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Olivier Poivre d’Arvor, directeur de l’AFAA : "“Les rencontres chorégraphiques ont permis l’éclosion de près de 150 compagnies sur le continent”

Publié le jeudi 18 mai 2006 à 08h15min

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Olivier Poivre-d’Arvor et toute son équipe ont coordonné de main de maître les 6e rencontres chorégraphiques d’Afrique et de l’Océan Indien. Dans cette interview, Olivier POIVRE-D’ARVOR, petit frère de PPDA (Patrick POIVRE-D’ARVOR) autre célébrité de la télévision française revient sur les motivations qui soutendent l’action de l’Association qu’il dirige.

Pourquoi l’AFAA soutient la danse contemporaine en Afrique et pourquoi l’organiser à Paris ?

Olivier POIVRE-D’ARVOR : Si cette biennale de la danse contemporaine n’avait pas existé, la danse en Afrique serait moins riche, et je crois que c’est un plus que ça apporte. Un jour ce soutien n’existera plus peut-être parce qu’il n’y aura plus besoin d’un concours ; mais il y a eu un travail qui a été fait pendant 10 ans qui était assez considérable à Luanda, puis à Madagascar et cette étape à Paris avant d’aller à Tunis en 2008. Cela a permis l’éclosion de près de 150 compagnies en Afrique dédiées à la danse contemporaine et qui n’existait pas il y a de cela quelques années encore. Sur les 150 compagnies, il doit y avoir, à mon avis, une cinquantaine qui vivent complètement de leur art et de leur travail.

Je pense également que cela porte une autre image de l’Afrique qui est différente de celle que l’on reçoit tous les jours dans les journaux. Ces compagnies apportent en France où ailleurs dans le monde, l’image d’une Afrique qui est brillante, qui gagne, qui est admirée au lieu d’une Afrique qui est toujours jugée d’une manière arbitraire. Je pense que cette biennale de la danse contemporaine (Rencontre Chorégraphique d’Afrique et de l’Océan Indien) est un bon instrument de communication pour l’Afrique.

Pensez-vous que ce genre de festival devrait se limiter à la danse contemporaine ? Pourquoi pas à celle traditionnelle ou autre ?

O.P.A : Peut-être, peut-être pas. Je ne sais pas. Là c’est un festival de danse contemporaine alors en France où ailleurs il y a des endroits où il y a la danse contemporaine. Mais il y a rarement des endroits où les deux danses s’exercent. Il y a un genre qui s’appelle la danse contemporaine qui a un public en France et en Europe, un public qui est prêt à acheter des spectacles ; il y a un marché pour la danse contemporaine. Ce qui n’est pas le cas pour la danse traditionnelle. Nous on va vers ce qui permet aux artistes de travailler et de gagner leur vie et d’être autonomes. C’est la réponse pour moi.

Est-ce que ces rencontres ne créent pas une certaine uniformisation des manières de danser à travers la danse dite contemporaine. Puisqu’elle n’est pas financée par les Africains eux-mêmes ?

O.P.A : Aucun problème si les Africains veulent la financer eux-mêmes. Le problème, c’est que personne ne veut et ne peut la financer. Je comprends très bien ce que vous voulez dire. Mais, en première réaction, je peux vous dire, écoutez-moi je fais ce que je veux, c’est mon argent, ça plait ou ça ne plaît pas. C’est une réaction un peu brutale, mais je pense qu’une chose est sûre : c’est que les cultures sont égales et moi je pense fondamentalement qu’elles sont égales, enfin, qu’il y a des cultures en Europe, en Amérique Latine, en Asie, en Afrique, et que toutes ces cultures sont également responsables et doivent être également respectées. Si on dit ça, il faut être cohérent avec ce qu’on dit. On peut se contenter de la dire et puis, après, chacun se débrouille. Sauf qu’elles ne sont pas égales.

Parce que, il y’en a qui ont des moyens de se faire connaître et d’autres pas. Et aujourd’hui, c’est vrai que notre principal objectif, à nous tous, communauté d’êtres humains, ma famille est de l’Île Maurice, je suis aussi Africain et je n’ai pas honte de le dire, notre rôle à tous, c’est vraiment de permettre l’égalité. Après, ce qui va se passer c’est que peu à peu la danse africaine, va elle-même influencer la danse contemporaine et on le voit aujourd’hui déjà. C’était le cas avec la musique. La musique africaine elle a transformé la musique européenne. Aujourd’hui les rythmes africains où maghrébins ont vraiment transformé, mais moi je ne m’en plains pas, je suis content, Edith PIAF ne me manque pas.

