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Organisation des consommateurs du Burkina : "Fête de la bière ou fête de l’ivresse ?"

Publié le lundi 8 mai 2006 à 08h42min

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Dans le communiqué de presse ci-dessous, l’organisation des consommateurs du Burkina s’élève contre la fête de la bière et demande sa suppression, à tout le moins, la prise de mesures draconiennes.

Le Burkina Faso est réputé être un pays où la bière et la viande font bon ménage. La bière est surtout consommée dans les bars, restaurants, buvettes, maquis, etc. Lors de certains événements importants, comme les mariages, baptêmes, fêtes nationales, religieuses et coutumières, très souvent la demande en bière est tellement forte que surviennent des ruptures de stocks. S’il y a un produit dont le commerce au Burkina Faso est florissant, c’est bien la bière. Que cherche-t-on alors à travers l’institution d’une fête spécifique de la bière ?

Devons-nous laisser certaines personnes cultiver l’alcoolisme à la seule fin d’accroître leur chiffre d’affaires au détriment de la santé et de la sécurité des citoyens ? Assurément non.

En effet, les Burkinabè ont remarqué que depuis un certain temps, se déroulent des fêtes de la bière à Ouagadougou, organisées par le Syndicat national des travailleurs des débits de boissons (SNATB). Cette année, ladite fête se déroule du 28 avril au 8 mai 2006, sur le site du SIAO. La manifestation qui, du reste, est à sa 6e édition, aurait pu passer inaperçue si elle était couplée à une autre manifestation, car rien n’interdit aux vendeurs de boisson de s’organiser pour profiter d’une quelconque manifestation. Mais il s’agit, dans le présent cas, d’une fête spécialement dédiée à la bière, une boisson que certains considèrent désaltérante mais que d’autres qualifient d’alcoolisée, et dont la teneur en alcool se situe entre 3° et 7°. Certes, le taux d’alcool reste inférieur à celui des vins et autres boissons alcoolisées telles que le cognac, le whisky, etc. Cependant, absorbée en grande quantité, la bière peut se révéler une boisson très dangereuse. Sa consommation régulière conduit à l’éthylisme et, très souvent, les grands buveurs de bière sont facilement identifiables à leur physique (rougeur des lèvres, pâleur de la peau, couleur des yeux, amaigrissement, etc.).

Instituer une fête de la bière peut être assimilé à une volonté de promouvoir la consommation d’un produit dont les conséquences portent atteinte à la santé et à la sécurité des citoyens. C’est à ce niveau que la fête de la bière est condamnable. Si l’on admet l’organisation d’une fête de la bière, autant admettre également celle du tabac ou de tout autre produit nocif pour la santé des populations.

Organisée de cette façon, la fête de la bière n’est qu’une invite à la consommation à gogo de la bière et de la viande.

Or l’alcool et la viande sont deux produits dont la consommation peut provoquer des crises dangereuses pour notre santé. Leur consommation soumet l’organisme à des charges de maladies chroniques comme les maladies cardio-vasculaires, le cancer, le diabète, l’obésité, la cirrhose du foie, la goutte, l’athérosclérose, etc.

L’athérosclérose est une maladie caractérisée par une oblitération des vaisseaux due à un épaississement des parois artérielles avec une formation de plaques causée par des dépôts lipidiques provoqués par une surcharge alimentaire en cholestérol accumulé par l’intermédiaire de la consommation de la viande et d’autres produits. La viande, bien qu’apportant des protéines et des lipides à l’organisme, contient des graisses animales, sources de cholestérol, qui provoque l’athérosclérose et d’autres maladies cardiovasculaires.

La goutte, la cirrhose du foie, les maigreurs, des maladies provoquées souvent par l’alcool et la viande.

La fête de la bière existe dans certains pays tels que l’Allemagne et bien d’autres, mais les populations dans ces pays, contrairement à celles du Burkina Faso, mangent non seulement à leur faim, mais ont aussi une alimentation équilibrée. Au Burkina Faso, les populations sont victimes d’une sous-alimentation chronique, et le déséquilibre alimentaire les place constamment dans un état de carences nutritionnelles tel que leur résistance physique aux maladies s’affaiblit. Dans ces conditions, la promotion de la consommation d’un produit alcoolisé ne fera que contribuer à affaiblir davantage, physiquement et intellectuellement, les populations. Il est vrai que sans cette fête il y a toujours eu des alcooliques, mais nous pensons qu’il ne faut pas grossir le lot.

L’objectif visé par cette manifestation étant d’amener les gens à consommer plus de bière et à y prendre goût, les habitudes s’installeront, et comme l’habitude est une seconde nature, les gens continueront de consommer la bière et ces risques de maladies seront au rendez-vous.

