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Emploi : Un défi continental

Publié le vendredi 19 mai 2006 à 07h57min

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Ouagadougou a été pendant une semaine, la capitale des éminences grises africaines. Leur mission, repenser le développement d’un continent qui se cherche depuis l’aube des indépendances. Parmi leurs préoccupations, la création d’emplois pour des millions de jeunes déversés sur le marché du travail, diplômés ou pas.

La Banque africaine de développement (BAD) et la Commission économique pour l’Afrique (CEA) ont décidé, au cours des assises de Ouagadougou, de faire bouger les choses. Il s’agit d’agir sur tous les ressorts qui peuvent impulser la création de nouveaux emplois. Enfin ! est-on tenté de dire. Tant les dirigeants africains se sont contentés de gérer la routine, avec comme principaux indicateurs, le maintien des équilibres macroéconomiques et le paiement des salaires des agents de la Fonction publique. Le nombre de chômeurs qui va grossir l’effectif des populations désoeuvrées des villes n’était pas source d’inquiétude pour les gouvernants tant que ceux-ci ne menaçaient pas le stabilité des pouvoirs en place.

Mais voilà, depuis 2004, le sommet des chefs d’Etat africains sur l’emploi qui a pris conscience de la gravité du mal, a décidé de prendre le taureau par les cornes. Une déclaration de Ouagadougou marquant leur engagement avait été adoptée avec, à l’appui, un plan d’action. Entre- temps, le sommet mondial de l’ONU est revenu sur la question en assignant à l’emploi un rôle essentiel dans la réalisation des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD).

Le constat de la CEA et de la BAD n’est pas du tout flatteur pour le continent : 10,5% de taux de chômage. Les engagements n’ont pas fait l’objet d’un suivi par les gouvernements. En clair, ils sont peu nombreux à avoir intégré le paramètre emploi dans leurs stratégies de développement. Pourtant, selon les spécialistes, la santé économique d’un pays se mesure en fonction du taux de chômage de sa population active. Le nombre d’emplois est un signe de vitalité économique et marque du même coup l’absorption par le marché du travail. Une économie qui ne crée pas d’emplois, voit grossir son taux de chômage, synonyme de pauvreté.

La misère est aujourd’hui source d’exode rural, puis d’immigration vers l’Europe avec tout ce que cela comporte de risques et de fuite de cerveaux.

Sur le continent, le plus gros pourvoyeur d’emplois stables demeure l’Etat, la grande masse des travailleurs se trouvant dans un secteur privé trop faible et surtout dans un secteur informel aux revenus aléatoires. Selon le BIT (Bureau international du travail), " en 2005, sur la base d’un seuil de pauvreté d’un dollar par jour, l’Afrique subsaharienne comptait 148 millions de travailleurs pauvres, soit 56,3% de l’effectif total". Il y a donc emploi et emploi.

Est qualifié de "décent", l’emploi qui permet à l’individu de subvenir à ses besoins fondamentaux, de s’acquitter de ses obligations fiscales tout en contribuant au développement de son pays. Pour l’instant, on est loin du compte. Insertion des diplômés dans le monde du travail, soutien aux activités rémunératrices de revenus des femmes, formation, maintien des jeunes ruraux dans leur terroir pour développer les potentialités agricoles, et ce ne sont pas les chantiers qui manquent, mais plutôt l’imagination et l’engagement des dirigeants dans ce secteur.

Le constat a été fait et les conclusions de Ouagadougou engagent à nouveau nos décideurs à inclure l’emploi dans les politiques macroéconomiques. Il ne s’agit pas de l’évoquer en quelques lignes mais d’"inclure explicitement des objectifs, des cibles mesurables, et des indicateurs en matière d’emploi".

C’est une des six recommandations des assemblées générales de la BAD et de la CEA qui, en plus, proposent un cadre global pour gérer la question de l’emploi au niveau régional, notamment en matière de statistiques, de développement des infrastructures et de renforcement de capacités institutionnelles et d’assainissement de l’environnement des affaires pour attirer plus d’investissements.

Gageons qu’après une telle semaine de cogitation et de nouveaux engagements, les décideurs africains joindront cette fois-ci l’acte à la parole. Dans le cas contraire, le conclave de Ouagadougou n’aura été qu’une rencontre de plus.

Le Pays

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