C’est vrai que votre question est très passionnante parce qu’étant un des éléments du débat, mais attention à ne pas faire des retours en arrière pour saper ce qui a déjà été fait. Je le dis, il y a très peu de gens qui s’intéressent au soutien à la culture et nous, nous faisons des efforts parce que cela paraît indispensable. C’est vrai que nous aussi nous avons toujours des comptes à rendre à ceux qui nous aident, je pense donc qu’il faudrait plutôt nous encourager.

Certes le reproche est intéressant et je pense qu’à la prochaine édition en 2008 moi je veux, à travers tes dires, que nous fassions entre 2006 et 2008 un travail ; quand je dis nous, c’est nous tous, c’est pas nous Français ou vous Africains ou Burkinabè, c’est de faire vraiment un travail de collection du patrimoine dansé africain pour qu’il y ait une mémoire de ça probablement à travers le film et que, en même temps qu’on développe la danse contemporaine, qu’on garde la trace et la mémoire de ce patrimoine-là.

Et ce patrimoine, les artistes pourront s’en emparer. Pour l’heure, l’Afrique a besoin de soutien pour que ses artistes soient entendus ailleurs qu’en Afrique. C’est vrai que je ne me pose pas trop de questions de ce type d’esthétique parce que avant l’esthétique il y a l’éthique et l’éthique, c’est égalité des chances. L’esthétique c’est une vraie question et vous avez raison de la poser mais on ne peut pas répondre.

Au-delà des trois mois de promotion que les lauréats vont bénéficier de la part de l’AFAA, qu’est-ce qui sera fait en termes de suivi après cette période ?

O.P.A : Vous savez, avant même ces trois mois de promotion, il faut regarder un peu les lauréats des 5 dernières éditions. Bon nombre de ces compagnies ont circulé et circulent encore, on les aide depuis 6 ans, 10 ans. Avant les trois mois de promotion, il faut remonter déjà à la période des sélections qui est très importante. Parce que dès qu’une compagnie est sélectionnée, c’est déjà une publicité formidable pour leur travail.

Le fait qu’il montre leur travail à ces rencontres constitue un tremplin très important et un marché conséquent. Je pense donc que c’est un processus d’énorme soutien et c’est rare de trouver cela. Vous avez des organismes qui vous soutiennent pendant un an, nous après on les soutient généralement sur deux années après les 3 mois de promotion et si ces pièces sont bonnes ces compagnies sont soutenues pendant très longtemps et c’est le cas de beaucoup d’entre elles aujourd’hui.

Par Frédéric ILBOUDO


Historique des rencontres chorégraphiques

Initiées en 1995 par Afrique en créations, les premières rencontres chorégraphiques se sont déroulées à Luanda en Angola. En 1998 elles sont rééditées encore dans la capitale angolaise avant de poser ses « pas » du côté d’Antananarivo à Madagascar en 1999. En 2000, l’Afrique en création fusionne avec l’AFAA et Salia SANOU notre compatriote succède à Germaine ACOGNIG à la tête de la direction artistique des rencontres. 2001, c’est à « Tana » à Madagascar que s’est tenue la quatrième édition, il en sera de même pour la 5e édition qui verra d’ailleurs une importante programmation hors concours.


Les lauréats du concours

1995 :
- Vincent MONTSOE (Afrique du sud) avec « Gula Mataù
- Neville CAMBELL (Zimbabwe) avec « and Rwanda ».
- Théo RAHARINASY avec « Lovanao »

1998 :
- Adiatou MASSIDI et Victor Abou BOUA de Côte d’Ivoire avec « Corps actif »
- Salia nï Seydou du Burkina Faso avec « Figninto »
- Faustin LINYEKULA et Opiyo OKACH avec « Cleansing »

A partir de 1998, les prix deviennent une aide à la création
(50 000 à 100 000 FF)

1999 :
- Boyzie CEKWANL l’emporte avec « Rona »
- Robyr ORLIN Afrique du sud avec la pièce « Daddy »
- Béatrice KOMBE de Côte d’Ivoire avec « sans repère »

2001 :
- Sello PESA (Afrique du sud) avec « Same bat différent »
- Ariry ANDIRAMORAT SI RESY (Madagascar) avec « Mirahaalaby mianala »
- Lassina COULIBALY (Burkina Faso) avec « Vin Nem ».

Les trois compagnies lauréates effectueront une tournée en France. C’est en 2001 également que RFI (Radio France International) instaure son prix dénommé prix RFI.

2003 :
- Adedayo M. LIADI (Nigeria) avec « Ori »
- Augusto CUVILAS du Mozambique avec solo « Um paracinco »
- Noël KETTLY avec « Tichebe ».

L’Opinion

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