Certes, on n’oblige personne à venir à cette fête et à boire de la bière, mais la meilleure solution ne consiste-t-elle pas à supprimer cette fête et à laisser les gens consommer de la bière quand ils en ont envie ? A l’allure où vont les choses, ceux qui ne buvaient pas de bière en seront petit à petit initiés à la consommation ; ceux qui en consommaient seront tentées d’augmenter leur consommation et, à la fin, le nombre de consommateurs de bière s’accroîtra ce qui induira une augmentation du volume de bière vendue.

Il est donc difficile de comprendre la justesse et le bien-fondé de la fête de la bière, si ce n’est pour des intérêts purement mercantiles.

Combien de personnes, après chaque journée de fête de la bière, sortiront saoules et vomiront dans la rue et, peut-être, finiront hospitalisées des suites d’accident de la circulation ou par suite de malaise gastrique pour abus d’alcool ? Et combien "claqueront" leur salaire pour consommer cette bière durant cette fête, laissant ainsi leur famille dans la misère ?

Le simple fait d’annoncer par voie de publicité que l’abus d’alcool est dangereux ne suffit pas à dédommager les organisateurs car on ne peut pas reconnaître qu’un produit est dangereux tout en incitant à sa consommation. On ne peut vouloir en même temps une chose et son contraire.

A défaut de la suppression, des mesures rigoureuses à prendre

L’interdiction des mineurs à la fête de la bière ne peut, à elle seule, ennoblir la fête ; c’est plutôt la suppression de cette fête qui serait louable.

Il est temps que les autorités prennent une décision pour arrêter cette fête, sinon à la longue le nombre d’alcooliques ira croissant, et le rendement au travail baissera. Cela se ressentira sur toute l’économie nationale.

A défaut, nous pensons que les autorités devront prendre des mesures rigoureuses, de nature à garantir la sécurité sanitaire et la sécurité physique des citoyens lors de cette fête.

A cet effet, l’OCB suggère les mesures suivantes :

- l’implication des ministères de la Santé, de la Sécurité, du Commerce, et des associations de consommateurs et bien d’autres structures ayant pour mission de protéger les citoyens, dans l’organisation de la manifestation ;

- l’interdiction de la publicité sur cette fête à la télévision et dans la presse écrite, etc.

- la restriction du nombre de bouteilles ou de canettes de bière consommé par jour et par festivalier (A ce niveau, une réflexion devra être menée pour instaurer un système de contrôle infaillible).

Par ailleurs, des mesures devront être prises pour veiller à la qualité des produits consommés (volaille, brochettes, mets et autres boissons de toute nature) ainsi qu’à la qualité de l’environnement, en particulier l’hygiène dans les lieux de vente et du personnel commis à tous les niveaux de service. Le personnel commis au service de la bière et autres produits alimentaires devra briller par sa propreté corporelle et vestimentaire et non sa dextérité à manipuler les plateaux de bière. Tout serveur (ou serveuse) atteint (ou atteinte) de maladie pulmonaire ou ayant des plaies et écorchures sur la peau devra être interdit (ou interdite) de service, etc. Les eaux de lavage des verres de bière devront contenir des produits bactéricides ou de désinfection, et être constamment renouvelées.

Nous pensons qu’il faut responsabiliser les organisateurs dans la gestion des conséquences fâcheuses de la fête de la bière. A cet effet, nous suggérons les mesures suivantes :

- l’obligation pour les organisateurs d’équiper les structures sanitaires de toutes les localités où se déroulent la fête de la bière en ambulances, produits et médicaments et équipements chirurgicaux, etc. pour les interventions d’urgence dans le cadre des évacuations sanitaires pendant la fête de la bière ;

- l’obligation pour les organisateurs de doter la gendarmerie et la police nationales en appareils alcootest pour le contrôle de l’état d’ivresse des gens dans la circulation afin de prévenir les accidents pendant cette fête ;

- l’obligation pour les organisateurs de prendre en charge financièrement les frais d’hospitalisation des accidentés et de toute personne évacuée du lieu de la fête de la bière par suite de malaise ou d’ivresse ;

Du reste, l’OCB est prête à s’associer à toute cellule de réflexion pour apporter sa contribution pour une meilleure organisation de la fête.

L’OCB invite l’ensemble des festivaliers à faire preuve de beaucoup de maîtrise de soi, et à consommer la bière et la viande avec beaucoup de modération, car l’excès a toujours nui.

A tous les festivaliers, nous disons que si l’abus d’alcool est dangereux, sa combinaison avec la viande est sûrement mortelle. Ne vous enivrez donc pas et consommez juste la mesure qu’il faut. Nous souhaitons que cette rencontre ne soit pas assimilée à une fête ou l’on pense être dans l’obligation de se saouler avant de retourner à la maison.

Bien que la fête tire à sa fin, nous avons tenu à faire cette réflexion pour qu’elle serve dans le futur.

Le Président

Le Pays

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