ivoirien (FPI), le parti au pouvoir, dans ce bras de fer qu’ils engagent avec ceux de l’opposition, font une fois de plus, preuve de mauvaise foi qui n’a d’égale que celle de leurs leaders. Pascal Affi N’Guessan avait annoncé les couleurs en signifiant sans ambages que le FPI s’opposera à la tenue des audiences foraines par tous les moyens. Même par la violence ? "Par tous les moyens", a répondu le président du FPI. Prenant au mot leur chef politique, "le Général" Blé Goudé et ses "jeunes patriotes" ont repris la rue en main.

Agissant en véritables terroristes et en vandales du pire acabit, ils contraignent les populations à se terrer chez elles et n’hésitent pas à violenter les rares téméraires qui osent braver les récurrentes opérations "ville morte". S’enfonçant désespérément dans les sillons du concept xénophobe de l’ivoirité dont se nourrissent à l’excès des politiciens sans vergogne, les adeptes du FPI et leur gourou, Laurent Gbagbo, font vivre l’enfer à des étrangers vivant en Côte d’Ivoire depuis des décennies.

Certains de ces "étrangers" ont même presqu’oublié qu’ils ont une patrie d’origine. Ils ont tout investi sur le sol ivoirien. Ils y ont fondé leur famille et leurs enfants ont rarement fait le voyage initiatique sur la terre de leurs ancêtres. Ils ne connaissent que cette Côte d’Ivoire dont leurs parents et grands parents ont contribué à l’essor économique. En tout cas, l’"étranger" se sentait naturellement chez lui en Côte d’Ivoire au temps jadis où cette terre d’accueil avait pour dirigeant le très regretté Félix Houphouët Boigny. Persécuter de nos jours les étrangers et les chasser comme de vulgaires envahisseurs, ressemble fort à de l’ingratitude de la part des Ivoiriens. Ses moments de gloire et sa grandeur économique, la Côte d’Ivoire les a acquis à la sueur du front des étrangers aussi.

Ces "étrangers", notamment des ressortissants de pays voisins, vivent un véritable enfer, du fait des "jeunes patriotes", leur seul tort étant d’être allés dans un pays voisin pour monnayer leur force et leur intelligence contre des espèces sonnantes et trébuchantes.

Qu’ont-ils à voir avec la politique et les audiences foraines qui permettront de délivrer des papiers à des Ivoiriens, du reste heureux de cette aubaine ? La nationalité ivoirienne, qui en veut, comme nous le titrions dans notre publication du vendredi 21 juillet dernier ? Selon des politiciens du dimanche du FPI, qui n’ont d’autres arguments auxquels s’accrocher que de brandir l’épouvantail de l’invasion de la Côte d’Ivoire par des étrangers, des Burkinabè y seraient convoyés par cars entiers pour être recensés comme Ivoiriens, dans le cadre des audiences foraines. Les tenants de cette conception semblent ignorer qu’aucun Burkinabè n’a intérêt à ce que la Côte d’Ivoire s’embrase.

Nous y avons tous de la famille. Mieux, au temps des vaches grasses en Côte d’Ivoire, les Burkinabè restés au pays en profitaient énormément, puisque leurs parents qui sont allés chercher fortune dans les campements de cacao pensaient toujours à eux en termes de transferts d’argent. Maintenant, la tendance s’est inversée, car, c’est d’ici qu’il faut envoyer des mandats ou quelquefois des vivres.

Ironie du sort, des étrangers vivent les pires moments de leur existence dans une Côte d’Ivoire dirigée par un parti socialiste et présidée par Laurent Gbagbo, un historien qui oublie ou feint d’oublier l’histoire des peuples. Un pays peut-il se livrer à une purification ethnique ou bétonner ses frontières dans un monde devenu un gros village et dans une Afrique où tout est partagé traditionnellement avec l’hôte ou le voisin ?

En tout cas, la Côte d’Ivoire est sur une pente raide à cause d’un pouvoir mal inspiré pour qui les audiences foraines, qui sont un pas vers les élections, donc la paix, constituent un danger pour leur règne taché de sang d’innocentes populations. Gbagbo et les autres savent-ils seulement que le petit peuple ivoirien est au bord de l’asphyxie ? Le "Fils de Mama" sait-il que son départ, ou à défaut l’organisation d’élections transparentes le grandiraient, mieux que son obstination à s’accrocher à un pouvoir qui ne lui permet de diriger qu’une portion de territoire ? On attend de voir d’où viendra le salut que nous espérons tous pour la Côte d’Ivoire.

Le Pays

PARTAGER :                              

Vos commentaires

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique
Sénégal : Le premier président de la Cour suprême limogé