LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Nous sommes lents à croire ce qui fait mаl à сrοirе. ” Ovide

Sapouy : Le maire répond aux accusations du SG du CDP/Ziro

Publié le mercredi 28 juin 2006 à 08h22min

PARTAGER :                          

Baoui Nama

Baoui Nama est maire de Sapouy depuis 2000. A l’occasion des dernières municipales du 23 avril 2006, il a été reconduit à son poste sous la bannière de l’Union pour la république (UPR).

Des violences ont suivi cette élection, et, suite à l’intervention dans nos colonnes de Dominique Nama, secrétaire général du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) pour la province du Ziro, le maire de Sapouy fait entendre sa compréhension des faits à travers cet entretien. Il faut rappeler que le conseil municipal qu’il dirige est composé de 104 conseillers dont 58 de l’UPR et 46 du CDP.

"Le Pays" : Y a-t-il à Sapouy une milice CDP qui persécute les militants de l’UPR ?

Baoui Nama : Je persiste et signe, contrairement aux propos du secrétaire général provincial du CDP/Ziro, que j’ai lus dans les colonnes du Pays ("Le Pays" n°3642 du mercredi 14 juin 2000, ndlr), qu’il y a bel et bien une milice à Sapouy.

L’ancien député CDP du Ziro pourrait attester qu’il y a 8 ans, sa maison a failli être brûlée par 6 personnes dont les noms figurent dans la lettre que j’ai adressée au commissaire de police de Sapouy. La police poursuit du reste ses auditions, et le dossier sera transféré à la justice. La milice a donc été réactivitée, mais nous avons attiré l’attention des autorités, car nous n’avons pas été élu pour assister à une guerre à Sapouy.

C’est une milice qui a été montée par des gens du groupe du SG provincial du CDP depuis 8 ans. Ils l’ont mise en place et ils la financent. Tous ceux qui ont été attaqués l’ont été parce qu’ils portaient des habits aux couleurs de l’UPR, ou parce qu’ils ont battu campagne pour ce parti.

Pourtant, le SG provincial du CDP a affirmé que ce sont des gens armés de machettes par le maire, c’est-à-dire vous, qui ont attaqué les populations...

Cette affirmation du SG provincial m’a fait sourire. Le SG du CDP est un homme de droit de formation, mais je crois qu’il y a très longtemps qu’il a exercé sa fonction de juriste. Sinon il n’aurait pas parlé ainsi. C’est de la diffamation, et je peux ester en justice pour cela. J’invite d’ailleurs "Le Pays" à se rendre à Sapouy pour mener des investigations. S’il se trouve après cela que j’ai acheté, ne serait-ce qu’un couteau, pour un chef coutumier afin qu’il s’en serve pour égorger un simple poulet, alors je rends ma démission.

Tout ce que le groupe adverse a fait, il essaie de le mettre sur le dos du maire. Le maire que je suis n’a jamais acheté une aiguille qui a permis de piquer qui que ce soit, et je défie le SG provincial du CDP de donner la preuve de ses allégations. C’est très grave de sa part.

Et la milice dont vous parlez serait encadrée par un policier à la retraite, militant du CDP.

Cette milice est encadrée par un ancien policier. Je mets policier entre guillemets parce que c’était un ancien garde-cercle reversé dans la police, avec la fusion des corps. Cet homme n’a aucune formation pour mener une activité sécuritaire pour protéger qui que ce soit. Pendant la campagne électorale, c’est ce même policier et cette même milice qui sont allés décoiffer un restaurant d’une de mes tantes. Ils ont argué que c’est la tante du maire, et que son fils, un grand griot du coin, chanterait les louanges du maire.

C’est insensé de la part de quelqu’un qui se dit policier. J’ajoute aussi que le portable dont parle le SG dans son interview, et qui aurait été subtilisé, a été récupéré en même temps qu’un couteau, des mains de cet ancien garde-cercle, et remis à la police. Il avait osé sortir son couteau pour nous empêcher d’accéder à la cour royale.

