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Moeurs : Les cadeaux « empoisonnés » de l’amitié en politique

Publié le samedi 17 juin 2006 à 10h50min

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Sous les tropiques, le tout pour le pouvoir est une question de vie ou de mort. C’est pourquoi l’irrationnel s’infiltre bien souvent dans ce qui ne devait être qu’un débat politique ou au mieux un simple jeu.

Dans le combat politique qui prend tout son sens ici, la volonté du peuple ne compte que pour du beurre malgré les discours surréalistes dans lesquels on entend clamer que le peuple veut ceci ou le peuple a décidé de cela. Neuf fois sur dix ce peuple-là est lui-même le premier surpris en apprenant ce qui aurait été sa décision. Mais tout est bon pour pérenniser un pouvoir au nom du peuple ou de réclamer le pouvoir au nom du peuple.

L’âpreté des grandes batailles et les grosses manuvres entre systèmes et partis politiques peuvent donc se comprendre. Là, l’Afrique n’invente rien. Par contre, là où elle a pu mettre son grain de sel, c’est dans la technique d’influence des rapports entre les hommes politiques, et cela au point d’inspirer certains Européens. Combien de fois, en effet, des leaders politiques européens n’ont-ils pas succombé à la tentation de consulter un marabout pour connaître leur avenir politique ?

L’Africain fait corps avec le mysticisme et ne se sent parfois rassuré que lorsque l’invisible vient à son secours pour des choses concrètes. D’ailleurs, dans ce recours aux forces occultes, c’est moins l’inflexion de la volonté du peuple qui est recherchée que celle des tenants ou futurs tenants du pouvoir, ceux qui peuvent de par leur volonté faire changer le cours de la vie professionnelle ou politique de leurs camarades.

Les canaris et cauris jetés au milieu des carrefours et autres sacrifices sont autant de moyens pour s’attirer les bonnes grâces des seigneurs. Dur, dur d’être haut responsable car, même les cadeaux à certaines occasions, sous le couvert du témoignage de l’amitié, sont des cadeaux « empoisonnés » enrobés d’incantations dictées par le souci du donateur de ne pas se faire oublier par le receveur. L’objet ou la bête ne sont jamais choisis par hasard ; ils le sont sur conseils des conseillers occultes.

Heureusement, le « poison » en question n’est pas destiné à tuer ni à faire du mal, car il faut bien que le receveur soit en vie et en forme pour accomplir l’espérance du donateur qui n’aspire qu’à être plus proche du demi-dieu et pouvoir boire le lait sans chercher à compter les veaux.

L’incongruité de la situation dans le cas de certaines consultations électorales de grande importance dont on ne se rend pas compte, c’est que c’est celui qui va à la quête des suffrages qui est inondé de présents dont il n’est pas demandeur. Tout ça est enveloppé dans l’expression pudique « cadeau de bienvenue ». Ces mendiants d’honneur et de postes (bien plus de postes que d’honneur) ressemblent bien au co-supplicié de Jésus qui lui disait : « Lorsque tu seras là-haut, souviens-toi de moi. »

Journal du jeudi

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