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Destruction de l’environnement :"ça me fait atrocement mal"

Publié le lundi 22 mai 2006 à 08h28min

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Que de mutations ! Aujourd"hui, "l’environnement est brutalisé, bafoué, négligé, dégradé par l’homme". Face à ce "tableau lamentable", Lazare Yiogo, instituteur de son état, a décidé d’adresser cette lettre ouverte au ministre de l’Environnement et du Cadre de vie. Avec, à la clé, sept propositions pour que "l’homme aime, respecte, protège et soit un bon fils de cette terre".

La Terre, avec ce qu’elle contient à la surface comme en profondeur, est un don de Dieu fait gratuitement à l’Homme. Cette terre infiniment généreuse a nourri le premier homme depuis des millénaires jusqu’à nous aujourd’hui. Elle est amoureuse de nous, ses habitants qu’elle continue et continuera de nourrir autant qu’elle pourra jusqu’à la fin du monde.

Pour cela, l’homme à son tour doit aimer, respecter, protéger, être un bon fils de cette terre. Car pour notre bonheur, elle nous a tout donné : arbres, océans, pierres précieuses, animaux sauvages, oiseaux, et j’en passe, qui constituent des richesses inestimables. Notre mère terre contient tout ce qu’il faut à l’homme pour qu’il vive un paradis terrestre. Elle est notre mère nourricière. Elle nous nourrit comme la bonne mère nourrit son enfant. Raisons pour lesquelles, nous lui devons amour, sympathie, jalousie, protection, et nous devons la considérer plus qu’un trésor.

Or, qu’est-ce que nous constatons malheureusement aujourd’hui ? Cet environnement miséricordieux est brutalisé, bafoué, négligé, dégradé par l’homme. Je parle bien sûr de mon pays, le Burkina Faso. Il y a les feux de brousse, l’abattage anarchique des arbres, la destruction sauvage de la faune. Tout cela sous la barbe de nos responsables. Cela me fait atrocement mal. J’en souffre énormément. Oui, j’en souffre.

Dans un passé récent, au village, tout au tour des concessions, se dressaient de hauts arbres, de hautes herbes où plusieurs espèces d’oiseaux rivalisaient de leurs jolis et différents cris. Là, vivaient également tous les animaux de la brousse. La nuit tombée, on entendait sur les collines voisines les rugissements des lions, les hurlements des hyènes. Il suffisait de faire un petit tour non loin de ses concessions avec son arc et on avait le lièvre où la perdrix pour la sauce du soir. Les marigots, mares, fleuves, lacs qui ne tarissaient pas, tarissent aujourd’hui. Il y en a même qui n’ont plus de traces. Il pleuvait abondamment, si bien qu’on n’avait pas besoin de bombarder des nuages pour qu’il pleuve à coup de milliards de francs.

Aujourd’hui, plus rien. Tout est parti. Tout est sec, nu, vide, désert, dévasté. Eh ! Eh !

Lors de votre récente tournée, monsieur le ministre, dans les réserves et parcs à l’est du Burkina, nous vous avons vu en photo et à la télévision, avec des jumelles, admirer toutes sortes d’animaux. Ils gambadaient majestueusement dans les verdures. Les hippopotames et les poissons se disputaient les points d’eau. Ce sont des citoyens qui ont investi des centaines de millions de francs pour protéger ces forêts et ces animaux. C’est le fruit de leurs efforts.

"Essayez et le peuple exigera que vous restez ministre à vie !"

Vous, en tant que premier responsable de l’Environnement, vous devriez vous investir comme ces citoyens, mais sur toute l’étendue du territoire national. Ainsi, au lieu de vous déplacer si loin pour aller voir ce que vous avez vu, vous alliez voir tous ces animaux dans tous les quatre coins du Burkina Faso. Après votre visite, vous avez déclaré aux journalistes que le Burkina était le pays le plus riche en faune en Afrique occidentale. Cette déclaration m’a fait beaucoup de peine. Pourquoi ? Parce que tous les animaux que vous avez vus dans ces réserves peuplaient presque tous les coins du Burkina, il n’y a pas longtemps de cela (moins de 60 ans). Aujourd’hui, plus rien. Tout a disparu. Ne vous en êtes-vous pas encore rendu compte ?