On dit qu’à Sapouy, la police serait pratiquement sous votre contrôle.

Je n’ai aucune accointance avec la police de Sapouy. C’est vrai qu’en tant que maire, la police est mon bras armé. Je suis obligé de l’interpeller quand il y a des problèmes. Il y a eu beaucoup d’agressions de nos militants dans la cour royale, et nous avons demandé au commissaire de police d’intervenir.

Il nous a répondu qu’il est au courant des problèmes de Sapouy, mais qu’il n’avait pas à jeter de l’huile sur le feu. Pendant ce temps, les gens de l’UPR étaient pris pour cible, et blessés. Si le commissaire était quelqu’un d’acquis à ma cause et qui devrait réagir dès que le maire lève son petit doigt, je ne pense pas que toute cette pagaille serait arrivée. Il serait même intervenu dans la cour royale, le jour de l’élection du maire. Ce qu’il n’a pas fait. Alors que le patriarche et le policier dont parle le SG provincial du CDP avaient des couteaux, pendant que nous avions les mains nues.

Le problème que vous évoquez, au lieu d’être politique, serait en fait d’ordre coutumier, familial, selon le SG du CDP/Ziro.

Le SG provincial du CDP avait dit qu’il était gêné de parler du problème coutumier parce que la situation a commencé avec son propre père. Moi, je ne serai pas du tout gêné de dire la vérité afin que les gens sachent une fois pour toutes qu’il n’y a pas de problème coutumier à Sapouy. Le contentieux qui a existé quand le père du SG était responsable du village a été vidé. Le patriarche qu’ils sont allés amener en politique n’a plus droit à la chefferie. Quand le père du SG est venu à la tête des affaires coutumières à Sapouy, il a effectivement dit qu’il ne pouvait pas gérer ce volet des coutumes, parce qu’il était chrétien catholique.

Il a alors désigné ses deux successeurs immédiats, dont le patriarche en question, pour gérer la partie des offices purement coutumiers. Il a signifié auxdits successeurs qu’il gardait tout le reste des prérogatives, et que ceux-ci devaient lui rentre compte de tout ce qui se passait. Le SG provincial du CDP dit que ça n’a pas marché. Cela n’a pas marché, simplement parce qu’il y a eu une sorte de rébellion de cour. Le patriarche actuel a dit qu’après 3 ans d’offices coutumiers, il ne pouvait plus rendre compte au père du SG provincial du CDP.

Celui-ci a alors répliqué qu’il ne pouvait plus laisser aux deux le pouvoir coutumier qu’ils exerçaient en son nom. C’est ainsi qu’il a décidé de les dessaisir de ce pouvoir, et de le confier à leurs deux successeurs immédiats. Le cadet des deux qui ont été renvoyés de la cour, est revenu demander pardon au père de Dominique (le SG provincial du CDP, ndlr) et a manifesté son désir de réintégrer les offices coutumiers qu’il pratique en son nom (au nom du père du SG provincial, ndlr).

Il a donc été mis avec les deux autres, et ils sont devenus 3 à exercer lesdits offices, au nom du père du SG. Le patriarche actuel a refusé de demander pardon au père du SG. Ce dernier a alors déclaré ceci : "Même après ma mort, je vous invite à ne pas lui donner le couteau royal. Il n’a pas de sacrifice à faire dans la cour royale, tant qu’il ne viendra pas demander pardon de mon vivant." Les choses ont duré ainsi, jusqu’à ce que le père du SG meure à Ouagadougou.

Quand nous ramenions le corps à Sapouy, nous avons mis du retard parce que le patriarche actuel ne voulait pas que le corps entre dans la cour royale, en arguant que le défunt l’avait "enlevé" de la chefferie et que c’est à son tour de régner. Les 3 qui exerçaient les offices coutumiers se sont interposés pour que le corps entre dans la cour royale afin que les rites coutumiers soient accomplis, et qu’il soit également enterré selon les prescriptions de la religion chrétienne, parce qu’il a été chef de ce village (Sapouy, ndlr).

