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Grâce présidentielle : Un avocat dénonce une injustice faite à son client

Publié le mardi 4 juillet 2006 à 07h38min

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Le parquet de Bobo refuse au justiciable François Daniel Georges de bénéficier de la grâce que lui a accordée le Président du Faso. C’est ce qui ressort de cette lettre ouverte adressée au chef de l’Etat par l’avocat du justiciable, Me Ambroise Ségui Farama, dans laquelle il demande au premier magistrat de "prendre toutes les mesures nécessaires à l’exécution du décret de grâce".

En acceptant d’exercer la profession d’avocat, je me suis engagé à assister, défendre et représenter mes clients devant toutes les juridictions, instances et organismes où l’exercice de cette noble et exaltante mission est possible, et ce en tant qu’« auxiliaire de justice ». En cette qualité d’ « auxiliaire de justice », je me dois d’œuvrer à la réalisation de l’idéal de justice dont vous êtes le garant.

C’est donc en ma qualité d’ « auxiliaire de justice », et en votre qualité de garant de cette justice, que je m’adresse à vous pour les faits suivants qui, à mon avis, constituent une violation à dessein des lois et règlements, que j’ose toujours croire républicains.

En effet, M. François Daniel Georges a été condamné par jugement n° 717 en date du 2 août 2005 par le Tribunal de grande instance de Bobo Dioulasso siégeant en matière correctionnelle et en 1er ressort, à vingt-quatre (24) mois d’emprisonnement ferme, dix (10) ans d’interdiction de séjour et une amende d’un million (1 000 000) de F CFA.

Après avoir interjeté appel et désisté dudit appel, par acte transmis au greffe du Tribunal de grande instance de Bobo Dioulasso le 3 octobre 2005 sous le n°817, mon client a été gracié d’office, sans aucun recours de sa part, par vous, Monsieur le Président, en vertu des pouvoirs discrétionnaires constitutionnels à vous conférés par l’article 54 de la loi suprême du Burkina Faso.

Cette mesure de grâce contenue dans le décret n°2005 666/PRES/PM/MJ du 30 décembre 2005 constitue, à mon avis, une décision exécutoire et insusceptible de toute voie de recours, pas même celle reconnue aux actes administratifs ordinaires.

Monsieur le Président,

Malgré cette décision par laquelle vous avez accordé une remise du reliquat des peines privatives de liberté au condamné François Daniel Georges, ce dernier demeure toujours sous les verrous de la Maison d’arrêt et de correction de Bobo ¬Dioulasso, dans un état de santé précaire aux motifs, selon le parquet de ladite ville, que :

- d’une part, "le décret accordant le droit de grâce au condamné est entaché d’illégalité car la condamnation n’était pas définitive ».

- et d’autre part, "lorsque l’acte administratif est entaché d’une illégalité manifeste tenant à la violation d’indications légales précises, en dehors de la juridiction administrative, toute autre juridiction devant laquelle ledit acte est invoqué, ou devant laquelle les effets dudit acte vont se répercuter, peut en tirer les conséquences juridiques de l’illégalité, comme l’aurait fait une juridiction administrative ".

Monsieur le Président,

Pour ma part, et celle de tout autre juriste de bonne foi, le parquet, au regard de la loi portant organisation judicaire au Burkina Faso, n’est pas une juridiction et ne saurait se substituer à aucune autre juridiction. Mieux, à supposer même qu’il ait été une juridiction, le décret présidentiel dont il est question est insusceptible de tout recours.

Le parquet ne peut donc s’ériger en juridiction et s’autosaisir d’une question dont il n’a reçu aucune compétence, et statuer en fait en maintenant mon client sous les verrous parce que la mesure présidentielle serait, selon lui, "illégale".

Monsieur le Président,

Ce sont vos pouvoirs discrétionnaires qui sont injustement remis en cause par le parquet de Bobo Dioulasso pour faire injustice à un justiciable, on ne sait pour quels mobiles. C’est pourquoi, en cette veille de la session ordinaire du Conseil supérieur de la Magistrature, je vous saisis, avec la ferme conviction que vous ne saurez cautionner de telles injustices dans un Etat de droit.

Et que vous accepterez prendre toutes les mesures nécessaires à l’exécution du décret de grâce que vous avez bien voulu accorder à l’occasion du nouvel an à des condamnés, dont mon client François Daniel Georges. Ma démarche est d’autant plus fondée que l’article 13 alinéa 1 de la loi n°35-2001 portant composition, attributions, organisation et fonctionnement du conseil supérieur de la magistrature dispose : "Le Conseil supérieur de la magistrature donne son avis :

- sur toute question concernant l’indépendance de la magistrature et sur l’exercice du droit de grâce".

Dans l’attente, veuillez, Monsieur le Président, accepter mes respectueuses salutations.

Ambroise Ségui FARAMA
Avocat à la Cour

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