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Journée nationale de Pardon (JNP) : L’état des engagements 5 ans après

Publié le samedi 1er avril 2006 à 09h31min

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Le mémorial aux héros nationaux

30 mars 2001, 30 mars 2006. Cela fait exactement 5 ans que la journée nationale de Pardon a été instaurée dans notre pays, par la volonté du président Blaise COMPAORE qui avait pris sur lui des engagements, afin de permettre à l’ensemble du peuple burkinabè de se pardonner mutuellement et de se réconcilier avec lui-même.
5 ans après, tout le Burkina jouit des fruits de ces engagements.

En effet, dans le cadre des activités commémoratives de cette journée, le secrétaire général du gouvernement, M. Zakaria KOTE et les acteurs pour la concrétisation de ces engagements ont tenu à faire la lumière sur leur état d’exécution à travers un point de presse le mardi 28 mars 2006 au ministère des Affaires étrangères.

Le secrétaire général du gouvernement après avoir évoqué l’importance et la charge-historique de la journée nationale de Pardon, les présidents des différents comités ont été invités à faire l’exposé-bilan de leurs activités. Ainsi, le président du Comité de suivi de la mise en œuvre des engagements, M. Didace DOUAMBA, a fait la situation périodique de l’état d’exécution des différents engagements et leur évolution.

Pour le premier engagement : « l’organisation d’assises spéciales pour connaître et régler les cas de crimes économiques, de sang ou politiques qui ont causé des torts à notre pays », il est à noter qu’au cours de l’année 2005, une seule assise, tenue du 24 au 30 juin, par la Chambre criminelle de la Cour d’appel de Bobo-Dioulasso, a statué sur 15 dossiers impliquant une trentaine d’accusés.

Les infractions ont porté essentiellement sur des crimes de sang et des vols qualifiés. Depuis le début de la mise en œuvre de cet engagement, le nombre des assises tenues s’élève à 11 pour 143 affaires jugées. On observe une nette prédominance des dossiers de crimes de sang et de vols qualifiés alors que ceux portant sur les crimes économiques, dont le traitement judiciaire diligent est aussi important pour la consolidation de la paix sociale, tardent à être enrôlés.

Pour M. DOUAMBA, dans son rapport, le comité a attiré l’attention du gouvernement sur la nécessité de se pencher aussi sur ce type de dossiers de manière à ce qu’on puisse dissiper dans l’opinion publique ce sentiment d’exaspération qu’on note actuellement face à l’impunité dont semblent jouir les auteurs de détournements.

Le deuxième engagement, c’est la mise en œuvre de mesures de réparation, dont la création d’un fonds d’indemnisation en faveur des familles de toutes les victimes de la violence en politique pour permettre d’apporter une aide matérielle et financière aux familles en détresse.

Ce deuxième engagement est pris en charge par les instances du fonds c’est-à-dire le comité de gestion du fonds d’indemnisation aux personnes victimes de la violence en politique et la direction du fonds.
Le troisième engagement, c’est l’érection de monuments qui seront les témoins de notre devoir de mémoire à l’égard de tous nos martyrs et héros nationaux. Il s’agit essentiellement du mémorial aux héros nationaux qui s’édifie à Ouaga 2000 et du monument aux martyrs qui s’édifie à Tampouy.

A la date du 30 décembre 2005, la situation de ces deux monuments se présente ainsi qu’il suit : Pour ce qui concerne le mémorial aux héros nationaux on accuse un retard de près de 27 mois, mais l’exécution physique, en ce qui concerne le gros œuvre est à 97% et l’exécution financière à 80%. On peut considérer qu’en ce qui concerne le gros œuvre, le corps du bâtiment est pratiquement réalisé, il reste quelques petits travaux de finition et l’ouvrage pourra être livré à qui de droit.

Pour le monument aux martyrs à Tampouy, c’est un chantier qui aurait connu un démarrage assez difficile et finalement les travaux n’ont démarré que le 08 août 2005 pour un délai contractuel de 5 mois. A l’heure actuelle, le chantier connaît un retard par rapport au délai contractuel de 3 mois. En fait, il y a un problème de collaboration assez sérieux sur le chantier qui empêche sa bonne exécution. Le gouvernement serait saisi de la question et il y a des concertations qui sont menées pour trouver une solution à la crise.