Le patriarche actuel a été forcé de quitter la cour royale. De 1996 à 2003, le successeur qui avait demandé pardon au chef, a régné, sans aucun problème. Où étaient-ils pour ne pas trouver que le patriarche est vivant, qu’il est plus âgé que celui qui vient de lui succéder et qu’il doit prendre sa place ? Personne n’a levé le petit doigt. Le chef a exercé les offices coutumiers jusqu’en 2003. Quelqu’un d’autre lui a succédé. Il n’y a pas eu de problème de 2003 à 2004. C’est au cours du règne de ce dernier que le groupe du SG provincial a demandé si on ne pouvait pas retourner le couteau royal à l’actuel patriarche. On lui a répondu que ce couteau ne pouvait pas lui être retourné.

Quand ce chef est mort en 2004, il y a eu le chef coutumier actuel qui se trouve être mon oncle direct. Il a régné sans problème, jusqu’au 16 octobre 2005, date à laquelle le groupe, je dirai la famille du SG est venue interpeller le chef coutumier actuel sur des propos diffamatoires qu’aurait tenus le représentant du chef coutumier le 2 juillet 2005 sur leur père, lors des festivités de l’école de Sapouy.

Après une réunion houleuse avec les notables, le groupe du SG a tenu une autre réunion pour décider qu’il ne reconnaît plus le chef actuel de Sapouy. C’est ainsi qu’ils ont décidé unilatéralement de coopter le patriarche et de le ramener de force pour qu’il reprenne le couteau royal. Ce qui est même contre la volonté de leur père.

En dehors de cela, le patriarche actuel n’est pas le seul patriarche qui a été exclu de la cour. Il y a leur oncle direct, c’est-à-dire le petit-frère de leur père qui a été exclu mais, ils ne l’ont jamais ramené, jusqu’à sa mort. Pourquoi au règne de mon oncle, veulent-ils que le couteau retourne à quelqu’un qui a été exclu ? Du fait qu’ils ont perdu sur le terrain politique, ce sont plutôt eux qui ressuscitent un problème coutumier pour créer de la confusion, de la pagaille à Sapouy. Ce sont de mauvais perdants. Le problème coutumier, je n’en parle plus.

Il suffit que le groupe du SG accepte que ce patriarche a été exclu par ses propres pairs et qu’il y a deux chefs qui ont régné par la suite. Pour le problème politique il faut qu’ils reconnaissent qu’ils ont perdu et qu’ils agissent en "gentlemans", comme le disait l’autre.

Quid du problème foncier à Sapouy ?

Il n’y a pas de problème foncier à Sapouy. Il n’y en a jamais eu et il n’y en aura pas tant que nous serons responsables de cette commune. C’est encore le groupe d’en face, à travers ce patriarche, qui crée les problèmes fonciers.

C’est ce patriarche qui est allé menacer des gens en leur disant qu’ils seraient déguerpis s’ils ne votaient pas pour le CDP. Nous par contre nous ne nous reprochons rien, nous avons fait une campagne propre. Pour les réalisations à notre actif à Sapouy, je peux citer l’abattoir, l’ouverture de voies routières, le recasement des populations qui ont été touchées par la construction de la route nationale n°6, etc.

Nous avons aussi embauché 5 personnes qui travaillent avec le maire et ses conseillers. Nous avons également travaillé à unir la jeunesse. A Sapouy, les gens ont compris que nous travaillons véritablement et j’invite le SG provincial du CDP à reconnaître sa défaite. D’ailleurs, ce n’est pas le CDP qui a perdu, c’est lui, l’homme qui a perdu. Il faut qu’il accepte de se remettre en cause et de se retirer du jeu.

Propos recueillis par Morin YAMONGBE

Le Pays

PARTAGER :                              
 LeFaso TV