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Nigéria :Ainsi, mon général a pris goût à la chose !

Publié le jeudi 11 mai 2006 à 07h45min

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Obasandjo veut aussi faire ça ! Finalement, on s’était trompé sur son compte. Il ne fait pas exception à la règle. Il est comme tous ces roitelets de nos républiques bananières ou cotonnières si vous voulez, avides de pouvoir et qui modifient la loi fondamentale à tour de bras pour mieux mourir... au pouvoir.

Au Gabon, au Tchad, au Burkina, au Cameroun et nous en oublions, la Constitution a été amendée contre vents et marées.

Ce qui a permis à ces chefs d’Etat de rester davantage au pouvoir pour y mourir... en paix. C’est exactement ce que tente de faire de nos jours, Olusegun Obasandjo, qui passait naguère comme un exemple d’homme d’Etat en Afrique.

En effet, après avoir été élu en 1999 et réélu en 2003 pour quatre ans, soit en tout deux mandats non renouvelables, Obassandjo tente par des arguties de sauter le verrou constitutionnel qui ne lui permettra pas une présidence... à vie.

Certes, l’ex-général nigérian n’a pas explicitement dit qu’il comptait rebeloter, mais les agitations de ses partisans et ses propres manœuves dilatoires en disent long sur ses vraies intentions.

Lui qui était, il n’y a pas longtemps, au four et au moulin pour éteindre les brasiers dans bien de zones sur le continent est depuis ces derniers temps singulièrement casanier.

Occupé qu’il est à rencontrer gouverneurs et sénateurs issus des rangs du Parti démocratique du peuple (PDP), sa formation politique, pour les sensibiliser à mieux réviser la Constitution, l’homme d’Etat nigérian n’a plus véritablement de temps à consacrer à l’Afrique.

Et pourtant avec ses quelque 150 millions d’habitants et ses milliards de dollars tirés du pétrole, le Nigeria est loin d’être un nain à l’échelle du continent, voire au-delà.

Rappelons qu’un Africain sur quatre est Nigérian, que la nature y généreuse et qu’avec environ 3 millions de barils par jour, il ne serait pas exagéré de dire que le pétrole y coule à flot.

C’est à la tête de ce pays riche, mais combien miné par la corruption et les replis identitaires (on y compte environ 250 ethnies) qu’Obassandjo tente vaille que vaille de se maintenir.

Certes, en sept ans de pouvoir, cet homme d’Etat a activement lutté contre la corruption et a su imprimer une nouvelle démarche économique à son pays. Ce qui le pousserait à briguer un 3e mandat pour, dit-on, "consolider son programme de réformes économiques".

De la poudre aux yeux, car la majorité de nos chefs d’Etat, grisés par les mirages de leurs "réussites politiques et économiques", en arrivent à penser qu’ils sont irremplaçables et qu’après eux, c’est le déluge.

Et pourtant cela coule de sources, les cimetières sont pleins d’hommes dits indispensables et irremplaçables... Obassandjo s’est lui aussi laissé griser par les tapis rouges, les jets privés, les accueils en fanfare, bref, les facilités de vie que procure le statut de chef d’Etat.

Mais, réussira-t-il le pari d’entamer un 3e mandat ? Le doute est permis, car son plus farouche opposant dans cette "œuvre funeste" n’est autre que son vice-président Atiku Abubakar, celui-là même qui fut le grand artisan de sa réélection en 2003.

Qui pis est, Atiku Abubakar, dans sa ferme volonté de contrer à tout prix Obassandjo, s’est rallié le soutien d’une formation politique créée par d’anciens dignitaires du parti au pouvoir. Pour eux, avec ce 3e mandat, c’est la démocratie qui va à vau-l’eau au Nigeria.

Véritablement, on tombe des nues en voyant ce militaire, pour lequel on avait le plus grand respect, jouer aussi le si mauvais rôle de tripatouilleur de la loi fondamentale.

Après avoir succédé au général Murtala Mohamed, assassiné lors d’une tentative de coup d’Etat en 1976, Olusegun Obassandjo a été le premier chef d’Etat militaire nigérian à remettre volontairement les rênes du pouvoir aux civils, en 1979.

Il est revenu démocratiquement à la tête de l’Etat grâce à des soutiens multiples en 1999, a été réélu pour un dernier mandat en 2003, et on s’était pris à rêver que lui, au moins, ne ferait pas comme les autres : tordre le coup à la constitution.

Malheureusement, il est en train de vouloir le faire. Ce qui ouvre une longue période d’incertitude pour ce géant africain, le Nigeria, et, osons le dire, pour le continent.

Boureima Diallo

Observateur Paalga

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Vos commentaires

  • Le 15 mai 2006 à 15:21, par Madiba En réponse à : > Nigéria :Ainsi, mon général a pris goût à la chose !

    Si nos dirigeants ont la possibilité de modifier la constitution à tord et à travers, c’est qu’ils ont en face d’eux des peuples qui ne les font ni chaud ni froid. En un mot, nous ne faisons pas peur à nos dirigeants. C’est nous qui avons peur d’eux, c’est la raison pour laquelle, ils massacrent la constitution, baffoue nos droits sans qu’on puisse dire quelque chose.

    Il faudra qu’il y ait un changement chez le peuple comme quoi "c’est le gouvernement qui doit avoir peur du peuple et non le contraire".

    D’autre part, je trouve que nous sommes un peu responsable que ce comportement souvent honteux de nos dirigeants. Lorsqu’une couche de la population demande que le président actuel se présente aux prochaînes électuelles tout en sachant que son mandat est arrivé à terme, il faudra s’attendre à la modification de la constitution.

    Peuple d’Afrique, lève toi et marche, ton avenir est devant toi

    • Le 17 mai 2006 à 11:59, par burkindi En réponse à : > Nigéria :Ainsi, mon général a pris goût à la chose !

      Rien à rajouter tant tes propos sont véridiques.
      tout simplement comme le disait un sage : "chaque peuple mérite ses dirigeants".
      Voilà, ailleurs il ya des révolutions oranges et autres. Par contre en Afrique il n’ya rien comme si tout baignait !

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