Le quatrième engagement, c’est la commémoration sur toute l’étendue du territoire national du 30 mars de chaque année comme une journée du souvenir, de la promotion des droits humains et de la démocratie au Burkina Faso. Cette journée est une occasion de recueillement et de mémoire pour nos martyrs mais aussi une occasion pour faire le point sur l’état de la démocratie et l’application des droits humains au Burkina Faso. Cet engagement compte en fait deux volets.

D’une part, la commémoration de la journée nationale de Pardon le 30 mars de chaque année avec un accent particulier sur le recueillement et le souvenir des martyrs et le second volet, c’est qu’à l’occasion de la commémoration de la journée nationale de Pardon, le peuple tout entier est invité à une réflexion sur l’état de la démocratie et l’application des droits humains au Burkina Faso.

Le quatrième anniversaire de la journée nationale de Pardon avait été célébré avec un éclat particulier avec comme activité marquante un panel organisé à l’initiative du comité national d’éthique sur le thème : « éthique et fédération de la paix ». Ensuite l’ensemble des comités avait tenu un atelier d’évaluation à mi-parcours de la mise en œuvre des engagements. Des offices religieux avaient été célébrés dans la quasi-totalité des régions. Et surtout l’ensemble des comités avaient effectué des tournées d’information dans les chef-lieux de régions.

Le ministre de la Promotion des droits humains, Mme Monique ILBOUDO, avait saisi cette occasion pour organiser une tournée qui lui a permis de se focaliser sur la question de « l’état civil » dans les villes et villages du Centre-Nord. Elle a profité de l’opportunité pour organiser une table ronde à Kaya sur l’état de la démocratie au Burkina Faso.

Au cours de l’année 2005 le ministre a conçu et réalisé un film documentaire de 77 minutes sur le thème : « Semer des droits humains : état de la démocratie et des droits au Burkina Faso ».

Chaque fois que des organisations de la société civile ont des ateliers, des séminaires, le ministère en profite pour faire visionner ce film.

Le cinquième engagement, c’est la mise en place d’un comité d’éthique composé de personnalités dont la probité, l’expérience et la compétence font autorité dans le but de moraliser la vie publique, de combattre la corruption, et la délinquance économique.

Concernant le sixième engagement, la réduction du déficit de communication et de dialogue actuel entre les acteurs politiques et sociaux de la nation en vue d’une réconciliation nationale durable. En 2005, le comité de suivi a eu à relever une série d’initiatives allant dans le sens de la concrétisation de cet engagement. Il y a des rencontres initiées par le chef de l’Etat avec les corps constitués en vue d’échanger sur les réponses apportées par le gouvernement à leurs préoccupations telles qu’elles avaient été exprimées à l’occasion des vœux de fin d’année.

Il y a eu la rencontre d’information et de sensibilisation et plusieurs autres rencontres dont le séminaire CIVIPAX qui a réuni des leaders religieux et coutumiers sur la question de la paix. Sur un autre plan on relève que les acteurs politiques par l’entremise de la société civile ont pu se retrouver autour de la même table pour des concertations en vue d’approfondir le dialogue politique.

C’est ainsi que le Centre pour la gouvernance démocratique (CGD), le GERDES, NDI (National democratic institute for international affairs), ont animé un certain nombre d’ateliers, des séminaires qui ont abouti à des prises de positions des acteurs politiques. En particulier je retiendrai trois conclusions qui paraissent très importantes.

A l’issue d’un de ces séminaires, les acteurs de la politique avaient admis que des contraintes réelles s’imposaient à la CENI et avaient trouvé nécessaire le report des élections locales. Les acteurs politiques avaient reconnu aussi les prérogatives du gouvernement en matière de fixation de calendrier des élections et notamment le droit pour le gouvernement d’inverser l’ordre des scrutins. Le sujet avait fait l’objet de débats bien avant. Cependant, à l’occasion de ces rencontres, des communications ont été données par des constitutionnalistes qui ont permis d’arriver à ces conclusions. Des propositions pertinentes en vue du bon déroulement des élections sur le terrain et notamment l’adoption de manière consensuelle d’un code de bonne conduite face aux élections locales qui s’annoncent en sont les conséquences.

