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Espagne : Le mensonge d’Etat sanctionné

Publié le mercredi 17 mars 2004 à 07h27min

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Ainsi donc, José Maria Aznar et son parti ont payé un lourd tribut
des attentats survenus le 11 mars dernier. Les 34,57 millions
d’électeurs appelés à renouveler le parlement ont accordé la
majorité de leurs suffrages au Parti socialiste qui, contre toute
attente, présidera aux destinées de l’Espagne pour les quatre
années à venir.

Ce basculement de l’opinion, alors que tous les
sondages prédisaient une victoire de la formation au pouvoir, le
Parti populaire, est incontestablement lié aux attentats. Mais
plus que le crime, c’est le mensonge que les Espagnols ont
sanctionné. Au pays de Cervantes, on n’a pas supporté que les
partisans de Aznar développent un mensonge d’Etat pour
préserver leur mandat électoral. Car il s’agit bel et bien d’une
tentative de manipulation, qui, malheureusement pour ses
auteurs, a tourné court.

La précipitation des événements a fait
sauter la thèse de la responsabilité de l’ETA à laquelle le
pouvoir sortant s’agrippait désespérément. C’est oublier, par
cette stratégie, que la douleur du peuple espagnol ne saurait
être exploitée à des fins politiciennes.
La méfiance était pourtant là, dans l’esprit des gens, dès la
survenue de l’horreur du 11 mars.

L’Espagne était une cible
potentielle de tous les révoltés de l’intervention américaine en
Irak pour avoir pris fait et cause pour Washington. Au grand dam
de la majorité des Espagnols, José Maria Aznar a dépêché 1300
soldats en Irak pour soutenir la coalition. Il fallait donc s’attendre
à la tempête du 11 mars alors même qu’on a semé le vent en
Irak. Le Parti socialiste porte donc une lourde responsabilité
dans les attentats. C’est ce que les Espagnols ont voulu lui faire
savoir.

Mais pire, il quitte le pouvoir avec de nombreux passifs à
son compte. Il laisse une mauvaise image du personnel
politique qui est prêt à tout pour accéder ou se maintenir au
pouvoir. Mais en démocratie, ces fautes ne pardonnent pas et le
PP l’apprend à ses dépens. En outre, la diplomatie telle que
pratiquée par l’ancien Premier ministre a montré ses limites. La
décision d’envoyer les troupes en Irak s’est faite contre le gré du
peuple que l’on n’a pas écouté, ce qui est tout de même indigne
d’un Etat démocratique.

On peut dès lors se demander si Aznar
a agi pour les intérêts de l’Espagne ou pour les siens propres.
En tout cas, l’histoire montre que son choix est un fiasco. Non
seulement il n’a pas permis d’éradiquer la violence en Irak et d’y
asseoir une démocratie, mais en plus il rend vulnérable
l’Espagne qui est frappée au coeur. La mort des 200 personnes
le 11 mars aurait-elle pu être évitée ? Certainement, si Aznar
n’avait pas violé la volonté de son peuple en soutenant Bush.

A
travers l’Espagne, c’est toute l’Europe coalisée qui est ainsi
frappée. Un avertissement pour les autres pays dont l’aventure
irakienne fut généralement contestée par leurs opinions
nationales. Le comble, c’est que George W. Bush, leur parrain et
maître à penser, semble plus se préoccuper de la sécurité à
l’intérieur des Etats-Unis que nulle part ailleurs.

Depuis qu’il a
lancé sa croisade, en effet, Bush a déployé une batterie de
mesures pour sécuriser son pays, parfois même au risque
d’exaspérer ses alliés européens, cas notamment des visas
biométriques et de certaines autres contraintes de voyage.
Pendant ce temps, l’Europe semble figée face à la menace dite
terroriste, ce qui l’expose naturellement aux attentats.

Mais on
peut croire que l’arrivée du PSOE (Parti socialiste ouvrier
espagnol) au pouvoir, a cassé un ressort dans la machine
européenne au service des USA. Les socialistes ont annoncé
qu’ils procéderont au retrait des troupes espagnoles. Ils auront
donc désormais une conduite plus réservée sinon hostile
vis-à-vis de la politique américaine. L’axe Madrid - Londres -
Rome a pris un sérieux coup avec la faille intervenue en
Espagne et ne pourra plus fonctionner comme avant.

Il appartient donc à Bush de tirer enfin les leçons de sa gestion
des affaires du monde. La voie de la force est manifestement
inopérante et produit les effets contraires. Le sentiment
antiaméricain qu’elle crée, amplifie la révolte des extrémistes
qui pensent que la violence appelle la violence. Cette remise en
cause de sa politique pourrait peut-être coûter son poste à
Bush, mais elle aurait le mérite du courage.

Celui de reconnaître
des erreurs fondées de surcroît sur du mensonge.
Ce mea culpa grandira quelque peu l’administration Bush qui,
aux yeux de bon nombre de peuples, apparaît comme le
fossoyeur de la paix et de la justice sur terre.

Après quoi, l’on
devra penser à la mise en oeuvre de règles convenues et
acceptées de commun accord et devant guider le monde où
tous, même les Palestiniens et les poseurs de bombe, aspirent
à la justice et au bien-être. Bush et ses acolytes ont donc intérêt
à constituer avec les autres, un axe unique, celui de la
prospérité de l’humanité tout entière.

Le Pays

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