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Scandale politico-financier en France : Un simple fait divers en Afrique

Publié le vendredi 5 mai 2006 à 07h49min

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Sarkozy et Villepin

Vous en conviendrez avec nous. Vu d’Afrique, ce qui se passe actuellement en France est à la fois fascinant et révoltant. Fascinant d’abord parce que sur les bords de la Seine, aucun secret et aucun mensonge distillés par les plus hautes sphères du pouvoir, et aucune forme d’intimidation ne pourraient contraindre les médias à se plier à la loi du silence que voudraient leur imposer les hommes politiques dont les bêtisiers sont énormes. Et c’est bien pour le bon fonctionnement de la démocratie.

Parfois, les hommes politiques se cachent derrière la confidentialité d’une information pour tenter de museler la presse. Mais combien de coupables auraient échappé à la justice si la presse ne refusait pas cette séance de prosternation que voudraient lui imposer les hommes politiques ?

C’est révoltant ensuite parce que si en France le débat a allègrement franchi le seuil des antichambres des cabinets ministériels pour se déporter à l’Assemblée nationale, en Afrique il serait inimaginable de voir un Premier ministre offert en spectacle aux citoyens par leurs élus interposés. En fait, de quoi s’agit-il ? Il s’agit de rumeurs d’accusations d’espionnage portées contre Dominique de Villepin sur la personne de Nicolas Sarkozy, qui aurait ouvert des comptes dans des banques étrangères.

Ce qui semble un délit en France est un sport favori en Afrique, où les dignitaires qui nous gouvernent éprouvent une certaine fierté à exhiber ostentatoirement leurs avoirs financiers déposés dans les paradis fiscaux occidentaux.

Avec cette impunité ambiante, qui viendrait les inquiéter quand, manifestement, ils échappent au fisc de leur pays et lorsqu’ils sont coupables de favoriser la fuite des capitaux ? En tous les cas, ils sont encouragés par ces effets d’annonces et annonces sans effet dont l’Afrique est coutumière. Que de fois des individus ont été accusés, avec un lynchage médiatique sans précédent, de détournements de deniers publics !

Bien qu’assorties de poursuites judiciaires, ces accusations se sont transformées en une sorte de prime à l’encouragement, tant les présumés coupables continuent à se pavaner comme des paons, et à narguer ceux qu’ils dépeignent comme des envieux et des jaloux qui ne devraient s’en prendre qu’à eux-mêmes pour n’être pas nés sous une bonne étoile.

Au Burkina, il serait fastidieux de recenser tous les scandales financiers sur fond de détournements. Ce qu’on peut retenir, c’est que ces présumés détourneurs n’ont jamais exigé que la vérité, toute la vérité et rien que la vérité soient faites sur ce dont ils sont accusés, alors qu’ils sortiraient grandis et ennoblis aux yeux des citoyens, s’ils se soumettaient au devoir de transparence

Que représente un homme dont la crédibilité et la réputation sont mal cotées à la bourse des valeurs morales ? Quant aux accusateurs, en n’allant pas au bout de leur logique en confiant effectivement le dossier à la justice, ils démontrent soit leur acharnement sur leurs victimes, soit leur connivence avec ces deniers.

Bien entendu, comme il fallait s’y attendre, Villepin dénonce ceux qui véhiculent ces rumeurs. Mais, acculé par un journal, "Le Monde", dont le professionnalisme et le souci du respect de l’éthique et de la déontologie sont difficilement contestables, il s’est rendu compte qu’il ne servirait à rien de diaboliser cette information alternative à laquelle ont souvent recours les médias quand les portes de la transparence sont cadenassées.

En Afrique, quelles que soient l’ampleur et la gravité d’un scandale, elles sont releguées au rang d’un simple fait divers. En Afrique, la rumeur, même avérée, a beau aboyer, la caravane de la malgouvernance continue sa chevauchée.