En abordant le 7e engagement, la poursuite des réformes politiques et institutionnelles en cours devant déboucher sur la mise en place d’un système de gouvernance consensuelle, M. DOUAMBA dira que le comité a relevé certaines actions qui vont dans le sens de la concrétisation de cet engagement.
Il a terminé son intervention par un certain nombre de propositions. Il a tout d’abord souhaité le traitement diligent des dossiers jugés sensibles et la tenue régulière des assises notamment sur les dossiers de crimes économiques.

Ensuite, la mise en place d’un mécanisme de veille sur les décisions des Conseils des ministres, notamment en ce qui concerne les sanctions assorties de poursuites judiciaires. Il a surtout insisté sur la nécessité de procéder à l’inauguration du mémorial aux héros nationaux le 30 mars 2006.

M. Dominique SISSO, représentant le président du Comité technique d’appui au gouvernement, est revenu sur les missions dudit comité. Il relève en effet, qu’après le drame de Sapouy de 1998 qui a choqué les Burkinabè, les plus hautes autorités du Burkina Faso ont pris conscience qu’il fallait faire quelque chose, donner un signal fort pour marquer leur volonté de prendre un nouveau départ, plus respectueux des droits les plus élémentaires des Burkinabè dans la conquête et l’exercice du pouvoir d’Etat. Mais cela ne peut se faire sans une véritable réconciliation nationale. Une des missions justement du Comité technique d’appui au Gouvernement est d’aider ce dernier à préparer psychologiquement les Burkinabè à adhérer au processus de réconciliation.

Mais comme le comité a-t-il procédé ? Eh bien, la charge émotionnelle était tellement forte dans de nombreuses familles burkinabè dont des membres ont connu une mort violente qu’il fallait d’abord apaiser les cœurs meurtris avant de parler de réconciliation. Cela a consisté à aller dans chaque famille éplorée, présenter les condoléances et demander pardon au nom du Gouvernement. Un exercice pénible. Il fallait beaucoup de patience et de doigtée pour ne pas faire gaffe ou blesser des susceptibilités.

Le Comité technique d’appui au Gouvernement devait connaître les coutumes de chaque ethnie concernée avant d’entreprendre les démarches, c’est dire combien les aspects culturels ont été le principal atout dont il s’est servi pour mener à bien sa mission. Et chaque fois c’était très émouvant. Il y avait des séances pénibles de pleurs et de lamentations.

Le second volet a consisté à montrer les tombes des parents morts et dont les familles ignorent le lieu de sépulture. Là encore, il y a eu des précautions à prendre avant d’amener les familles sur les lieux car, dans certains cas, il s’agit de fosses communes. Pour certaines familles, cela constitue un second choc, d’autres familles mêmes n’avaient pas hésité à exprimer bruyamment leur révolte et leur indignation. Mais dans l’ensemble le Comité technique d’appui au Gouvernement s’est rendu dans plus d’une centaine de familles et tout s’est finalement bien passé.

Il reste encore des familles à visiter cela veut dire que le travail continue, a fait savoir M. SISSO.
En tout, en quatre années, l’Etat a consenti d’énormes efforts pour la mise en œuvre de l’ensemble des engagements pris par le chef de l’Etat. Le résultat en est aujourd’hui une accalmie relative sur tous les fronts. Toutefois, pour mieux apprécier l’impact de ces efforts, une évaluation s’impose. Des résultats de cette évaluation à en croire le SG du gouvernement, devront fournir des indications utiles pour la conduite future du processus de réconciliation engagé.

Etat des indemnisations
A la date du 27 mars 2006, le comité de gestion du Fonds d’indemnisation des personnes victimes de la violence en politique a examiné un total de 1175 dossiers répartis comme suit :

- victimes décédées : 95
- séquestration : 296
- coup de blessures : 57
- vandalisme : 77
- spoliation : 81
- cas spécifiques : 12
- mesures administratives
abusives : 557

Actuellement ce sont les indemnités de 444 victimes qui ont été liquidées pour un montant de 3 778 648 076 F CFA. Il a été payé à ces victimes la somme totale de 3 584 075 401 F CFA

L’Opinion

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