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Diplômes et expériences acquis en cours de carrière : "Monsieur le ministre, revoyez le dossier"

Publié le mardi 4 juillet 2006 à 07h38min

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Un cadre du ministère de la Fonction publique et de la Réforme de l’Etat s’est invité dans les débats sur la gestion de certains dossiers du département. Il a décidé d’évoquer le dossier des diplômes et expériences acquis en cours de carrière. Un dossier dont il demande le réexamen par le ministre afin de "résoudre le problème une bonne fois pour toutes".

Depuis un certain temps, des écrits virulents ont été publiés sur la gestion de certains grands dossiers du ministère de la Fonction publique et de la Réforme de l’Etat. Au nombre de ces dossiers, c’est surtout celui relatif à la situation des agents publics de l’Etat reconvertis de fait dans un emploi de niveau supérieur que celui pour lequel ils ont été recrutés qui requiert mon attention.

Monsieur le ministre, au nom des sentiments de respect et de considération que je cultive envers votre personne, au nom de l’esprit de collégialité et d’entente cordiale que vous avez su inculquer à l’ensemble des agents travaillant sous votre tutelle, je viens par la présente vous demander de ressortir ledit dossier, de reconsidérer la question des diplômes et des expériences acquis en cours de carrière, et de résoudre le problème une bonne fois pour toutes. Mes arguments sont les suivants.

Premièrement, votre département même regorge de cette catégorie d’agents de l’Etat concernés par la circulaire que vous avez fait diffuser en mars 2005. Au départ, beaucoup de ces agents avaient apprécié votre initiative, car aucun de vos devanciers ministres n’avait osé s’attaquer à un tel épineux dossier. De nos jours, ces agents sont de plus en plus déçus et commencent à désespérer. Certains sont très proches de vous mais n’osent jamais en parler.

Traitement officieux de dossiers

Deuxièmement, des bruits de plus en plus persistants s’élèvent pour dénoncer une certaine irrégularité dans le traitement de la question des diplômes et autres expériences acquis en cours de carrière. Ces bruits font état d’un traitement officieux des dossiers de certains agents parrainés par des sommités de notre pays.

On cite, entre autres, le cas d’un instituteur qui serait rentré du Canada avec un diplôme en planification de l’éducation, et qui se serait fait reclasser en 2004. A l’issue dudit reclassement, le monsieur aurait été nommé conseiller d’un ministre de la République avant de se faire propulser conseiller culturel dans une ambassade du Burkina ouverte dans un grand pays occidental. Un autre instituteur ayant effectué des études en économie de l’éducation en France a obtenu un reclassement et se trouverait actuellement en fonction dans un des ministères en charge de l’Education dans notre pays.

Ces deux agents avaient été admis à des stages de perfectionnement ou de spécialisation, ce qui, du reste, ne donne droit à aucun reclassement catégoriel, selon les textes régissant les stages professionnels en vigueur à la Fonction publique.

Près d’une cinquantaine d’agents auraient bénéficié d’une telle technique de requalification. On en dénombre dans tous les ministères. Cette liste des agents requalifiés circulerait actuellement entre les agents de votre département concernés par la circulaire. A ce qui se dit, une correspondance anonyme devrait bientôt vous parvenir avec la fameuse liste pour attirer votre attention sur cette irrégularité flagrante.

L’ambiance est donc quelque peu lourde au sein de votre département ministériel, et les commentaires vont bon train. Il est clair qu’une telle situation affecte les relations entre travailleurs, et n’est pas propice à de bons rendements individuels ou collectifs.

Troisièmement, de petits esprits aux savoirs poussiéreux ont réussi à tromper votre vigilance pour occuper des postes de proximité dans votre cabinet. Ces individus vous prodiguent de mauvais conseils sur le fameux dossier.

Malgré leurs expériences, ils ne se rendent pas compte que nous sommes passés d’une Fonction publique de carrière à une Fonction publique de contrat et d’excellence.

Monsieur le ministre, depuis que vous êtes à la tête du département, vous avez entrepris des réformes courageuses, des initiatives allant dans le sens de la promotion des agents de la Fonction publique. A la fin de votre mission, le peuple vous jugera sur votre bilan, et aucun de ces connaisseurs en droit du travail ou en gestion des ressources humaines que j’évoquais tantôt ne se portera garant pour vous soutenir au cas où vous devriez répondre de vos actes.

Tout au contraire, ils seront les premiers à se plaindre des bonnes décisions qu’ils vous avaient pourtant proposées, et que vous n’aviez pas su faire appliquer.

A mon avis de juriste ayant acquis une certaine somme d’expérience en matière de gestion des ressources humaines, je vous conseille de revoir le dossier de ces agents concernés par la circulaire n°2005-032-MFPRE du 16 mars 2005. Reconvertissez ces agents dans de nouveaux emplois par des décisions de requalification de stage. Les incidences financières de cette reconversion interviendront ultérieurement comme nous sommes en train de le faire pour les avancements de 1999, de 2001 et de 2003.

Mimétisme sécuritaire

Monsieur le ministre, des instituteurs de ce pays sont devenus des gestionnaires en ressources humaines après une somme d’expérience et / ou de formation, d’autres sont devenus des conseillers d’administration scolaire. Des professeurs de ce pays sont devenus des planificateurs scolaires, d’autres sont devenus des diplomates. Des militaires de ce pays sont devenus des gendarmes et des gendarmes sont devenus des administrateurs civils.

Ce qui importera dans cette perspective de requalification, c’est essentiellement le contenu de la formation et la crédibilité de la structure formatrice. Les aspects de conformité avec les textes relèvent parfois d’un mimétisme dont les fonctions publiques africaines éprouvent des difficultés à s’en défaire.

Ceux qui sont rigoureusement cloîtrés derrière les normes et les textes alourdissent inutilement le processus de réforme et de modernisation de l’Etat. Les textes ne valent que

ce que les circonstances de fonctionnement veulent qu’ils soient. Et vous l’avez bien compris, Monsieur le ministre, en initiant une telle réflexion globale.

Une fois cette opération terminée, nous retrouverons une certaine lisibilité, une certaine homogénéité et de la clarté dans la mise en oeuvre des différents emplois de notre Fonction publique. Vous vous rendrez compte, Monsieur le ministre, des bienfaits de cette réflexion que vous avez entreprise, et que d’autres, pour des raisons égoïstes, veulent contrecarrer.

La Fonction publique de notre pays a la chance d’avoir à sa disposition un vivrier très riche de personnels ayant acquis des formations intéressantes de haut niveau dans plusieurs domaines professionnels. Utilisons-les avec intelligence et pragmatisme dans les différents réseaux d’emplois de notre pays. Et si des réseaux venaient à manquer, créons-en. Ceci relève de la logique d’efficacité, de performance et de rentabilité que notre Fonction publique prône.

Tout en espérant que vous comprendrez mon anonymat, je vous prie de croire, Monsieur le ministre, en l’expression de ma considération distinguée.

Un cadre du ministère de la Fonction publique et de la Réforme de l’Etat

Le Pays

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