En France, Nicolas Sarkozy, qui convoite le fauteuil présidentiel, sait qu’il n’a de chance de parvenir à ses fins que s’il prouve son innocence. Il sait que ce n’est pas fortuit si ce problème, qui date de très longtemps, éclate aujourd’hui. Il a donc intérêt à ce que la vérité soit révélée, s’il ne veut voir miné le boulevard qui mène à l’Elysée au moment où tous les sondages lui semblent, à quelques exceptions près, favorables. En France, surtout à l’approche de chaque échéance électorale, les coups bas sont fréquents. Ce scandale dans la famille de la majorité était normal.

Villepin et Sarkozy ont longtemps habitué les Français au fameux couplet "Je t’aime moi non plus". Le concubinage imposé par Chirac devrait un jour prendre fin de façon fracassante. Les deux têtes d’affiche de l’exécutif savent bien que dans ce genre de situation, quand tous les rouages de la vie socioéconomique et politique s’en mêlent, à moins d’aller au suicide, ils doivent se soumettre aux dures lois de la vérité.

Tel n’est pas le cas en Afrique où les présumés coupables d’un scandale comptent sur l’absence de mobilisation et la lassitude des citoyens pour échapper à l’étau des sales affaires.

Le Fou

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Vos commentaires

  • Le 5 mai 2006 à 11:28, par Yvon_Paris En réponse à : > Scandale politico-financier en France : Un simple fait divers en Afrique

    Le fou, tu n’as pas bien saisi le fond de l’affaire Clearstream. Par contre, bonne analyse.

    • Le 5 mai 2006 à 16:57, par Sally En réponse à : > Scandale politico-financier en France : Un simple fait divers en Afrique

      Ne pas bien saisir le fond de l’affaire ne veut pas dire etre fou
      désolée

      • Le 6 mai 2006 à 12:48, par Nogo En réponse à : > Scandale politico-financier en France : Un simple fait divers en Afrique

        "Le fou" c’est le nom du chroniqueur mais pas une qualifcation. Ce qui manque aux pays africains qu’il critique-critiques qui ne doivent pas être généralisées à tous car ce n’est pas le cas et en plus ça aurait un effet de fatalité-c’est le manque de mobilisation citoyenne. Il est vain que la presse dénonce quelque chose si les citoyens ne sanctionnent pas les mauvaises conduites. On a vu lors des élections récentes au Burkina des gens qu’on a réelus sans demander de bilan et souvent même avec des bilans clairement désastreux. Comment voulez-vous que les gouvernants changent de comportement si les citoyens ne changent pas le leur ? En effet les burkinabè raisonnent en terme de partisanisme : "tu es avec moi ou contre moi" peu importe ce que je fais. Illustration : en août plus de la moitié des burkinabè se déclarent d’accord avec le programme de Blaise Compaoré avant même que ce programme ne soit connu. En déhors de l’aspect niais de cette situation, ce qu’elle revèlent c’est qu’on ne lui demande même pas un programme, alors comment voulez-vous qu’il en ait un ?

        Il faut réellement changer cette logique et commencer par se mobiliser contre les dérives comme on l’ a fait du reste à la suite de la mort de Norbert zongo, on a vu les résultats : dépuis lors aucun journaliste n’a été assassiné pour ses opinions.

  • Le 6 mai 2006 à 14:52, par Nancy Lorraine Traoré En réponse à : > Scandale politico-financier en France : Un simple fait divers en Afrique

    Je pense qu’une lecture attentive, aurait permis "au fou" de comprendre que plus que Sarko, c’est De Villepin qui risque gros ds cette affaire et par extrapolation la droite tt entière, le camp de la majorité présidentielle. Il n’y a pas lieu de faire une comparaison avec les politiques africains. Car il est de notoriété publique que l’exercice du pouvoir d’état en afrique, se resume pour la plupart des cas à une course frénétique à l’enrichissement personnel et illicite le temps d’un mandat politique. Ceci est d’autant vrai qu’il n’y a qu’en Afrique que les articles constitutionnels sont torpillés afin que des présidents puissent briguer des mandats supplémentaires. C’est ce que j’appelle des présidents "démocratiquement élus à vie". Ne chercher pas l’erreur !!! Circulez ya rien à voir.

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