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Municipales 2006 : Le CDP entre décentralisation et démembrement

Publié le vendredi 26 mai 2006 à 07h53min

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Le plus dur commence donc pour le CDP et il n’a pas d’autres choix que de s’assumer. A défaut, la décentralisation risque pour lui de rimer avec démembrement, l’obligeant à faire l’amère expérience de l’adage selon lequel « qui trop embrasse mal étreint ».

C’est curieux la manière dont on aborde la question avec flegme pour ne pas dire plus les cartes étant comme laissées aux seules mains tout au plus des commissaires régionaux.

Avec dans les jours à venir la proclamation des résultats officiels des élections des conseillers municipaux du 23 avril 2006, on prendra le dernier virage du processus électoral devant concrétiser la communalisation intégrale du pays.

Au vu de la probable configuration de ces résultats, le CDP se taille la part du lion et tout devrait passer pour lui comme des lettres à la poste. Mais en réalité, il va en être autrement dans bien de contrées où malgré sa supra-majorité, il y aura de la bagarre. C’est donc dire que tout est loin d’être joué et que le jeu ne manquera pas d’intérêt. En effet, c’est un secret de Polichinelle que de dire que les ambitions se bousculent au CDP par rapport aux mairies et qu’elles sont parfois si tenaces qu’elles obligent la discipline et l’esprit du parti à prendre la fenêtre.

L’heure des grandes manœuvres a donc sonné, si ce n’est le cas depuis longtemps déjà, et il faudra s’attendre à des actes invraisemblables, certains n’hésitant devant rien pour parvenir à leurs fins. Assurément, il serait trop exagéré et se serait faire fausse route que de penser que la baraque va flamber, mais on entendra et verra des vertes et pas mûres, le parti nous ayant déjà par le passé obligé à assister à des scènes surréalistes de trahisons, de retournements de vestes, de compromissions, d’indisciplines, etc. qui ont mis sa cohésion et sa crédibilité à rude épreuve.

Les manœuvres ont donc déjà commencé et les bruits qu’on entend augurent un cru exceptionnel ou en tout cas qui n’aura rien à envier à ce qu’on a déjà vu. On ne devrait pas s’inquiéter de tous ces mouvements ou s’émouvoir outre mesure de l’imagination débordante de certains pour faire mordre la poussière à leurs adversaires, mais encore faudrait-il que l’on respecte un tant soit peu les formes et que tout cela participe au renforcement de la démocratie avec au bout des comptes des résultats conformes à la volonté des populations.

Malheureusement tout montre qu’on est loin de ces préoccupations dans la majeure partie des cas. C’est dire si le challenge qui s’impose au CDP est loin d’être relevé même si les intentions de le réussir sont affichées et les chemins apparemment balisés pour.

En effet, ici et là on prône le consensus et on semble travailler pour, mais comme dirait l’autre, de la coupe aux lèvres il y a du chemin. Il s’agit ni plus ni moins de parvenir à un juste équilibre entre les ambitions crypto-personnelles des différents impétrants, la volonté des différents patrons des régions d’assurer leurs leaderships personnels en positionnant leurs « hommes », la cohésion du parti, les capacités intrinsèques des militants qui seront promus à assumer les charges et les responsabilités qui seront leurs, face aux aspirations des populations et bien d’autres impératifs.

Les écueils seront nombreux pour y parvenir et bien malin qui pourrait assurer que partout la mayonnaise prendra et que la symbiose sera opérée.

Parce que vaincre un concept aussi malsain que pernicieux tel que celui de la catégorisation des populations en autochtones et étrangers, les premiers exigeant des droits, répondre aux sollicitations de notables qui veulent jouer des rôles majeurs, assurer certains équilibres naturels... ne sera pas une mince affaire.

A cela il faudra ajouter la gestion des ambitions des parachutés, ces cadres débarqués des cités urbaines et qui sont venus se faire élire avec les plus nobles intentions d’aider leurs frères mais dont certains cachent mal leur jeu de ne faire de ces élections que des tremplins pour des promotions autrement plus juteuses.

Le pire c’est qu’ils ne deviennent des boulets aux pieds des collectivités locales ou que lorsque la fièvre électorale tombera et que les problèmes à résoudre s’imposeront, ils ne reviennent sur leur sacerdoce et n’abandonnent les populations à leur triste sort. Le risque est réel et on se mordra les doigts d’avoir laissé la proie pour l’ombre ou de s’être un peu trop amusé avec le feu.

Le plus dur commence donc pour le CDP et il n’a pas d’autres choix que de s’assumer. A défaut, la décentralisation risque pour lui de rimer avec démembrement, l’obligeant à faire l’amère expérience de l’adage selon lequel « qui trop embrasse mal étreint ». C’est curieux la manière dont on aborde la question avec flegme pour ne pas dire plus les cartes étant comme laissées aux seules mains tout au plus des commissaires régionaux.

Sans être dans le secret des dieux, on a l’impression que tout cela manque de liant ce qui autorise à dire que ça pourrait aller dans tous les sens à telle enseigne qu’on pourrait se réveiller le lendemain de la mise en place des bureaux des conseils municipaux avec une sorte de "somatisation" du parti majoritaire, chaque commissaire politique régional (en tout cas ceux qui le peuvent) se muant en chef de faction. Ce sera alors bonjour les dégâts avec la porte ouverte sur des crises à répétitions.

Les faits sont là qui montrent que trop souvent ces responsables n’ont pas été capables de maintenir la cohésion du parti et de se mettre dans le moule de rassembleur que Blaise COMPAORE, le véritable patron, a toujours été et a cherché à être. Il y a donc de sérieuses raisons, sans jeter d’emblée la pierre à qui que ce soit, de s’inquiéter.

Il est plus facile de détruire que de construire, on le sait. Le CDP s’aura-t-il entretenir l’édifice bâti par Blaise COMPAORE ? C’est à voir et puisque c’est au pied du mur qu’on reconnaît le bon maçon, prenons notre mal en patience... rien que quelques jours encore..

Par Cheick AHMED

L’Opinion

P.-S.

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