Monsieur le ministre, faites reverdir le Burkina, notre chère patrie. Faites revenir tous ces animaux que nos enfants risquent de ne jamais connaître. Je vous demande de redéployer, suffisamment, des agents sur toute l’étendue du territoire, de jour comme de nuit. Evidemment, vous les mettrez dans de très bonnes conditions de travail et les armerez des orteils aux dents, comme au temps de la Révolution. Cette révolution que j’ai beaucoup appréciée, rien que pour ce côté, protection de l’Environnement.

Monsieur le ministre, je vois venir la question "Avec quels moyens ?" Si vous voulez les moyens, vous pouvez les avoir. Pour cela, je vous fais pêle-mêle ces propositions parmi tant d’autres.

1) Réclamez la moitié du budget national pour recruter suffisamment de personnel.

2) Demandez qu’on fixe les élections présidentielle, législatives et municipales le même jour. Et qu’on vous remette ces milliards de francs économisés. C’est parce qu’on a mangé qu’on connaît Démocratie.

3) Demandez qu’on supprime ou qu’on diminue ces inutiles et budgétivores séminaires, ateliers, rencontres, colloques dont on nous bourre les oreilles tous les jours.

4) Que nos "honorables" députés reviennent sur terre. Qu’ils aient pitié du pauvre peuple en diminuant leurs émoluments, leurs perdiems qui vident quotidiennement les caisses de l’Etat. Ainsi, ces milliards épargnés vous reviendront pour travailler.

5) Pourquoi ne pas diminuer les frais colossaux de missions et de déplacements de nos personnalités à l’intérieur comme à l’extérieur, pour vous permettre de travailler.

6) Que le président du Faso fasse revenir les centaines de milliards de nos francs que certains de ses ministres ont placés dans les banques étrangères, et vous aurez l’argent pour travailler.

7) Enfin, qu’on combatte avec la dernière énergie la corruption sous toutes ses formes. Et l’Etat aura l’argent pour vous. Ce que je viens de dire n’est pas une gageure, encore moins une utopie.

C’est un SOS qui vous est lancé, monsieur le ministre. Essayez et le peuple exigera que vous restiez ministre à vie pour reverdir le Burkina Faso, notre Cadre de vie.

Koudougou, le 10 mai 2006

YIOGO K. Lazare

Instituteur

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Vos commentaires

  • Le 5 juin 2006 à 02:30, par Etudiant à l’hexagone En réponse à : reponse sur le droit de préserver l’environnement

    c’est avec interêt que j’ai lu votre écrit, mais je voudrais toutefois vous rappeler que l’état de dégradation de l’environnement n’est pas le fait d’une seule personne ni la volonté d’une tiers personne, c’est l’ensemble de plusieurs facteurs (physique, social et économique) :
    Physique:le climat, les saisons, ....sont des facteurs aussi déteminant dans le procéssus de dégradation
    social et économique : la pauvrété , vous ne pouvez pas convaincre une population affamée de sauvegarder une resource dont elle a besoin pour survivre ; n’oubliez pas qu’à l’époque le Burkina comptait seulement 5 à 6 millions d’hbts et aujourd’hui plus de 10 millions, pour simplement vous informer que la démographie joue un rôle important dans la dégradation : exemple mettez 20 têtes de boeufs sur un espace d’un hectare pendant 10jours et 60têtes dans la même superficie voisine pendant la période et observez le changement au niveau de la flore et du sol.

    Permettez-moi de vous dire que vous avez pleinement raisons sur certains points, par exemple en redoublant d’effort dans la conservation, la sauvegarde et la restauration, on contribuera beaucoup au freinage du processus de dégradation de l’environnement. Cet effort rejoint vos points de vue sur les moyens humains, financiers à mettre en place.
    Malheureusement entre le pouvoir écologique et le pouvoir économique, en matière de gain il n’ y a pas de "match", l’Homme a toujours tendance aux raccourcits même si les conséquences négatives sont évidentes.
    La question qui reste poser est celle de l’avenir des générations futures ????

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