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Sociétés d’Etat liquidées : Les ex-travailleurs comptent leurs morts

Publié le mardi 4 juillet 2006 à 07h37min

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Las d’attendre d’être indemnisés depuis des années, des ex-travailleurs de 5 sociétés liquidées (Faso Fani, CEMOB, ONBAH, SOREMIB et ONASENE) ont décidé une fois de plus, de s’adresser au ministre des Finances et du Budget à travers une lettre ouverte.

Dans celle-ci, ils rappellent les décisions de justice condamnant l’Etat à indemniser les travailleurs licenciés et qui n’ont pas encore été exécutées. Toute chose qui leur rend la vie de chômeur difficile avec pour conséquences la non scolarisation des enfants, la dislocation de foyers et beaucoup de morts dans leurs rangs. A la date du 29 juin 2006 (celle de la lettre ouverte), le décompte macabre faisait état de plus de 100 morts.

Nous avons l’honneur de vous rappeler les liquidations judiciaires ou administratives des sociétés sus-citées.

La perte de l’emploi dans un pays pauvre comme le Burkina Faso constitue, en elle-même, un drame pour les travailleurs et leurs familles. Chaque jour qui passe ne fait qu’augmenter les angoisses du licencié. Pour la plupart des sociétés citées ci-dessus, le calvaire des ex-travailleurs va de 4 ans, au minimum, à 17 ans. Ceci pour vous dire que les chômeurs et leurs familles ont déjà beaucoup attendu et trop souffert. Parmi les nombreuses conséquences de cette situation, nous notons le manque de nourriture dans les foyers, de moyens pour se soigner ; la déscolarisation des enfants, etc.

Faso Fani

En rappel, le Conseil des ministres, en sa séance du 7 mars 2001, a décidé de la liquidation judiciaire de FASO FANI, ainsi que du règlement du volet social (droits légaux et indemnités négociées) par le budget de l’Etat. Dans la sentence arbitrale du 11 juillet 2003, L’Etat burkinabè a été condamné à payer la somme de 848 157 805 F CFA aux ex-travailleurs. Depuis bientôt trois ans que nous attendons l’exécution de cette sentence, nous comptons 48 personnes décédées, dont la dernière le 28 mai 2006, pour un effectif de 430 travailleurs mis à la rue depuis le 7 mars 2001. Quant au bilan à présenter par le syndic liquidateur sur l’avance de 2 270 000 000 F CFA qui lui a été versée par l’Etat et qui conditionne le règlement de la sentence, nous voudrions vous informer que le dossier de liquidation est clos depuis le 15 juin 2005 par jugement N°311/2005 ; donc pour nous cette question n’est plus d’actualité.

CEMOB (Compagnie d’exploitation de mines d’or du Burkina)

Après le licenciement des travailleurs le 31 octobre 2000, l’Etat burkinabè a été condamné par la Cour de cassation, la plus haute juridiction du pays, à les indemniser, et ce depuis le 15 janvier 2004. Il a été clairement établi que l’Etat a négocié et vendu les titres miniers, y compris le patrimoine, à un repreneur. Ce qui devrait se faire en tenant compte de l’indemnisation des travailleurs qui ont été chassés, en violation des textes. Contre toute attente, le syndic liquidateur n’a toujours pas exécuté certains points d’accord du procès-verbal de conciliation partielle, et des arrêts du Tribunal de travail restent toujours en souffrance d’exécution. Nous avons, à ce jour, plus de 22 morts, dont beaucoup d’entre eux par manque de soins.

ONBAH (Office national des barrages et des aménagements hydro-agricoles)

Les travailleurs ont été licenciés depuis le 30 janvier 2002, et attendent toujours le règlement de leurs indemnités. D’autre part, les actifs de la société ont permis de réaliser une vente aux enchères nettement supérieure au montant des indemnisations.

Une sentence arbitrale a été notifiée à l’Etat, par le biais du ministère de l’Agriculture, de l’Hydraulique et des Ressources halieutiques, depuis le 12/11/2002, qui est restée sans suite. Nous comptons présentement 12 morts, dont des cas de suicide. Il y a seulement une semaine, un des nôtres a été découvert en état de décomposition très avancée dans sa maison, décédé depuis trois jours sans aucune assistance.

SOREMIB (Société de recherche et d’exploitation minière du Burkina)

Depuis les vagues de licenciements qui ont secoué cette société en 1989, jusqu’à sa fermeture en août 1999, beaucoup de dossiers restent pendants en justice.

Des travailleurs licenciés et réhabilités attendent toujours le règlement définitif de leurs indemnités, d’autres aussi attendent l’exécution de sentences du Tribunal de travail. Nous comptons, à ce jour, près de 60 morts dont les ayants droit sont toujours dans le désespoir.

ONASENE

Cette société étatique liquidée depuis le 11/09/1996 par décret N°96-348/PRES/PM/MEE a fait l’objet d’une recommandation du Médiateur du Faso par lettre N°2006-040 du 6 février 2006 adressée à votre ministère, et qui est restée sans suite. Nous comptons à ce jour plus de 15 décès dont les ayants droit sont dans le désespoir. Par lettre N° 000643 en date du 2 octobre 1998, le secrétaire général du ministère de l’Environnement et de l’Eau, en réponse à notre correspondance en date du 1er septembre 1998, nous informait de la prise en compte du règlement de nos droits dans l’exercice du budget 1999, et depuis, aucune suite.

Monsieur le Ministre,

Nous avons lu dans Sidwaya N°5589 du 4 mai 2006 des propositions de paiement des indemnités des ex-travailleurs des sociétés d’Etat liquidées dès 2006, et dont nous souhaiterions avoir beaucoup plus d’informations.

Après plusieurs lettres de demande d’audience dont la dernière date du 8 juin 2006, nous publions la présente lettre pour informer l’opinion nationale et internationale de la manière dont vous mettez nos vies en péril par vos pratiques dilatoires et votre fuite de responsabilités.

Tout en vous souhaitant bonne réception, veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de notre très haute considération.

Ont signé :

FASO FANI,
Naby Gilbert

ONBAH,
Zallé Mahamadi

CEMOB,
Ouattara Soungalo

SOREMIB,
Yaméogo T. Francis

ONASENE,
Ouédraogo T. Gilbert

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