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A quoi servent les gouvernements pléthoriques ?

Publié le mercredi 12 avril 2006 à 07h15min

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Un sondage sur le nombre de ministres que le citoyen lambda souhaiterait voir figurer dans un gouvernement, que ce soit en Afrique comme partout ailleurs, ferait sans nul doute ressortir qu’ils sont nombreux, ceux qui pensent qu’un cabinet de plus de trente membres, voire d’une quarantaine, c’est franchement à la fois pléthorique et budgétivore.

En Occident, en tout cas, on verrait en cela, une incongruité, une aberration. On remuerait la tête et on lancerait ensuite : des fantaisies propres aux pays en développement. L’Afrique, plus particulièrement, peut-elle se permettre un tel luxe, dans un tel contexte de pauvreté presque généralisée ? Parce que sans ressources financières immenses, la logique aurait voulu que ç’eût été le continent pauvre qui comptât le moins de ministres. Tout le contraire.

Avec ce nombre impressionnant de cadres supérieurs au sein du pouvoir exécutif sur le continent, comment s’étonner que le train de vie de bien des Etats africains soit scandaleux et sans adéquation avec la réalité ? Salaires, indemnités, avantages et privilèges de toutes sortes, tout cela, évidemment, coûte cher, non seulement à l’Etat, mais également au contribuable africain.

Alors qu’on lui demande de se serrer la ceinture et d’espérer des lendemains qui chantent, le commun des mortels africains a souvent la fâcheuse impression qu’au sommet de l’Etat, c’est plutôt le règne de l’engraissage. Comment accepter le sacrifice quand l’exemple n’est pas donné au sommet ? Pour certains chefs d’Etat africains, l’attribution des portefeuilles frise la désacralisation du poste. Et l’intendance, dans tout cela ? C’est comme si l’on ignorait qu’un Etat fort se bâtit aussi sur une économie forte.

Ce phénomène d’effectifs pléthoriques, qui ne date pas d’ailleurs d’aujourd’hui, continuera sans doute sa marche en toute liberté tant que la politique, telle que pratiquée sous les tropiques africaines, sera un domaine réservé à des initiés, où se négocient, dans les antichambres obscures des pouvoirs, des maroquins ministériels en reconnaissance de services politiques rendus aux chefs. En somme, une sorte de gâteau géant à partager entre amis et alliés politiques.

A telle enseigne que, bien souvent, sont créés des ministères fantoches et superflus, dont les responsables sont parfois loins d’être des lumières. Des ministères dont les objectifs se chevauchent, et qu’on aurait pu regrouper. Mais une idée que des considérations d’ordre politicien empêcheraient, parce qu’on a le souci de renvoyer l’ascenseur. Ce sont là autant de pratiques qui font planer le doute sur une gestion saine des affaires de l’Etat. Aussi, cette vieille pratique risque de se sédimenter tant que, par souci purement régionaliste, comme cela se fait en Afrique, les pouvoirs se livreront à un jeu qui consiste à nommer les ministres selon leur appartenance géographique, de sorte que l’ensemble du territoire soit stratégiquement quadrillé.

Il est vrai que certains contextes socio-politiques commandent la mise en place d’un gouvernement de large ouverture. Car, dans certaines circonstances, cette exigence procède d’un souci d’apaisement. Mais, il ne faut tout de même pas exagérer. Un gouvernement d’une quarantaine de membres dans un Etat victime d’un marasme économique, cela est incompréhensible. L’Etat doit être considéré comme une entreprise qu’il faut gérer comme telle. Ce qui appelle des règles de bonne gouvernance et de savoir-faire managerial.

Pourquoi créer certains ministères alors qu’un secrétariat général ou une direction générale aurait suffi ? Comparaison n’est pas raison. Mais pourquoi ne pas prendre l’exemple des pays développés dont les gouvernements, bien que réduits, sont formés de membres dont la qualité et la compétence ne font pas de doute ? Ces pays s’en portent-ils plus mal ? Non. Bien au contraire.

En mettant en place son nouveau cabinet composé de vingt-deux compétences - elles n’ont jamais servi dans un gouvernement - Yayi Boni, le tout nouveau président élu du Bénin, montre ainsi qu’il est possible de gouverner un Etat sans une pléiade de ministres. Reste à prouver aux Béninois que les technocrates peuvent, sans être forcément des bêtes politiques, apporter le mieux-être attendu par les Béninois.

Le Pays

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